Oui au nucléaire civil, mais sous certaines conditions.



Le nucléaire est une énergie qui fait peur, mais pour l’écologiste convaincu que je suis, il a un énorme avantage sur les énergies fossiles (qui fournissent 80% de l’énergie mondiale), il émet très peu de gaz à effet de serre. Le problème du réchauffement climatique, lié à nos émissions de gaz à effet de serre, est bien plus majeur pour la vie terrestre que le drame que représente l’explosion éventuelle d’une centrale atomique.
Par ailleurs les déchets nucléaires représentent certes des matières dangereuses mais ils ont le grand mérite d'être confinés, ce qui n'est absolument pas le cas du gaz carbonique que nos voitures et nos chaudières à gaz recrachent dans l'atmosphère. 
Cet aspect des choses est souvent minoré par les détracteurs du nucléaire alors que la comparaison entre les deux déchets que sont les gaz à effet de serre et les déchets radioactifs montre que les plus dangereux pour la biosphère sont les premiers cités. On peut toujours se montrer scandalisé par des malformations chez des animaux et des humains liées à des accidents civils et militaires regrettables, mais ce n'est rien comparé à la disparition d'immenses aires climatiques et biologiques à cause des dérèglements climatiques.
Généralement les écologistes anti-nucléaires proposent, dans le cadre d'un projet sociétal acceptable, en plus des énergies renouvelables et des économies d'énergie, l'alternative des centrales brûlant du gaz naturel. Ce qui se révèlent aussi efficace pour réchauffer la planète que les centrales brûlant du charbon ou du fioul lourd. En outre ils écrivent que le caractère négligeable de cette énergie sur le plan mondial devrait inciter tout le monde à s'en passer. Le nucléaire représente certes  3% de l'énergie totale consommée sur la planète, mais il évite 10% d'émission de gaz à effet de serre en plus, ce qui est loin d'être négligeable... à l'heure où l'humanité devrait diviser par deux ses émissions de gaz à effet de serre.  

Le nucléaire subit le contrecoup d'une "légende noire" diffusée par ses détracteurs et je vais vous démontrer que le nucléaire n'est pas si noir que cela et qu'il constitue même une partie de la solution pour résoudre un gros problème : la modification du climat.

J'ai choisi de présenter ce document en répondant à plusieurs questions :


Tchernobyl doit-il nous interdire l'usage du nucléaire pour nous sortir de l'usage des énergies fossiles ? 

Tchernobyl est sans cesse rappelé pour montrer la dangerosité du nucléaire. Mais quelles ont été les conséquences réelles de cet accident ? 

Pour comprendre comment s'est déroulé l'accident : cliquez ici.

Sur le plan humain, les différents bilans officiels font état de moins d'une centaine de morts (En comptant tous les cas dont on est sûr qu'ils sont le résultat direct de l'explosion de la centrale et des radiations qui ont suivi.) alors que les écologistes et de nombreux médias soucieux des effets d'annonce ont parlé de 7000 à 25000 morts. Une liste de 12000 morts a été publiée en Bélarus mais nous ne sommes pas certains que ces morts soient dues aux effets des radiations issues de l'explosion de la centrale. Des fous furieux parmi les anti-nucléaires parlent de millions de morts. Invérifiables ! Qui croire alors ? 
Je pense que les bilans officiels sont trop légers et vu le manque de transparence qui règne en Russie, de nombreux cas ont certainement été oubliés ou cachés mais pas autant que ce qui a été annoncé par certains médias. On ne peut ignorer la réalité scientifique des effets des faibles doses dans lesquelles nous baignions tous les jours soit parce que nous habitons sur un massif granitique ou soit parce que nous faisons régulièrement des examens médicaux avec des appareils radiographiques. Les effets des faibles doses ne sont pas mesurables par rapport à d'autres facteurs de mortalité comme la pollution, les conduites addictives et l'hygiène de vie d'une population. On peut dire sans se tromper que les radiations issues de l'accident de la centrale de Tchernobyl ont été responsables de plusieurs centaines de morts, et on peut ajouter également que les effets psychosomatiques et sociaux des 220 000 personnes relogées ont été sévères. Ces sujets ont vécu dans des conditions précaires et leur anxiété était constamment alimentée par des rumeurs pessimistes concernant les maladies qui les menaçaient. On a constaté chez eux une augmentation de la fréquence des maladies psychosomatiques, des dépressions et même des suicides. C'est là une conséquence sanitaire majeure de la catastrophe. Or la légitimité de la plupart de ces évacuations est discutable, puisque si les sujets étaient restés sur place, les doses qu'ils auraient reçues n'auraient pas été supérieures à celles que reçoivent les habitants de nombreuses régions du monde et très inférieures à celles reçues par les habitants du Kerala, au Sud de l'Inde, ou de certaines régions du Brésil. Ces populations s'accommodent parfaitement d'une importante exposition à la radioactivité naturelle. 

Vue globale de la centrale

Bâtiment éventré par l'explosion

Construction du Sarcophage

Et les effets sur la nature ? L'atteinte aux écosystèmes résultant de l'irradiation a été localement indiscutable au moment de l'accident, des centaines d'hectares d'arbres ont été grillés par exemple. Cependant les radiations ont peu d’effets sur les plantes et les animaux peu évolués. Un cancer qui met 20 ans à se déclarer chez des individus appartenant à une société prospère s’observera difficilement sur des espèces animales dont l’espérance de vie ne dépasse pas 15 ans pour des raisons de concurrence avec d'autres facteurs de pression que sont les virus et bactéries pathogènes, la concurrence avec d'autres espèces et la dureté de la vie sauvage. Aujourd'hui les forêts ont repris un aspect parfaitement normal, et les prélèvements de rats effectués dans la zone très fortement soumise aux radiations après l'accident  ne montrent pas de dommages majeurs. Encore plus surprenant, les environs de Tchernobyl sont maintenant plutôt abondamment fournis en faune sauvage qu'avant l'accident. Il a en effet libéré la nature sur une vaste zone (Il est interdit de résider à moins de 30 km de Tchernobyl.) de son premier facteur de pression : l’homme. L'évacuation du prédateur universel que nous constituons contrebalance, et bien au-delà, les dommages engendrés par les radiations supplémentaires. Les sols contaminés de manière importante par Tchernobyl, et qui mettront des décennies avant de redevenir cultivables sans précautions particulières, couvrent plus d'un millier de kilomètres carrés, et là réside le dommage le plus significatif à moyen terme de l'accident. Ce chiffre est cependant à comparer avec les quelques 5000 km² que l'on couvre tous les ans d'asphalte et que l'on stérilise pour des siècles. Encore une fois, même dans le cadre de cet accident aux conséquences régionales regrettable, les risques du nucléaire sont à comparer avec l'usage des énergies fossiles au niveau global. 

Le nuage radioactif issu de l'explosion du réacteur a recouvert une bonne partie de l'Europe et il ne s'est pas arrêté à nos frontières comme cela l'avait été annoncé dans les médias à l'époque. 

Les territoires les plus touchés restent cependant les plus proches de la centrale et on peut dire que l'impact sanitaire de Tchernobyl en France a été négligeable. La radioactivité reçue en France est comparable à la radioactivité naturellement reçue lors d'un séjour d'une semaine en Bretagne ou dans le Massif Central. Les quelques zones les plus contaminées peuvent présenter des risques chez les très gros mangeurs de champignons (au delà de 20 kg par an, ce qui est exceptionnel). Par contre l'impact psychologique sur les populations européennes n'a pas été négligeable (des milliers de femmes enceintes ont avorté un peu partout en Europe de peur de mettre au monde des enfants anormaux), et ceci s'est traduit pas un recul de nombreux pays dans le développement du nucléaire.

La prise en compte des risques climatiques devrait influencer favorablement l'acceptation des populations européennes vis-à-vis de l'énergie nucléaire. Encore faudra-t-il qu'elles acceptent en même temps d'importantes économies d'énergie électrique pour limiter la prise de risque ?

Il ne s’agit donc pas de nier les effets négatifs d’un accident nucléaire, mais il faut les comparer à d’autres catastrophes potentielles.  Les écologistes actuels (les Verts, GreenPeace, Cap21, le réseau Sortir du Nucléaire (avec plus de 700 associations !)...) insistent tous sur la dangerosité du nucléaire alors qu’à mon avis le réchauffement de la planète et la raréfaction des énergies fossiles dans une société qui ne l'anticipe pas risquent d’être beaucoup plus dramatiques.  En conséquence la vie dans son ensemble a bien plus à craindre de la combustion des énergies fossiles que d'un possible accident nucléaire aussi grave que l'explosion de la centrale de Tchernobyl. Si nous souhaitons limiter notre impact sur les écosystème ne faut-il pas revoir bien des choses avant la sortie du nucléaire ?

D'ailleurs, toujours revenir sur Tchernobyl n'a plus de sens. Tous les scientifiques et techniciens du nucléaire ont bien identifié les causes d'une telle explosion : régime politique à bout de souffle, équipe incompétente et conception du réacteur dangereuse au regard des critères occidentaux. Un tel accident n'a aucune chance de se répéter dans les centrales des pays occidentaux car la nature même des réacteurs rend improbable voire impossible un pareil accident.
Pourquoi ne ferions-nous pas confiance aux ingénieurs d'EDF qui sont en charge de la sûreté de nos centrales ?  Nous avons bien confiance dans les fabricants de voitures que nous plébiscitons massivement en achetant des véhicules toujours plus polluants, et pourtant ils sont en train de nous mener à une catastrophe climatique...   bien pire que toutes les catastrophes nucléaires qu'agitent sans cesse les détracteurs du nucléaire.                                    


Quelles sont les conséquences de l'effet de serre ?

Les bouleversements écologiques générés par l’effet de serre n’augurent pas de bonnes nouvelles pour notre espèce et la vie dans son ensemble. Toute la communauté scientifique s’accorde sur ce point et plus leurs recherches avancent, moins ils sont optimistes. Il n'y a que les plus entêtés des anti-nucléaires pour nier les conséquences néfastes du dérèglement climatique. 
Les modifications climatiques vont déplacer des aires écologiques favorables beaucoup trop rapidement au regard de la vitesse d’essaimage des plantes. La sécheresse et l’adoucissement des hivers seront les premiers facteurs négatifs pour les plantes, notamment en favorisant la prolifération des insectes ravageurs ou en augmentant la vulnérabilité de la végétation à une agression humaine (exemple : les incendies dans le sud de la France). Si l’effet de serre condamne les plantes, alors il en sera de même pour les animaux et les hommes qui vivent grâce aux plantes qui sont les seuls (avec les algues) à pouvoir réaliser la photosynthèse. D’autres catastrophes accompagnent l’effet de serre : la montée du niveau des mers (quelques centimètres par an et à terme plusieurs dizaines de mètres), l’accélération de la destruction de la couche d’ozone (vitale pour la vie terrestre), l’extension des zones de proliférations des micro-organismes pathogènes, et probablement dans un avenir proche des déplacements de population et des guerres… 
L’essentiel est aussi le caractère fondamentalement irréversible de ce phénomène lorsqu’il deviendra pour nous insupportable. Si aujourd’hui nous décidions de ramener la concentration atmosphérique de gaz carbonique au niveau préindustriel, il nous faudrait mille ans d’efforts de réduction très importante de nos émissions de gaz à effet de serre. L’effet de serre est vraiment le premier combat d’un écologiste convaincu. 
Il faut sortir de l’ère de la combustion des énergies fossiles. Pour cela nos marges de manoeuvre sont étroites, il faut diminuer franchement notre consommation globale d’énergie et développer tous les moyens de production d’électricité qui ne font pas appel aux énergies fossiles. On dispose alors de deux possibilités parfaitement complémentaires : les énergies renouvelables pour tout ce qui peut se stocker (l'eau, le froid, le chaud...) et l’énergie nucléaire pour nos villes ou nos zones industrielles.


Pourquoi devrions-nous avoir davantage besoin d'électricité dans l'avenir ?

La lutte contre les changements climatiques va nous imposer de nous passer de l'usage des énergies fossiles. Elles fournissent environ 80% de l'énergie consommée dans le monde. Le pétrole et le gaz sont de plus en plus privilégiés pour leur facilité d'emploi. Le charbon reste utilisé essentiellement pour produire de l'électricité dans les centrales thermiques. Une société vertueuse et durable est une société qui se passe totalement des énergies fossiles. Il faut alors se demander : Dans quels domaines ces énergies sont remplaçables par des énergies renouvelables ? La question du nucléaire pose la question de l'usage de l'électricité. Il me paraît évident que l'électricité est un progrès auquel l'homme ne renoncera pas.  

A quels aspects de notre vie moderne nous ne renoncerons pas ?

Des moyens de transports performants ? 
Le secteur des transports est extrêmement dépendant du pétrole pour une raison simple : nous n'avons jamais rien trouvé de mieux au niveau du rapport énergie/masse. Un avion et une voiture sont des moyens de transport où il est nécessaire de disposer du maximum d'énergie dans un faible volume et une masse réduite. Il faut 300 kg de batteries plomb/acide ou 2.22 kg de bois pour stocker l'équivalent de l kg de pétrole (1.3 litres en gros). Pour une voiture familiale avec un réservoir de 60 litres de pétrole je vous laisse calculer son poids en supposant qu'elle soit électrique et je vous laisse imaginer la fastidieuse manipulation du bois avant chaque départ en vacances si nous disposions de voitures capables d'utiliser le bois. La facilité d'usage et la puissance disponible ont assuré la suprématie du pétrole sur toutes les autres énergies. 
Si nous décidons de maintenir des moyens de transports performants, sans recourir aux énergies fossiles, à quoi ressembleront-ils ? Pour les longues distances trans-océaniques nous aurons le choix entre le bateau (qui sera dépendant du vent ou/et du bois) et une hypothétique aviation brûlant de l'hydrogène (carburant que nous obtiendrons avec le passage d'un courant électrique dans de l'eau, l'électrolyse de l'eau). Pour les moyennes distances continentales ou régionales nous aurons les trains électriques (des TGV transcontinentaux). Les voitures électriques du fait de leur faible autonomie ne nous permettront pas de grands périples. Pour les courtes distances nous aurons le choix entre des transports collectifs électriques (métro et tramway) près des zones urbaines, des voitures électriques (air comprimé, hydrogène et batteries) dans les campagnes et le vélo ! La petite reine a encore de beaux jours devant elle. Pour le transport des marchandises, les camions seront remplacés par les trains électriques, les bateaux, les dirigeables solaires et la traction animale. Et pour les plus pressés d'entre vous il y aura l'internet haut débit ! Les visioconférences (électriques) ont certainement de l'avenir. Avec tout cela on comprend que des transports modernes et "vertueux" seront électriques et cette électricité devra émettre le minimum de gaz à effet de serre.   

Mais pour ceux qui veulent absolument boycotter le nucléaire dans les transports sans pour autant agir d'une façon négative sur le climat, il a la possibilité du vélo couché dont je suis un adepte depuis juin 2005. Finalement, ne suis-je pas un véritable anti-nucléaire ?

Une agriculture mécanisée ? 
L'agriculture moderne, productiviste, subventionnée par les gouvernements, est directement dépendante du pétrole. Il faut environ 8 litres de pétrole pour que vous ayez dans votre assiette 1 kilogramme de viande de Boeuf ! Incroyable !  Pas vraiment quand on sait qu'il faut 3 tonne d'équivalent pétrole pour produire 1 tonne d'engrais. Si on ajoute à cela le gasoil qu'il faut mettre dans le tracteur, l'énergie consommée par l'industrie chimique qui fournit les traitements phytosanitaires et l'énergie consommée par toutes les transformations agroalimentaires, on y arrive vite. Rendez-vous compte aussi qu'il faut 1 litre de pétrole pour faire pousser une salade de serre ! D'autre part l'agriculture productiviste est responsable aujourd'hui de l'essentiel de la pollution des eaux. Il est reconnu que plus de 70% de la pollution marine sont liés aux rejets agricoles. Les agriculteurs sont beaucoup plus coupables que TOTAL en matière de pollution des mers.
Si nous décidons de maintenir une agriculture performante, sans recourir aux énergies fossiles, à quoi ressemblera-elle ? Il faudra revenir à une agriculture traditionnelle avec davantage de paysans et donc davantage de parcelles. Avant 1950, un paysan français nourrissaient 4 personnes. Aujourd'hui un paysan est capable de nourrir 70 personnes ! L'usage des engrais pétrochimiques et la mécanisation sont les grands responsables de cette concentration de productivité agricole. En nous passant de la technique, les paysans seront contraints de réduire la surface de leur exploitation. Ils auront la possibilité de faire de la polyculture bio ou de l'agroforesterie. Les tracteurs brûlant du pétrole ne pourront pas être remplacés par des tracteurs électriques pour la raison évoqué pour les transports. Il faudra donc revenir à la traction animale ! Pour moi le retour des percherons dans nos campagnes ne fait aucun doute. Nous garderons probablement quelques machines brûlant du pétrole pour les travaux les plus pénibles comme le terrassement. Elles seront probablement les dernières machines exploitant le pétrole fossile ou biologique (colza). 
Les besoins en électricité des campagnes se limiteront aux besoins domestiques (confort de l'habitat et déplacement à bord de petites voitures électrique) et pour ceux-ci les énergies renouvelables suffiront.        

Une population essentiellement urbaine ? 
La campagne pourra donc disposer de bases énergétiques vertueuses mais le problème est que 80% de la population mondiale est urbaine ! Voilà une réalité qui changera difficilement au cours du prochain siècle. Même si nous amorçons un repeuplement des campagnes, beaucoup de terriens seront des citadins du fait de leur lieu d'habitation car je doute fort que nous auront le temps dans l'avenir proche de loger tous les candidats à l'exode urbain dans nos campagnes. Les villes d'aujourd'hui sont énergivores. Les besoins sont multiples : éclairage, industrie, électronique, climatisation, chauffage, transport collectif, transport des aliments et des marchandises, traitement des eaux, valorisation des déchets, loisirs... Autant d'activités déjà fortement consommatrices d'électricité et d'énergie fossile. Il faudra se passer du fossile et grâce aux économies d'énergie nous pourrons également réduire notre consommation d'électricité, mais des sites de production centralisé seront nécessaires pour assurer une production de base. Tant que nous aurons une population aussi urbaine, nous aurons besoin de faire appel à l'énergie nucléaire. 

Des matériaux de construction comme le béton ? 
Le ciment du béton est du calcaire chauffé à plus de 1500 degré. On brûle du fioul, du gaz, des pneus, des farines animales pour chauffer le calcaire. Toute l'opération émet énormément de gaz carbonique. Pourra-t-on se passer de béton ? Rien n'est moins évident quand on regarde les constructions qui nous entourent. Pourrait-on produire du béton en chauffant le calcaire avec de l'électricité ? Je ne sais pas mais un lecteur pourrait m'envoyer quelques informations à ce sujet.

Les matières plastiques ?  
Saurons-nous nous passer de matières plastiques ? Quand je regarde autour de moi les services que nous rendent ces matières issues du pétrole, j'ai du mal à imaginer qu'on pourra s'en passer.
Il est vrai aussi qu'il est possible de produire des matières plastiques à partir de végétaux. Mais ces matières offrent une moindre résistance aux diverses contraintes qui peuvent peser sur elles. Le plastique issu de l'industrie pétrochimique semble difficile à remplacer.
Ne doit-on pas alors réserver le pétrole qui nous reste pour les matières plastiques ? Si tel est le choix que nous formulons, alors arrêtons de brûler ce qui nous reste de pétrole ! 

Une armée motorisée ? et disposant d'un arsenal bactériologique, chimique et nucléaire ?   
L'armée est un gros consommateur d'énergie. Il faut se poser la question de l'utilité de dépenser de l'énergie dans l'armée en temps de paix. A quoi pourrait bien ressembler une guerre dans le futur ?  Nos armées sont-elles adaptées à une rupture du flux de pétrole qui alimente les chars, les avions et la plupart des bâtiments de surface ? Dans la réalité d'un conflit total, les armées de tous les pays du monde devront faire face à des colonnes de millions de réfugiés qui compliqueront considérablement leur action au combat. En cas de rupture de l'approvisionnement en pétrole toutes les armées du monde deviennent d'un coup inopérantes. Les avions bombardiers sont cloués au sol, les chars et les véhicules motorisés n'avancent plus. Bref nous revenons à une guerre de fantassin où même l'énergie alimentaire disponible pour combattre manquera à tous. 
Dans une société vertueuse, aurons-nous besoin de faire la guerre ?

Pour éviter la guerre il ne faut pas attirer les convoitises. Tous les peuples qui ont souhaité l'hégémonie ont mal fini.
Je vous laisse méditer sur cette petite pensée...


A quelles conditions suis-je d'accord pour dire oui au nucléaire ?

Le nucléaire fait donc partie de la future donne énergétique, mais nous ne l’accepterons tous que si certaines conditions notamment de sûreté et de projet de société sont bien respectées. Il faut analyser pragmatiquement le problème sans pour autant signer un chèque en blanc aux ingénieurs du nucléaire qui ont, il est vrai, bafoué le débat démocratique lors de la nucléarisation de la France. Je dis bafoué car il n'y a jamais eu d'efforts de faits pour que chaque citoyen puisse comprendre les enjeux et décider en connaissance de causes quel devait être la politique énergétique de notre pays. Cependant, ce débat n'a eu lieu nul part dans le monde et il aurait été étonnant que la France déroge à la règle.

La première condition nécessaire à mon acceptation du nucléaire est la préférence du renouvelable. L’énergie nucléaire ne se justifie que dans des zones hyper consommatrices d’électricité, comme des sites industriels et des grandes villes. Les centrales doivent être dispersées avec parcimonie sur tout le territoire de manière à alimenter les grandes villes et les voies ferroviaires. Avant d’installer une centrale, on doit toujours se poser la question des économies d’énergie et de la possibilité offerte par les énergies renouvelables. Les centrales nucléaires doivent être des auxiliaires des énergies renouvelables et des économies d’énergie. Ces deux concepts doivent toujours être épuisés avant d’envisager la construction d’une nouvelle centrale. Ainsi la France pourrait disposer d'une vingtaine de réacteurs très surveillés et de plus petite taille que ceux que nous connaissons aujourd'hui.
Contrairement à de nombreux écologistes, je considère que la priorité des priorités est de sortir de l'ère des combustibles fossiles. Pour en sortir, il faut économiser l'énergie, développer les énergies renouvelables et utiliser l'énergie nucléaire pour réaliser la transition vers une société 100% renouvelable.

Sortir en priorité du nucléaire est une hérésie car cela implique forcément un usage des énergies fossiles, ne serait-ce que pour produire les capteurs d'énergie renouvelable, et aussi parce que l'usage des énergies fossiles est la caractéristique majeure de notre société. La révolution énergétique ne se fera que quand la société décidera de se passer en priorité des énergies fossiles car c'est ce qui est le plus difficile. Se passer du nucléaire est beaucoup plus facile car c'est une énergie particulièrement difficile à maîtriser et relativement récente dans l'histoire de l'utilisation de l'énergie par l'homme. L'usage du nucléaire n'est pas aussi enraciné dans notre culture que l'usage des énergies fossiles (le nucléaire représente 3% de la consommation totale d'énergie primaire), et il serait beaucoup plus facile politiquement de s'en passer prioritairement. Mais ensuite il sera très difficile de réduire nos émissions de gaz à effet de serre car les mentalités actuelles sont exclusivement habituées à consommer les énergies fossiles dont l'usage est facilité par tout un réseau de distribution parfaitement rodé. Si on dit aux gens qu'on arrête l'utilisation des énergies fossiles, ils vont être obligés de repenser toute leur manière de consommer l'énergie aussi bien dans le domaine des transports, que dans le domaine de l'habitat ou de l'alimentation. Si on se passe du nucléaire, il y aura moins d'impact sur la mentalité des gens. Ils devront à peine se remettre en question car les centrales nucléaires seront rapidement remplacées par des centrales thermiques dites "propres" qui brûlent charbon et gaz. Elles seront probablement associées à des énergies renouvelables, mais nous seront toujours aussi dépendants des énergies fossiles et nous émettrons toujours autant de gaz à effet de serre. Voici donc une bonne raison pour préférer la sortie des énergies fossiles à la sortie du nucléaire.   

La seconde condition permettant mon acceptation du nucléaire est la sûreté des installations associées à une transparence totale vis-à-vis du public. Tchernobyl ne se reproduira pas car aujourd’hui tous les techniciens du nucléaire (de tous les pays) ont remplacé la logique de production par la logique de sûreté. La conception même des réacteurs les rend plus stables et en Russie les électriciens ont compris les erreurs à ne pas répéter pour revivre le drame de Tchernobyl. Pour continuer dans la logique de sûreté, je souhaiterai qu’une part importante du budget communication du lobby nucléaire aille aux associations écologistes pour qu’elles puissent participer aux mesures des rejets ou du vieillissement des centrales. Ainsi la mise en place d’un contre pouvoir permettra d’assurer encore mieux la logique de sûreté. Actuellement mes seuls vrais doutes sont le vieillissement des matériaux liés à la radioactivité. La communication sur ce sujet est très faible et c’est pour moi une grosse préoccupation. Il faut rester pragmatique, des matériaux usés se changent. La logique de profit qui dépasse certainement la logique de sûreté me laisse penser que les techniciens d’EDF sont jusqu’au-boutistes avec la structure de leurs centrales. Ce n’est pas prudent et c’est pourquoi j’attire l’attention du lobby nucléaire en disant Oui, mais…


La centrale nucléaire Super Phénix (1200 mégawatts) à Creys Malville est aujourd'hui en cours de démantèlement.

Elle a produit de l'électricité d'une manière intermittente de 1986 à 1997. Au cours de ces onze années de fonctionnement, ce prototype a connu deux problèmes techniques majeurs (configuration du chargement et problème d'acier) qui ont nécessité au début deux ans d'arrêt pour prendre les mesures qui s'imposaient. Sa mise en service effective a donc eu lieu en 1988. Sur les neuf années qui restaient, la centrale n'a pas produit d'électricité pendant 4 ans et demi, pour des raisons de procédures administratives. Pourtant lors de sa dernière année de fonctionnement, en 1997, Super Phénix a démontré un taux de disponibilité aussi bon voire meilleur que les autres réacteurs d'EDF. Le gouvernement de Jospin a donc torpillé un réacteur qui validait le principe de la surgénération dont nous aurions tant besoin aujourd'hui..

La troisième condition agréant le nucléaire est le choix du combustible, et là je dois dire que j’en veux énormément aux Verts du Gouvernement Jospin qui ont permis l’arrêt de Super Phénix. Peu de gens savent réellement ce qu’était Super Phénix et il me semble important d'expliquer le fonctionnement théorique de ce réacteur. 
Les réacteurs actuels produisent de l’énergie à partir de la fission de l’uranium 235. Ce combustible fissible est rare (0.7% du minerais d'uranium) et nous laisse 40 à 70 ans de production d’énergie, c'est-à-dire autant que les combustibles fossiles comme le pétrole et le gaz. Le rendement est faible car il faut enrichir le minerais, et cette opération consomme beaucoup d'électricité. En France plusieurs réacteurs sont entièrement dévoués à la production du combustible. La fission de l’uranium génère du plutonium, déchet radioactif qui n'existe pas à l'état naturel dans la croûte terrestre et permettant entre autre de fabriquer des bombes atomiques. Super Phénix était un réacteur d’une nouvelle génération dont le développement s'est accéléré dans les années 70 par le fait qu'on voyait poindre l'épuisement des mines d'uranium. Il consommait du plutonium et de l’uranium 238. Cet isotope de l'uranium constitue 99.3% du minerais d'uranium à l’état naturel. La consommation de ce combustible nous laisse donc entrevoir plusieurs centaines de siècle d'une énergie abondante et avec une faible production de déchets. Le principe de ce réacteur est simple, on entasse sur du plutonium une coiffe d’uranium 238. Le plutonium irradie l’uranium qui se trouve à la périphérie et celui-ci se transforme à son tour en plutonium alimentant ainsi la réaction. Le réacteur finit par fondre de l’intérieur en libérant de l’énergie. Il ne reste à la fin qu’une petite quantité de plutonium qu’on couvre à nouveau d’uranium 238. 
Ce réacteur est donc exceptionnel, il "brûle" les déchets de nos actuelles centrales et les ogives nucléaires, tout en utilisant un combustible quasi inépuisable au regard de la civilisation humaine. Les Verts nous ont donc fermé la possibilité de nous débarrasser d'un de nos déchets les plus dangereux, le plutonium 239, et qui par ailleurs représentent leur principal argument pour démonter le nucléaire. Il n'y a qu'à voir aujourd'hui le scandale que représente pour eux les convois de "castors", ces caissons renfermant les déchets radioactifs à destination de l'usine de la Hague. Les Verts de ce gouvernement n’ont pour moi plus rien à voir avec des écologistes, ce sont des imposteurs. Ils arrivent au pouvoir avec la fameuse gauche plurielle en disant « on va vous débarrasser de cette énergie sale qui génère des déchets radioactifs » et en parallèle on arrête le développement du premier incinérateur de déchets, et au passage on occulte le grave problème qu'est l'effet de serre.

Les anti-nucléaires n'ont pas arrêté de critiquer le coût de Super Phénix. Vous pourrez retrouver chez eux (les Verts, Corinne Lepage, Green Peace...) le chiffre de 60 milliards de Francs, qui provient d'un rapport de la cours des compte. Ce chiffre est à détailler et il faut bien comprendre que si Super Phénix n'avait pas été arrêté pendant quatre ans et demi pour des causes administratives et politiques, son coût aurait été considérablement abaissé grâce à la vente d'électricité issu de sa production. Selon la SFEN, qui représente le lobby des ingénieurs du nucléaire en France, les coûts de construction de Super Phénix sont restés inférieurs à 30 milliards de Francs (26 pour la construction proprement dite et 2 milliards pour les deux charges en combustibles qui ont été utilisées). A cela il faut ajouter les coût de fonctionnement, grosso modo un milliard par an, qui ont été calculés entre 1986 et 2000 (alors que Super Phénix a été arrêté en 1997), ce qui fait 15 milliards, puis les coût de démantèlement se chiffrant à quelques milliards de Francs. On arriverait donc à un chiffre plus proche de 50 milliards de Francs que de 60. 

La Cour des comptes a évalué en octobre 1996, que « Le coût de la centrale, au 31 décembre 1994 s'établit à 34,4 milliards de francs 1994 ». « Les dépenses futures, calculées sur la base des charges constatées en 1995, peuvent, sauf incident technique important, être évaluées avec un degré de probabilité élevé à 7 milliards de francs, jusqu'au 31 décembre 2000 ». (...) « Les produits seraient selon le taux de disponibilité de 5 ,3, 7 ou 9 milliards de francs ».

Les produits correspondent à l'argent généré par la vente de l'électricité produit par la centrale. L'arrêt de Super Phénix le 19 juin 1997 a permis de gaspiller 3 à 9 milliards de francs. Bilan, au lieu de coûter 35 milliards, Super Phénix coûtera finalement un peu moins de 50 milliards en vingt ans. La moitié de ce coût est supportée par la France, l'autre moitié par EDF et d'autres entreprises européennes. Quel gaspillage d'argent et de matière grise Monsieur Jospin !

Par ailleurs les détracteurs de Super Phénix ont répété sans cesse qu’il ne fonctionnait pas, qu’il avait de graves problèmes techniques. Or ce réacteur était un prototype auquel on doit toujours d’importants réglages et pendant les neuf derniers mois de sa courte existence (54 mois de fonctionnement au total dont 30 à pleine puissance), il a mieux fonctionné que tous les autres réacteurs d’EDF. Le problème principal auquel ont été confrontés les ingénieurs a été de maîtriser le sodium fondu qui permet d'extraire la chaleur produite par la réaction nucléaire. On ne peut pas utiliser de l'eau comme dans les réacteurs actuels car l'eau ralentit les neutrons, or pour que la réaction de surgénération se passe, il faut que les neutrons aient la plus grande vélocité. C'est pourquoi on a utilisé du sodium fondu. Ce sodium présente des risques importants, il explose au contact de l'eau et brûle spontanément au contact de l'air. L'étanchéité du circuit primaire est donc essentielle, en particulier lors des vidanges des cuves. On utilise de l'argon pour remplir les vides. Il faut savoir cependant qu'un feu de sodium s'arrête dès l'instant qu'on l'étouffe, il s'agit d'un feu lent, peu violent, qui couve et qui n'a pas une grande capacité de propagation dans une canalisation fermée puisqu'il faut de l'oxygène. Des réserves de poudre mescaline avaient été mises en place pour écarter ce risque, cette poudre ayant la capacité d'étouffer un feu de sodium. Le risque d'inflammabilité reste le point le plus critique de ce réacteur et je juge acceptables les précautions qui ont été prises pour le contrer.

Le sodium a par ailleurs de nombreux avantages sur d'autres caloporteurs : 

D'arrêt en arrêt, de report en report le lobby antinucléaire a, par une manipulation exemplaire de l'opinion, réussi le tour de force d'interdire la production d'électricité pendant les trois quarts de la durée d'existence de la centrale.

Super Phénix est un surgénérateur, son fonctionnement représente une avancée considérable dans le domaine de la production d’énergie non émettrice de gaz carbonique. Sa sûreté pouvait être améliorée, en renforçant les précautions de surveillance d'une éventuelle rupture du confinement du sodium sous argon. On pouvait notamment ajouter un spectromètre de masse pour mesurer directement la qualité de l'argon. Cet appareil existe sur Phénix et en l'absence de fuite sur ce petit réacteur il n'a pas été installé sur son grand frère. On pouvait aussi essayer de remplacer le sodium par du gaz (de l'hélium, ou du gaz carbonique) porté à très haute température (900°C), mais il se pose alors des problèmes de soufflantes qui résistent mal à des températures si élevées. Des recherches internationales sont toujours en cours pour trouver le meilleur compromis entre sécurité et efficacité de la réaction. Super Phénix renaîtra un jour de ses cendres sous forme d’un réacteur de quatrième génération (celle d’après l’EPR) dont le cahier des charges demande à ce que le réacteur soit « non proliférant », c’est-à-dire qu’il sera impossible de faire des bombes à partir du combustible usé, ce qui était possible avec le prototype Super Phénix, puisque celui-ci pouvait produire davantage de plutonium qu'il n'en consommait dans certaines conditions. Ces nouveaux surgénérateurs devraient en particulier utiliser le thorium 232, quatre fois plus abondant que l’Uranium 238, pour produire de l’Uranium 233, fissible. Ainsi nous pourrions exporter ce réacteur dans les pays en voie de développement pour qu’ils arrêtent de brûler du charbon ou du gaz pour produire de l’électricité. Les émissions de gaz à effet de serre sont un problème planétaire, se contenter de faire le ménage chez soi n’est pas suffisant pour se sortir de l’impasse climatique, il faut aider ses voisins à diminuer leurs émissions. Vu sous cet angle le nucléaire m'apparaît comme un remède efficace pour l'humanité victime de son histoire.

L’effet de serre avec ses graves conséquences a été vécu par les écologistes de la première heure comme une imposture du lobby nucléaire qui y voyait une justification de l’existence des centrales. Nous devons passé le cap de l’imposture d’un quelconque lobby. Nombreux sont les scientifiques qui ont un discours alarmiste sur les conséquences de l’effet de serre. Encore plus grave pourrait être les conséquences de la déplétion des réserves de combustibles fossiles. Il est grand temps de se ressaisir pour utiliser la technologie disponible nous permettant de nous extraire de la civilisation de la combustion des énergies fossiles. Les énergies renouvelables et le nucléaire seront le compromis d’avenir dans une civilisation devenue très sobre.

Nier cette évidence relève davantage de l’imposture ou du dogmatisme politique que du pragmatisme ou de la rigueur scientifique dont nous avons tant besoin. Malheureusement il est très difficile d'être prophète dans son pays et dans son époque. Si j'espère faire partie d'une majorité de la population nucléo-tolérante, je pense malheureusement faire partie d'une minorité, qui ont bien compris que l'essentiel, pour nous sortir de l'impasse vers laquelle nous allons, est bien de sortir de la combustion des énergies fossiles


Doit-on pour autant consacrer de l'argent à l'EPR, le réacteur européen à eau pressurisée ?

Je pense que la volonté du gouvernement de lancer la construction de ce réacteur est une erreur car le combustible utilisé par ce type de centrale, l'uranium 235, est amené à l'épuisement dans les prochains 40 ans. L'EPR est un réacteur qui présente peu de grandes avancées sur ses prédécesseurs. Il est plus gros, ce qui lui permettrait de consommer 15% de combustible en moins et donc autant de déchets radioactifs en moins. Il est en outre plus sûr de part sa conception et parce qu'il dispose d'une double enveloppe de 1.3 mètre de béton. La seule chose à laquelle il ne résisterait pas, ce serait le crash d'un avion de ligne en supposant que les réacteurs, qui sont les parties les plus dures de l'avion, atteignent le coeur du réacteur. Mais vous connaissez peut être ce que je pense de l'avenir de l'aviation. Elle n'en a plus pour longtemps et les rares avions qui pourront bientôt encore voler ne dépasseront pas la taille des avions d'affaire. Ce qui rendra d'autant plus improbable un attentat kamikaze efficace. D'autres attentats bien plus sérieux sont davantage à craindre du côté des vraies armes atomiques aujourd'hui aux mains des Pakistanais et demain aux mains des Iraniens. Il est donc extrêmement improbable qu'un EPR provoque un drame similaire à celui de Tchernobyl. Mais sur le fond il consomme le même combustible que les centrales actuelles et produit les mêmes déchets. Il serait beaucoup plus judicieux de développer enfin les surgénérateurs capables d'utiliser un combustible beaucoup plus abondant que l'uranium 235 et sans déchets. En les développant on éviterait une fuite des cerveaux et une perte de compétences des équipes de chercheurs et d'ingénieurs, ce qui est un des arguments souvent avancés pour défendre l'EPR.

Les progrès de l'EPR sont donc essentiellement dus à des économies d'échelle parce que la réacteur est plus gros. Selon moi, c'est un inconvénient car cela oblige le pays qui veut se doter d'un tel outil à prévoir d'autres grosses cocottes minutes (nucléaire ou thermique) pour produire de l'électricité lors de l'arrêt du réacteur pour des raisons de maintenance, ou aussi pour des raisons d'urgence. Cette mégalomanie industrielle n'incite pas aux économies d'énergie et peut pousser ceux qui ont la charge du réacteur à une prise de risque accrue et cela je le regrette. Je pense que le nucléaire devrait être synonyme de petites usines, facilement remplaçables en cas de problème. De même qu'en découvrant un problème sur un réacteur, on peut facilement le résoudre sur tous les autres du même type. Cette stratégie a suffisamment montré qu'elle marchait bien dans notre pays. Pourquoi alors s'en écarter ?

Par ailleurs, si Areva avait autant investi dans les énergies renouvelables qu'elle a investi dans le développement de l'EPR, nous aurions moins pris de retards dans ce domaine, qui au risque de me répéter, malgré ma nucléo-tolérance est le domaine prioritaire. Le nucléaire ne doit être qu'un moyen pour nous passer plus rapidement des énergies fossiles, il ne doit certainement pas remplacer les efforts à entreprendre dans le domaine du renouvelable.

En l'état actuel des choses, je suis cependant favorable à l'EPR destiné à l'exportation. De nombreux pays développés brûlent encore du charbon et du gaz pour produire de l'électricité. Nombreux sont ces pays, Danemark et Allemagne par exemple, qui se donnent bonne conscience en raccordant à leur réseau des éoliennes et des panneaux solaires. Ils ne pourront espérer dans le meilleur des cas qu'une réduction de l'ordre de 25% des émissions de gaz à effet de serre liées à la production d'électricité. Remplacer ces centrales thermiques par des EPR permettrait une réduction de l'ordre de 98% des émissions. Il n'y a donc pas photo, le nucléaire est une bien meilleure solution pour limiter les émissions de CO2 que les énergies renouvelables associées aux énergies fossiles. S'il faut construire un prototype EPR sur notre sol dans le but de le vendre à l'exportation, pourquoi pas ? mais je préférai les surgénérateurs.

Enfin, il est possible que la fusion tienne ses promesses et permette de sortir l'humanité du piège qui se referme sur elle. Mais je pense qu'il ne faut pas trop compter sur cette technologie qui nous suggère que la science nous sortira de tous nos mauvais chemins. Nous devons nous remettre en question de l'intérieur et pour cela la science nous sera d'aucune utilité.


Que penser de la fusion nucléaire et du projet ITER ?

ITER signifie International Thermonuclear Experimental Reactor. ITER est un projet d'un réacteur thermonucléaire résultant d'une coopération internationale. 
Pour exploiter l'énergie nucléaire, qui est l'énergie contenue dans les noyaux des atomes, nous avons deux possibilités : 
- La fission est le fait de casser des atomes lourds avec des neutrons. C'est le principe de base de nos centrales nucléaires actuelles et des surgénérateurs de l'avenir. 
- La fusion est le fait d'unir deux atomes très légers que l'on force à s'assembler pour donner un atome un peu plus lourd. Dans la pratique on fusionne deux atomes d'hydrogène (deutérium et tritium) pour former de l'hélium. 

Deutérium(1 proton et 1 neutron) + Tritium(1 proton et 2 neutrons) => Hélium(2 protons et 2 neutrons) + 1 neutron + 17Mev

La réaction de fusion nécessite des conditions de température et de pression extraordinaires auxquelles aucun matériau connu ne résiste. Les ingénieurs font donc flotter la réaction à l'aide d'un puissant champ magnétique. La principale difficulté est de confiner la réaction.
Aujourd'hui on sait reproduire un début de réaction pendant seulement quelques secondes dans un réacteur expérimental en Angleterre. ITER vise a maintenir la réaction pendant 400 secondes de manière à étudier la stabilité du plasma. Sa construction devrait prendre 10 ans et coûter 4.7 milliards d'euros. 
La stabilité du plasma n'est cependant pas le plus gros problème à résoudre. L'essentiel est probablement de tester la tenue des matériaux de couverture aux neutrons extrêmement énergétiques produits dans une réaction de fusion. Ces tests seront effectués avec un outil appelé IFMIF (International Fusion Materials Irradiations Facility) qui sera construit au Japon et qui coûtera 10 fois moins cher qu'ITER. C'est cet outil qui permettra réellement de savoir si nous pourrons un jour construire un réacteur commercial. La question se pose de savoir pourquoi nous avons commencé par ITER alors qu'IFMIF semble beaucoup plus essentiel ?
Si dans 30 à 60 ans ITER nous permet de développer des réacteurs commerciaux, on pourrait théoriquement tirer d'un litre d'eau de mer l'équivalent énergétique de 300 litres de pétrole. Il suffirait d'extraire un isotope particulier de l'hydrogène : le deutérium . 

La réaction nécessite également du tritium et il n'y en a presque pas dans la nature (moins de 20 kg), juste un peu créé par les rayons cosmiques. Il se désintègre par perte du neutron avec une période de 13.5 années. Le neutron s'échappe sous la forme d'un proton, d'un électron et d'un neutrino (désintégration "bêta"). On est donc obligé de fabriquer le tritium. Celui-ci est issu d'une transmutation du lithium (3protons+3neutrons) selon la réaction suivante : lithium + neutron ----> tritium + hélium.  Un réacteur à fusion de 1 GW nécessiterait 50 kg de tritium. La production de tritium à partir du lithium se ferait à partir d'un réacteur DEMO qu'il faudra également construire pour valider un réacteur à fusion commercial.
Le lithium nécessaire à la création du tritium est un métal très léger est relativement abondant sur Terre (réserves facilement exploitables : 20 millions de tonnes). 

Dans les réacteurs à fission actuels, on perd des neutrons (qui peuvent être utilisés pour transmuté de lithium). Les ingénieurs d'ITER comptent récupérer le neutron issu de la réaction de fusion, en tapissant la chambre du réacteur de lithium, qui absorbera les neutrons pour redonner du Tritium qui sera ensuite réinjecté dans le réacteur...

Salar d'Uyuni : plus grand lac salé du monde (3653 m d'altitude, 10000 km2 , deux fois la superficie du Grand Lac Salé des États Unis) et plus grande réserve de lithium connue du monde (cet élément est piégé dans les saumures interstitielles sous-jacentes à la croûte superficielle dont l 'épaisseur moyenne est de l'ordre du mètre).

La division Lithium de FMC, installée à Gastonia, Caroline du Nord, USA, est le principal producteur mondial de lithium et de produits dérivés. Le lithium est utilisé dans le monde entier dans les graisses spéciales, les produits en céramique et en verre, dans l'industrie pharmaceutique, l'aluminium, le caoutchouc, le plastique, les batteries, les alliages légers, les systèmes de conditionnement d'air et les puces électroniques. La compagnie produit actuellement son lithium au départ de spodumène, un minerai qu'elle extrait en Caroline du Nord. Les dépôts de saumure seront une nouvelle source de lithium pour elle.
Localisé dans les saumures du Salar d'Uyuni, près de Potosi dans le sud de la Bolivie, le gisement est considéré par les experts comme la plus grande réserve mondiale de lithium avec un contenu approximatif de 8,9 millions de tonnes de métal. La production de lithium demande la production importante de chaux.
(Informations tirées de  http://www.autreterre.be/projets/bolivie/le_lithium.htm )



saumures du Salar d'Uyuni

Le lithium pourrait être le facteur limitant des réacteurs à fusion car nous assistons aujourd'hui au développement des piles au lithium et à hydrogène, en particulier en Chine où on produit déjà des batteries compétitives. Il faut 2 à 4 Kg de Lithium dans une voiture électrique. Cela n'est pas trop mis en avant par les promoteurs d'ITER mais ne devrait pas poser de problèmes majeurs si la fusion tient réellement ses promesses. ITER est donc un projet très cher, qui pourrait nous permettre de disposer d'une énergie propre et abondante dans un futur incertain. Cependant je pense que nous ferions mieux de dépenser tout cet argent dans le développement des énergies renouvelables et les surgénérateurs nucléaires. Le réchauffement climatique et les mesures qui s'imposent à nous maintenant ne nous permettent pas d'attendre l'avènement de cette source d'énergie utopique.


Les déchets nucléaires seront-ils ingérables pour les générations futures ?

Il est parfaitement exact que les déchets nucléaires seront actifs pendant des centaines de milliers d'années. Cependant cette activité décroît au cours du temps, de telle sorte qu'ils ne sont pas dangereux au même niveau pendant toute cette durée. L'essentiel de la dangerosité concerne les 1000 premières années. Au bout de 1000 ans, les déchets ne sont pas beaucoup plus radioactifs que l'uranium initialement mis dans le réacteur.
Parmi ces déchets, le plutonium est le responsable essentiel de la caractéristique "longue durée de vie". Ce plutonium peut servir de combustible dans les surgénérateurs (dont Phénix et Superphénix sont des prototypes). D'où ma position favorable aux surgénérateurs, que j'ai décrit plus haut.
Les déchets nucléaires sont à comparer aux déchets industriels spéciaux, comme les polluants organiques persistants ou les pesticides de synthèse, qui présentent des toxicité aiguë proche de celle des déchets nucléaires.
En France, nous confinons chaque année 200 tonnes de déchets nucléaires et nous dispersons 100 000 tonnes de pesticides qui nous permettent de manger de la viande rouge toute l'année car cette production de masse rend nécessaire l'agriculture intensive. Ne devrions-nous pas nous passer d'abord de viande rouge abondante avant de nous passer d'électricité d'origine nucléaire ?
Enfin les déchets nucléaires ne peuvent en aucun cas exploser ou se déplacer très loin en cas de fuite ou de problème quelconque. Une rupture de confinement pose un problème uniquement local, dont l'ampleur n'aurait rien à voir avec celle d'un accident industriel majeur (comme la catastrophe de Bhopal en Inde). 
Pour finir, posons nous une question simple : à choisir, ne vaut-il pas mieux échanger un problème qui dure sur 1000 ans, mais que nous sommes capables de transmettre à nos héritiers immédiats dans des conditions acceptables, contre un morceau d'un problème majeur qu'est le changement climatique, dont les effets catastrophiques peuvent survenir en moins d'un siècle, subsister pendant des milliers d'années, et que nous ne savons pas, aujourd'hui, transmettre dans des conditions acceptables à nos enfants ?

L'essentiel de ce paragraphe est tiré du site de Jean-Marc Jancovici http://www.manicore.com  page intitulée "objections fréquentes au nucléaire civil"

Les déchets des centrales actuelles (REP) contiennent 96% d'uranium "non brûlé", 1% de Plutonium (combustible fissible hautement énergétique) et 3% d'un cocktail de substances radioactives qui sont actuellement vitrifiés et stockés à la Hague. 
Les déchets non retraités ont effectivement une radioactivité qui va durer plus de 100 000 ans. Mais si on enlève le Plutonium, la durée de radioactivité des déchets tombe à 10 000 ans. Et de même si on enlève quelques radio éléments (l'Américunium, le Neptunium et un autre), la durée de radioactivité des déchets se limite à un millénaire. C'est très long mais les déchets nucléaires deviennent alors des déchets presque citoyens comparativement au CO2 des centrales thermiques qui bouleverse le climat sur des échelles de temps de l'ordre du million d'années. 
Pour ne pas contredire le paragraphe précédent, je tiens à vous faire part de mon sentiment autour du flou artistique qui règne autour de la notion de radioactif. Quand on dit qu'une substance est radioactive, cela ne veut pas forcément dire qu'elle est dangereuse. La radioactivité nous entoure et ne nous affecte pas. Il faut évaluer le type de rayonnement et la dose reçue pour évaluer la dangerosité d'un élément radioactif. La comparaison entre l'uranium présent dans les mines à l'état naturel et les déchets est à mon avis le bon cadre pour discuter du danger des déchets sur le long terme. Cela ne veut strictement rien dire qu'un déchet est radioactif pendant des milliers d'années. 

Concernant les déchets, le nucléaire a l'avantage du facteur 1 million. Avec 1 gramme d'uranium on peut produire autant d'énergie qu'avec 1 tonne de pétrole. Il y a donc un facteur 1 million entre uranium et pétrole. On peut donc en déduire qu'on répète ce facteur un million avec les déchets. Que choisit-on ? Un gramme de déchet radioactif confiné ou une tonne de gaz à effet de serre que l'on disperse dans l'atmosphère ?

Les militants anti-nucléaires mettent en doute le confinement des déchets radioactifs sur des échelles de temps très longues. C'est oublié qu'il existe dans la nature les restes de réactions nucléaires naturelles avec comme dans nos réacteurs tout un cocktail de substances très radioactives. On a retrouvé un de ces réacteurs naturels à Oklo en Inde. La réaction en chaîne a pu démarrer car des éléments fissibles s'étaient concentrés tout à fait naturellement à un endroit donné. Cette réaction a eu lieu il y a deux milliards d'années (Un Tchernobyl préhistorique...) et aujourd'hui les restes de la réaction n'ont pas migré à plus de 3 mètres du coeur du réacteur. Si des déchets radioactifs issus de la nature n'ont pas bougé de plus de quelques mètres pendant deux milliards d'années, pourquoi s'inquiéterait-on d'une éventuelle dispersion de nos déchets actuelles pourtant retraités et soigneusement confinés au cours des prochains millénaires ? Selon moi, cette question n'a aucun sens ! D'autant plus qu'on a suffisamment à faire par ailleurs avec le réchauffement de la planète.


Enfin doit-on se passer du nucléaire civil parce qu'il permet le nucléaire militaire ?

C'est souvent l'argument le plus mis en avant par les anti-nucléaires. Pourtant il faut bien comprendre qu'à l'échelle planétaire les pays qui pourraient être le plus intéressés par le remplacement des centrales thermiques par des centrales nucléaires sont déjà des pays possédant ou disposant des technologies pour construire l'arme atomique. La Chine, la Russie et les USA sont par exemple des pays qui pourraient construire des centrales nucléaires sans pour autant augmenter le danger de la prolifération nucléaire puisque ces deux pays disposent déjà de l'arme nucléaire. Des pays industrialisés comme l'Allemagne, l'Italie, L'Espagne, le Japon, l'Afrique du Sud ou même le Brésil disposent déjà de quelques centrales nucléaires civiles et tous ces pays auraient la capacité industrielle de développer des armes atomiques en quelques mois. Ils y renoncent pour des raisons politiques et pacifiques mais je ne pense pas qu'il faille les considérer comme des puissances non nucléaires. Tout le monde sait aujourd'hui comment on peut fabriquer une arme atomique. L'abandon du nucléaire civil ne changerait en rien notre capacité à recourir à cette arme si nous étions dans l'avenir plus belliqueux qu'aujourd'hui.

D'autre part l'arme qui tue le plus à la surface de la planète aujourd'hui est la machette. 1 million de mort au Rwanda, des milliers de mutilés au Sierra Leone, la machette est une arme de destruction massive incomparablement plus efficace que l'arme atomique, notamment parce qu'elle tue dans le silence. Doit-on pour autant interdire tous les couteaux ? Bien sur que non ! Le problème ne vient jamais de l'outil, il vient toujours de l'esprit qui anime celui qu'il l'utilise.

Et pour finir, je tiens à affirmer mon désir de voir la France abandonner l'arme atomique. L'arme atomique ne nous protége pas et elle incite d'autres pays à en disposer. Elle nous coûte cher alors que la maison France est lourdement endettée. Il faut cesser ce gaspillage. 


Conclusion

Oui au nucléaire (du type surgénérateur) mais uniquement si celui-ci passe après le développement des énergies renouvelables et des économies d'énergie.
Le nucléaire est un mal nécessaire qu'il nous faudra apprivoiser pour sortir plus rapidement de l'ère des combustibles fossiles. Nous sommes trop menacés par le problème de la déplétion des réserves de combustibles fossiles et par le réchauffement climatique, pour nous acharner sur la seule énergie nucléaire. Un peu de nucléo-tolérance dépassionnerait bien des débats. Ne nous détournons pas des vrais problèmes posés aux générations futures.

La question de la sortie du nucléaire concernera l'humanité dans deux ou trois générations si nous parvenons à les mettre au monde. La question qui se pose à notre génération est comment nous allons sortir du fossile pour éviter le chaos économique et climatique. En nous détournant de cette question, beaucoup d'écologistes actuels se dispersent alors qu'ils devraient faire bloc non pas contre le nucléaire, mais plutôt contre la voiture, l'avion et l'électricité produite à partir de charbon et de gaz.

Eric Souffleux

 

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Dernière mise à jour : 28 février 2007
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