Nicolas Hulot, candidat écologiste exemplaire en 2007 ?

        Lettre ouverte à Monsieur Nicolas Hulot et à tous ceux qui comme moi espèrent que votre combat prendra la direction des urnes.

        A travers cette page publiée pour la première fois le 26 avril 2005, je vous formule des propositions et j'espère engager une discussion pour que votre combat, auquel j'adhère totalement, prenne un sens nouveau. Monsieur Nicolas Hulot, j'espère que vous répondrez à cet appel lancé sur la toile. Une foule de gens a envie de se battre à vos côtés et partage nos réflexions. Il leur manque juste un relais plus efficace et plus exemplaire dans le milieu politico-médiatique.

        Pourquoi ai-je choisi de vous atteindre avec une lettre ouverte ?
        J'ai choisi ce mode d'expression car le contenu de cette lettre n'est en réalité pas seulement destiné à une seule personne, en l'occurrence vous, mais bien à tous les citoyens conscients des grands périls écologiques qui nous menacent. Le but de cette lettre est bel et bien de faire réagir une grande partie de l'opinion sur l'urgence des mesures qui s'imposent, et de faire émerger en son sein la possibilité qu'un candidat écologiste transcendant les générations et les couches sociales puisse se présenter aux prochaines élections présidentielles, en votre personne.
        Ensuite, la lettre ouverte n'implique pas une réponse obligatoire de votre part. Il s'agit avant tout de mon opinion que j'exprime. Peut-être que beaucoup de gens se retrouveront dans ce que j'écris ? Peut-être alors qu'il vous semblera normal de répondre ? Ce que je souhaite évidemment !  

        Je profite de cette introduction pour demander aux lecteurs de cette page de m'envoyer le maximum de réactions sur celle-ci.  Je n'hésiterai pas à publier les textes les plus intéressants.

        Nicolas Hulot, vous êtes une des personnalités préférées des Français. Vous êtes selon moi le meilleur ambassadeur de l'écologie en France. La médiatisation de vos "coups de gueules" réguliers pour nous faire virer de bord n'est pas étrangère à cette popularité.

        A force de ronger mes freins et de ne pouvoir vous contacter directement, je me suis décidé à m'exprimer sur cette page. Vous tomberez forcément dessus un jour ou l'autre et j'espère vraiment que vous ne resterez pas indifférent à cette bouteille jetée à la mer. Cela fait longtemps que j'écris des réflexions suite à vos interventions dans les différents médias.

        Vous dites souvent que vous n'êtes pas né écologiste, vous l'êtes devenu par raison, ce qui rend sans doute vos convictions d'autant plus solides. Et vous reconnaissez que votre propre affinités avec les grands espaces et la nature ne fait pas de vous un écologiste. Vous l'avez dit dans une interview pour le monde du 18 février 2005* : "On peut d'ailleurs avoir une grande affection pour la nature (...) et être un prédateur. Sans m'en rendre compte, je l'ai probablement été quand j'avais 20 ou 25 ans, lorsque pour moi la nature était une sorte d'exutoire. Ma prise de conscience s'est donc faite progressivement, après plusieurs constats consécutifs à mes nombreux voyages."

        Voici ce que m'a inspiré cette réflexion : Nous sommes effectivement pour la plupart d'entre nous des écologistes de raison et je pense que nous vivons tous avec des contradictions contre lesquelles nous essayons chaque jour de lutter. Personnellement j'essaie de délivrer un message de sobriété pétrolière au quotidien en essayant d'être exemplaire dans mes comportements, à travers ce site et les nombreux articles que j'écris pour le Ouest France ou le Presse Océan. Il s'agit d'une bien modeste contribution au combat qui est le nôtre car du haut de mes 26 ans je n'ai certainement pas le même impact que vous, et à ce titre je vous respecte énormément. C'est d'ailleurs pour moi naturel de vous vouvoyez sur cette page et de prendre le maximum de précautions dans mes propos qui seront vous le verrez parfois un peu accusateurs. Ne m'en voulez pas à ce moment là, j'essaie juste d'amorcer en vous (et aussi en nous tous) une autre manière de mener votre combat pour lutter contre le fatalisme ambiant. 

        Mes contradictions sont évidentes : je sais démontrer par A + B que mon AX diesel ou mes motos sont écologiquement acceptables si je me contente de rouler avec sur 1500 km cumulé sur une année. Or malgré tous les efforts que je peux faire, j'ai jusqu'ici roulé entre 10 000 et 20 000 km par an pour mon travail, pour me former dans mon métier (prof de karaté) et pour maintenir mes relations familiales. Mes parents habitent à 180 km de chez moi et malheureusement pas près d'une gare SNCF. Mon combat pour diminuer ma consommation d'énergie fossile est quotidien, j'essaie tous les stratagèmes possibles (en roulant comme un escargot à 75 km/h maxi, en remplissant les voitures, en réalisant le maximum de distance en vélo...) mais je constate que pour être en accord avec mes idées il faudra tout simplement que ma vie (et aussi celle de ma compagne Eva qui est en train de devenir ébéniste) change du tout au tout. Je sais maintenant à quoi elle devra ressembler : un mi-temps dans l'agriculture biologique, un quart-temps dans la politique environnementale et un autre quart-temps dans le karaté. Tout cela sans voiture, sans chauffage fossile (en particulier dans les salles de sport), sans engrais chimiques, avec le minimum de machines thermiques (tronçonneuses, petit tractopelle...) et d'une façon générale en choisissant un mode de vie à contre courant de mes semblables. Je vois d'ici, les railleries des automobilistes confortablement installés dans leur voiture climatisée, scotchée avec la pastille verte (comme la plupart des 4x4 !) qui me verront me déplacer en vélo couché, comme je les vois aujourd'hui me lancer un regard d'énervement lorsqu'ils doublent cet escargot de la route que je suis devenu. Combien seront-ils à voir que mon culot est la seule forme de réponse que j'ai pu trouver à l'insolence de leur passivité vis-à-vis du drame qui se joue actuellement ?  

        Vos contradictions sont aussi évidentes et c'est là que mes propos deviennent un peu accusateurs. Comme vous dénoncez régulièrement l'hypocrisie des politiques que vous connaissez, on ne peut pas être pour la construction d'un troisième aéroport parisien et pour une préservation du climat. De même, je pense qu'il est difficile de condamner ouvertement l'aviation civile et la pollution liée aux transports dépendants du pétrole, et en même temps passer son temps à voyager de part et d'autre de la planète à bord de ces mêmes moyens de transport. J'ai bien conscience que sur tous les trajets en avion qui sont effectués dans le monde, seuls les vôtres et quelques autres ont un caractère éducatif vis-à-vis du drame de notre époque. C'est comme mon propre site internet, il n'est possible que parce qu'il existe une industrie de l'informatique extrêmement polluante en amont. On peut donc toujours me dire "Tu es contre le progrès, mais comment ferais-tu si tu n'avais pas l'ordinateur ?", ce à quoi je réponds maintenant que j'utilise ce progrès pour préserver notre nature et que cet usage du progrès (je parle de l'informatique) est minoritaire par rapport aux autres usages beaucoup plus pervers (la vente de voiture, de produits de consommation...). Je comprends donc que pour réaliser les émissions qui font votre renommée, vous soyez obligé d'utiliser l'avion pour vous rendre en Alaska ou dans l'Himalaya pour nous montrer que notre monde mérite d'être sauvé. Mais je trouve qu'il faut que vous alliez plus loin. 

        Quand je parle de votre combat autour de moi, on me rétorque toujours "Nicolas Hulot, cet écolo qui passe son temps dans les avions, c'est pas sérieux...etc". J'en ai marre qu'on dise cela de vous. Vos contradictions vous rendent de ce fait encore plus marginal (et bien sur je me dis la même chose pour moi). Il faut changer cela et ce que je vous propose pour toutes les prochaines émissions Ushuaia Nature, c'est que vous mettiez un point d'honneur à utiliser les moyens de transports les moins polluants : le train, le bateau à voile, les véhicules à traction animale et surtout les véhicules à propulsion humaine efficaces, pour vous rendre sur vos lieux de tournage. Je reconnais cependant que depuis quelques temps on vous voit davantage à pied, à dos de cheval, en ulm ou en bateau à propulsion humaine, mais on sent toujours la lourdeur de la logistique qui vous accompagne. Et d'une façon générale vous ne communiquez pas beaucoup sur votre exemplarité. Vos émissions invitent au voyage. Combien de retraités ou de gens aisés se décideront à prendre l'avion pour profiter eux-mêmes de visu des paysages splendides que vous nous montrez ? Ils seront probablement des millions. L'aspect éducatif et nécessaire de vos émissions cachent une réalité de prédateur dans notre société de consommation. En adoptant un comportement nouveau vis-à-vis de vos modes de déplacement dans vos prochaines émissions, même si vous aurez certainement donner l'envie du voyage à un grand nombre de gens, vous aurez au moins pu leur proposer des modes de déplacement alternatifs à l'avion ou au 4x4. Il y a un autre point avantageux à réaliser une telle proposition : les gens percevront réellement l'urgence de la situation. On entendra dans les chaumières "Vous avez vu Nicolas Hulot, il ne prend même plus l'avion, cela doit être vraiment grave, voilà un comportement exemplaire" et peut être "moi aussi il faut que je m'y mette au vélo couché..." . Pour terminer sur ce long paragraphe, n'y voyez pas que le ton du reproche, j'ai simplement essayer avec mes mots de vous expliquer ce que j'attends de vous comme leader de l'exemplarité.

        Au risque de me répéter je veux que vous compreniez bien mon message M. Hulot. Si vous nous montrez des endroits magnifiques dans vos émissions sans évoquer les alternatives à l'aviation vous aurez vous aussi une certaine responsabilité dans la croissance du trafic aérien. J'espère que vous nous montrerez le bonheur de voyager en prenant son temps et utilisant des modes de transport moins polluant que l'aviation ou la voiture. Finalement, je pense que vous devriez vous inspirer des reportages "Des trains pas comme les autres" qui ont la même valeur éducative que vos émissions, mais font en plus davantage la promotion des moyens de transport du futur, même s'ils ne le disent pas.

        Je rêve d'un Ushuaia Nature où vous partez dans les steppes d'Asie centrale à la rencontre de peuples nomades et vous empruntez le train au départ de Paris, quelques moyens de transports fluviaux, des vélos couchés pour les déplacements sur route et pour terminer à dos de poneys. Un tel voyage vous demanderait un mois, voire deux le temps de tout analyser. Avec un seul périple vous pourriez réaliser deux à cinq émissions. Vous évoqueriez davantage la nécessité de changer nos modes de déplacement. La vocation éducative de votre émission serait renforcer par l'intervention de davantage de scientifiques ou techniciens pour nous faire réellement prendre conscience que nous avons moins de 10 ans pour diviser par deux nos émissions de gaz à effet de serre à l'échelle de la planète. Ou encore que la voiture propre n'existe pas et que la Prius ou la pastille verte ne doivent pas dédouaner les automobilistes d'un effort pour apprendre à se passer de leurs voitures. 

        Une utopie ? Peut-être, mais je suis convaincu que vous avez les capacités pour qu'elle se réalise un jour.

        Dans cette interview du 18 février 2005, le journaliste vous dit "C'est un combat raisonné mais on sent tout de même, dans vos dernières interventions, que la colère couve en vous." Vous lui répondez que vous êtes "dans un état de colère monumentale, pour une simple et bonne raison : il n'y a pas un interlocuteur que je rencontre (...) qui oppose le moindre argument à nos inquiétudes. Donc individuellement, il y a un accord sur nos analyses, mais collectivement rien ne bouge. Je me dis que soit je passe mon temps à rencontrer des maîtres dans l'art de l'hypocrisie, soit, tout simplement, la prise en charge de tous ces éléments est lourde et complexe : chacun est effrayé et préfère... oublier. Il y a donc des moments où je bous un peu et où je comprends vraiment Greenpeace."

        Je partage complètement cette analyse de l'hypocrisie ambiante. Même si à priori, je fais parti des gens incapables d'actions violentes comme le fait en ce moment Greenpeace parce que je crois que par le dialogue et l'exemplarité on peut arriver à bouger les choses, j'en viens parfois à espérer que des écologistes fous de rage de constater la continuation de la logique "laisser faire, laisser croire", en viennent à faire exploser quelques bombes nucléaires sur les plus grands terminaux pétroliers du monde. La pagaille qui résulterait de tels attentats serait la seule occasion de pousser tous les gouvernements de la planète vers une autre logique ou on essaierait de dépendre moins des énergies fossiles et ou on assurerait une survie de la nature (parce que sans nature, pas de futur !). J'ai prévu dans un prochain éditorial d'expliquer l'impact que pourraient avoir de tels attentats et j'expliquerai pourquoi ils sont crédibles. Écologisme radical et Islamisme intégriste au Moyen Orient, même combat ? Même si c'est osé d'écrire ce genre de chose, je ne suis pas le seul à le penser. Pour vous en assurez lisez ce que Jean-Marc Jancovici a écrit sur les attentats en Corse ( Les autonomistes corses ). Il s'agit d'un simple constat : les nationalistes corses ont largement contribué à la préservation de l'île de beauté. 
        Voici un message à tous les partisans du libre échange, de la croissance et du pétrole : si vous ne changez pas rapidement votre façon de voir le développement, il y aura parmi les écologistes que vous méprisez aujourd'hui des éléments (qui pourraient être recrutés chez Greenpeace (Greenwar ?) ou deep ecology) qui frapperont directement au coeur de notre système économique, à savoir le flux de pétrole. La bombe nucléaire fournie par des pays voyous pourrait être un moyen d'arriver à un tel résultat, de tels attentats frapperaient les esprits, mais de simples actes de sabotage conventionnels répétés aux endroits les plus sensibles du système d'approvisionnement énergétique (les pipelines, les raffineries, les lignes à haute tension...) pourraient suffire.   
        Et pour terminer sur cette réflexion, sachez que je suis bien triste d'en venir à imaginer que la solution pour éviter l'iceberg consisterait à mettre une bombe dans la chaudière. J'espère au fond de moi que cela n'arrivera pas et que le simple fait d'évoquer cette possibilité puisse faire réagir tous ces croyants du progrès technique. Je n'attend pas particulièrement de réponse de votre part sur cette réflexion mais peut être la partager vous et peut être faudra-t-il lancer un tel message lors d'une de vos prochaines interventions. Messieurs les décideurs, attention ! Le premier péril auquel sera confronté la civilisation industrielle pourrait bien venir de la réaction de colère de ceux qui ont choisi de lutter pour sauver ce qui peut l'être. 

        Vous en venez même à légitimer les actions musclées de Green Peace puisque vous ne considérez pas qu'ils soient violents. Ils ont en effet choisi un mode d'action engagé, parfois un peu plus physique mais qui est selon vous le minimum que l’on puisse opposer à cette violence de l'indifférence. Nous sommes donc très probablement d'accord sur la justification d'une radicalisation de la démarche écologique. La violence de l'indifférence et la violence de la surdité des décideurs sont en effet certainement plus blessantes que la violence physique et elles pourraient largement justifier les possibilités d'attentats évoqués plus haut.

        A travers votre expérience du dialogue avec les plus hauts décideurs (Jacques Chirac, mais aussi François Hollande, Laurent Fabius, Arnaud Montebourg et bien d'autres.), vous avez bien pris conscience qu'ils vous écoutent, vous félicitent, mais qu'ils se complaisent dans ce que vous appelez "le théâtre des apparences". Ils n'acceptent pas l'idée d'une régulation par une fiscalité énergétique, pourtant essentielle, de peur de voir une levée de bouclier de la part de puissants lobbies syndicaux et industriels.

        Vous avez pu, en différentes occasions, affirmer votre indépendance à l'égard des personnalités politiques, en critiquant ouvertement et régulièrement les non-choix et l'inertie du gouvernement. Votre refus de devenir Ministre dans le gouvernement actuel n'a pas contrarié le dialogue que vous avez avec le président. Il vous arrive de prendre votre téléphone ou d'envoyer un fax pour pousser un coup de gueule. Et j'admire réellement cette proximité que vous avez avec le pouvoir. Vous avez clairement essayé par le dialogue de convaincre les décideurs et on ne peut que vous féliciter de cette action. Vous devez être si seul dans ces sphères que votre longévité en leurs seins est un véritable exploit. 

        Vous l'avez très bien compris, puisque vous l'expliquez, l'écologie, l'environnement et le développement durable doivent imprégner transversalement tous les choix de la politique. Cela devrait s'apparenter à un tamis : chaque choix public doit passer à travers. Or on est à des années lumières de ce type de fonctionnement et on est, aujourd'hui comme hier et probablement comme demain, dans de la poudre aux yeux. Idéalement, il faudrait que le ministère de l'écologie soit directement rattaché au premier ministre. Il faudrait un changement de structure pour lequel vous avez déjà plaidé. En particulier quand vous avez refusé à deux reprises d'être ministre, vous avez essayé de faire en sorte que votre refus soit accompagné de propositions concrètes en disant : «Ce n'est pas l'homme qui compte, vous n'aurez pas plus de résultats avec moi. C'est l'architecture qui compte.» Résultat des courses, malgré une apparente bonne volonté dont vous témoignez, non seulement cela n'a pas été fait, mais cela a été pire que cela puisqu'on a supprimé le secrétariat d'Etat au développement durable. Quand je vois cette expérience que vous nous relatez, je me dis qu'il est de plus en plus inutile d'espérer influencer les décideurs, il faudrait maintenant adopter une posture beaucoup plus radicale, contestataire et surtout exemplaire. 

        S'il est certain que le temps politique semble difficilement compatible avec le temps écologique, je crois qu'il faut malgré tout faire avec ce système car contrairement aux époques dictatoriales ou monarchiques, la démocratie reste le système le plus enclin à l'espérance alors que le monde semble s'écrouler autour de nous. Il faut juste que quelques individus influents se lèvent au bon moment et agissent sur les bons leviers (et aujourd'hui ils sont médiatiques) pour proposer une voie solutionnant les grands périls qui nous attendent. Et évidemment, l'objet de cet page est que nous sommes beaucoup à attendre cela de vous.

        Le premier ennemi de l'écologie à l'heure actuelle est la croissance, dès lors qu'elle entraîne à parité une croissance des flux d'énergie et de matière. La croissance étant un tel dogme de notre civilisation, l'heure n'est plus aux compromis, elle est à une certaine forme de radicalité. Et je trouve que de plus en plus vous exprimez cette certaine radicalité. C'est pourquoi je vous soutiens tant aujourd'hui.

        Je vous sens révolté et votre révolte est la mienne. Peut être qu'en lisant ces lignes vous vous dites que je m'exprime bien, que mes idées sont claires et cohérentes, ou encore que je pousse les logiques toujours plus loin, ce qui m'amène à mettre le doigt sur des concepts de raisonnement nouveaux et intéressants. Je ferai donc peut être un homme politique de premier plan pour mener cette lutte. Quand j'ai commencé à m'intéresser à tous ces périls comme je le fais aujourd'hui, je voulais devenir le prochain président de la république en 2007. Quelques écrits qui sont restés en ligne sur ce site en témoignent encore. Aujourd'hui, je n'ai absolument plus cette prétention parce que je constate que la réalité de notre système démocratique rend impossible le fait de convaincre une majorité de la population de voter pour un inconnu en si peu de temps. Et ayant conscience des périls qui vont nous arriver, je n'ai aucune envie d'être aux commandes dans 30 ans à la tête d'un navire en perdition. C'est aujourd'hui qu'il faut agir, le navire (Le Titanic ?) n'est pas encore en perdition et c'est effectivement en 2007 qu'il faut que la France ait un président écologiste. Pourquoi cela ne serait pas vous ? Vous êtes connu et reconnu, vous pourriez être totalement crédible en changeant un peu le concept de vos émissions et en vous mouillant davantage sur le concept de l'exemplarité. Vous êtes en quelque sorte la raison d'être de mon combat aujourd'hui. Comme vous l'avez probablement compris, je n'espère plus grand chose des autres tendances politiques. J'imagine que vous ne répondrez pas oui comme cela, mais j'espère que vous m'expliquerez ce qui vous empêche de vous présentez en 2007 voire plus tard. Je suis convaincu qu'il ne faudrait pas longtemps (1 an) pour réunir suffisamment de personnes susceptibles de vous soutenir pour fournir des gens de compétences susceptibles de former un gouvernement à la poigne solide. Vous n'auriez même pas besoin d'avoir la majorité à l'assemblée nationale. Si vous êtes habile avec les médias (et j'ai toutes les raisons de le croire) vous pouvez faire passer les plus importantes avancées avec les référendums. Nous vous aiderons tous pour cela.  

        Quand vous évoquez le "syndrome du Titanic", la question que je me pose est "où en sommes nous ?" Le navire est-il déjà en train de heurter l'iceberg ou reste-t-il encore assez de temps pour manoeuvrer ? Je ne sais pas mais l'urgence impose le radicalisme et l'exemplarité.

        Alors que les trajectoires de l'humanité et de la nature sont en train de converger et qu'il va y avoir une collision, la meilleure et la seule attitude pour faire face au modèle américain consiste à construire une Europe exemplaire sur le plan écologique. Il faut pousser ce concept à l'extrême et accepter de vivre dès aujourd'hui avec des conditions qui soient écologiquement acceptables. Vous dites souvent que le monde de demain sera radicalement différent de celui d'aujourd'hui. Il le sera de gré ou de force. S'il l'est de gré, le tribut sera beaucoup moins lourd et terrible que s'il l'est de force. J'espère que vous nous montrerez rapidement comment on adopte de gré de nouveaux comportements.

        Vous en avez assez de jouer les Cassandre dans ce théâtre des apparences mais comme vous vous battez contre le fatalisme, vous n'avez plus choix, il faut continuer et peut être en changeant de méthode. Peut être vous ai-je proposé cette autre méthode ?

        L'essentiel de cette première grande partie a été réalisé à partir de propos que vous tenez maintenant régulièrement. Ils étaient concentrés dans cette interview publiée dans le monde 2, mais c'est vrai qu'en recollant les morceaux des différentes interventions que vous faites par ailleurs, j'aurai abouti à un résultat similaire. J'espère que la méthode ne vous choquera pas trop.

        Voici maintenant des réflexions que j'ai pu avoir dans le passé en vous écoutant. Certaines réflexions sont chargées d'émotion qui témoigne de la gratitude que j'éprouve à votre égard.

        A la fin de votre livre "Le syndrome du Titanic", vous décrivez trois attitudes qui pourraient être la vôtre, et accessoirement la mienne ! "La première : raccrocher les gants, me dire que j'ai donné, que d'autres n'ont qu'à s'y mettre. Elle ne dure jamais longtemps. La seconde consiste à glisser sur mon erre en me satisfaisant du rôle que je joue, dans ce théâtre des apparences. Elle me satisfait de moins en moins. La troisième : passer la vitesse supérieure en rassemblant cette France silencieuse, lucide, résignée, qui ne se reconnaît dans aucun des schémas qu'on lui propose." C'est en lisant cette phrase que l'idée a germer en moi que vous pourriez être ce président rassembleur de cette France silencieuse et qui prend peut être la parole à travers cette lettre ouverte.

        Un Dimanche soir (en 2004, je ne sais plus quand exactement), Marc Olivier Fogiel vous reçoit dans l'émission On ne peut pas plaire à tous le monde. Voilà ce que j'avais écrit comme petite note après l'émission (j'ai laissé le tutoiement) :
"J'ai la chair de poule pendant toute ton intervention. A la fin, énervé j'éteins le poste. Qu'est-ce qu'ils sont cons les présentateurs ? Fogiel s'est montré odieux dans la manière dont il posait les questions à Nicolas. J'ai ressenti une ambiance de Tribunal, où Nicolas était l'accusé. Ariane ne m'a jamais paru aussi gourde. Maximo le Jet Setteur s'est permis d'intervenir à un moment critique où Nicolas nous expliquait les risques de l'impasse de la science. Quel idiot ! Et tous ces SMS, aux trois quarts sans intérêt qui nous déconcentrent dans l'imprégnation de la fabuleuse rhétorique de Nicolas. En quittant le plateau, je t'ai vu Nicolas, tu as fait un geste de la main signifiant une déception, un refus des applaudissements qui t'étaient destinés. Que pensais-tu à ce moment là ? Tout est foutu, le message n'est pas passé, pourquoi ne m'ont-ils pas pris au sérieux ? Voilà pourquoi j'ai éteint la télévision. Avec ma femme nous discutons longuement projet de vie. Le message de Nicolas aura beaucoup de mal à passer, alors le mien, j'y compte même plus. Il faudrait peut-être envisager l'avenir sous l'angle de l'inéluctabilité et donc se pose alors la question de notre propre survie dans un monde qui s'annonce hostile." 

        Voici un extrait du syndrome du Titanic que j'ai longtemps mis dans la signature de mon mail :
"J'ouvre le journal, j'allume la radio, une nouvelle me scandalise, la déclaration de celui-ci me redonne espoir, l'inconscience de celui-là me navre. Et je reprends la plume, donne de la voix, cherche encore et toujours à convaincre mes interlocuteurs. Moins que jamais il ne faut baisser les bras. L'urgence de la menace doit dicter ma conduite et celle de mes amis.

Une dernière réflexion que m'avait envoyé une internaute dont je laisse l'anonymat :

        "Pour commencer, je précise que j'ai le livre le syndrome du Titanic et que ses émissions me plaisent, je n'ai donc pas d'a priori. Ce qui me gène, c'est un décalage entre la situation grave dans laquelle nous nous trouvons et l'action.
Je m'explique: Trouver dans le magasine Ushuaïa une pub pour un 4X4 (en 4e de couverture), je trouve cela effrayant et très grave! D'autre part, la publicité y a trop de place : pub pour le rasoir sous la douche, (histoire de gâcher un peu plus d'eau), pour les téléphones portables, la télévision, et ....pour des voyages en avion!!! Moi, ça me rend triste.
L'avenir de la planète passe par la décroissance volontaire ou simplicité volontaire, selon les idéologies.
Pour ma part le mot croissance, soutenable ou non est une erreur. Pourquoi les produits dérivés Ushuaïa ont ils été créés? Avions-nous encore besoin d'une nouvelle crème ou d'un nouveau savon aux constituants exotiques importés de l'autre côté de la planète ?
Il semble être une des personnes les mieux informées, et pourtant.... Ce qu'il reproche aux politiciens , l'inertie des dirigeants, etc..., je soutiens entièrement.
Ensuite, vous lui demandez de montrer l'exemple et je pense effectivement que c'est la meilleur action qui soit quand on sait que selon certains sondages (je n'ai plus les références malheureusement) il est "l'homme préféré des français"!!
Je ne jette pas la pierre à celui qui a pris l'avion pendant des années, mais je n'approuve pas celui qui continue alors qu'il sait.
Développer le commerce n'est pas une bonne chose, il doit le savoir, alors pourquoi?
Je sais qu'il faut bien "gagner sa croûte", mais je pense qu'il ne faut pas être en contradiction avec soi même, surtout quand on veut faire passer un message aussi important. Voilà en bref, mon point de vue."

        J'espère que vous aurez parcouru avec plaisir cette lettre que je vous adresse. J'espère que vous n'avez pas gardé que les reproches. Il s'agit d'un véritable cri du coeur pour vous soutenir dans votre combat. Vous êtes pour nous plus qu'une bonne conscience, vous êtes probablement notre dernier espoir. J'attends de vous une réponse sur ces deux propositions :

Bien cordialement,

Eric Souffleux, nantais de 26 ans, professeur de karaté et citoyen engagé auteur du site générations futures.

Bibliographie :
Nicolas Hulot, Le syndrome du Titanic, éditions Calmann-lévy, Paris, 2004.
* Face à l’inaction généralisée, les colères de Nicolas Hulot. Interview de Nicolas Hulot par Pierre Barthélémy et publié dans "Le monde 2" du 18 février 2005. Interview visible sur le site fnh (aller voir les archives) et aussi en lien direct sur ce site.


Ayant eu l'autorisation de Nicolas Hulot (1er décembre 2005) pour publier cette lettre ici, la voici :

Réponse de Nicolas Hulot :

Paris le, 2 novembre 2005

Monsieur Eric SOUFFLEUX                
Email : e.souffleuxENLEVEZ@infonie.fr

Cher Monsieur,
Cher Eric,

Le hasard probablement veut que cette semaine trois personnes aient évoqué auprès de moi votre lettre ouverte.

Je n'en avais jusqu'alors jamais entendu parler.

Je voulais simplement vous dire qu'elle ne m'a pas laissé insensible et que, pour faire court, elle me trouble et m'inonde de doutes.

Je suis en permanence traversé d'interrogations sur la manière la plus efficace de mener mon combat. Je crains toujours le pas de trop, l'ultime prétention qui discrédite l'ensemble de l'action.
Je connais mes faiblesses plus que mes forces. Je connais également mes incohérences dont celles que vous pointez (j'essaie chaque jour de m'améliorer). Mais la seule question qui demeure est : où et comment suis-je le plus utile ? Au moment où je vous écris, jamais la réponse n'a été aussi confuse.

Je reprendrai probablement contact avec vous. J'ai essayé sans succès sur votre téléphone à Nantes.

Cordialement,

Nicolas Hulot


Mes réactions (publiées le 24 novembre 2005)

        D'abord, je tiens à vous remercier Nicolas Hulot pour cette lettre qui montre que la première des vos qualités est bien l'humilité. Je ne m'étais pas tromper sur le personnage. Mon intuition était la bonne. L'humilité et le doute mêlés à de profondes convictions pour préserver ce qui peut l'être encore font de vous un personnage clé pour faire avancer ce lobby des consciences, dont j'aimerai que vous soyez le rassembleur.

        J'espère que vous ne m'en voudrez pas (une fois de plus...) d'avoir publié cette lettre et aussi mes réactions qu'il serait souhaitable que vous ailliez lu avant de reprendre contact d'une manière plus directe.

        La question finale que vous posez ne peut pas demeurer sans réponse. Où et comment êtes-vous le plus utile ? Pour moi, votre atout est l'image positive que vous dégagez auprès d'une majorité de la population. Vous êtes parvenu dans la conscience collective au stade d'un sympathique écologiste qui nous montrent les merveilles de la nature et en même temps nous invite à les protéger à travers de nombreux cris d'alarme.

        On le voit bien avec la crise actuelle (l'embrasement des banlieues, le chômage des jeunes), beaucoup de gens ont perdu leurs illusions sur ce que pouvait leur apporter la société actuelle. La démocratie est probablement en péril. Je crois qu'il nous manque un esprit désintéressé pour nous expliquer avec un langage naturel comment nous devons faire pour éviter les périls écologiques et sociaux qui menacent. Je crois toujours que votre rôle est maintenant de devenir ce personnage clé qui nous manque aujourd'hui.

        Lorsque j'ai écrit cette lettre ouverte en avril 2005, vous étiez à ce moment le dernier personnage que je croyais susceptible d'être capable d'aider notre démocratie en proposant une alternative politique neuve. Le temps passant, j'ai un moment perdu espoir que vous me répondiez. Je me suis notamment intéressé au personnage de José Bové, qui sans être aussi populaire que vous pouvait présenter des atouts, surtout parce qu'il défend une agriculture paysanne et que professionnellement, je suis actuellement en train de me diriger dans cette branche (le maraîchage). Malheureusement ce personnage a été plus ou moins exclu de notre vie politique. Je me suis aussi intéressé à Olivier Besancenot. Certaines de ces idées pour limiter la fracture entre les élus et les électeurs me séduisent, de même que l'idée de limiter l'écart entre les salaires des plus pauvres et des plus riches est pour moi un facteur évident de cohésion sociale. Cependant, voter extrême gauche n'est pas la meilleure solution pour faire avancer ce qui me tient le plus à coeur : l'écologie. Il s'agirait plus d'un vote sanction, peu constructif et comme je le dis souvent avec un coin de sourire : "J'ai envie de voter pour le facteur de la LCR parce que c'est le seul parmi nos politiques qui fait de l'écologie sans le dire en se servant tous les jours d'un vélo..."  Ce qui est sur pour moi, c'est qu'il me sera très difficile de voter un jour pour les actuels partis de gouvernement car ils n'ont jamais pris les problèmes écologiques et énergétiques au sérieux. Ils leur manque aussi une valeur importante : le courage politique. Tous naviguent à vue au gré des crises ou des modes du moment et personne ne prend le risque d'exposer des idées nouvelles préparant à la pénurie énergétique ou au réchauffement climatique. Force est de constater qu'il ne reste maintenant plus que vous pour que je puisse aller voter avec conviction aux prochaines élections. J'ai beau cherché dans le paysage politique actuel, je ne vois pas d'autres personnes susceptibles d'avoir votre charisme pour la tâche que je vous suggère.

        Essayons d'imaginer l'avenir. Le scénario actuel le plus probable est l'élection de Nicolas Sarkozy aux prochaines présidentielles. Il est possible qu'il se retrouve au second tour face à l'extrême droite (comme en 2002) ou face à l'extrême gauche (Un super Besancenot en vélo couché :-)) avec un taux de participation de 65%. A cause des divisions du PS suite au référendum, les querelles ne permettront pas l'émergence d'un projet politique alternatif pour 2007. Il est possible qu'un climat économique dégradé (pour cause de périls écologiques et économiques (problème du pétrole)) entraîne un repli des gens sur des valeurs sécuritaires, ce qui profiterait à la droite (comme le montrent les sondages actuels), ce qui donc générerait aux élections législatives une assemblée plutôt à droite. Je n'ai pas envie qu'un tel scénario "laisser faire" se poursuive.

        Imaginons maintenant autre chose. Vous vous présentez sous une bannière "défi pour la terre". Vous vous associez avec Pierre Rabhi (J'en profite pour vous féliciter pour le livre que vous venez d'écrire en commun.), José Bové (Je ne sais pas si le rapprochement est possible, mais comme ministre de l'agriculture paysanne, il pourrait être bon.), Jean-Marc Jancovici (Votre futur premier ministre car il est de ceux qui maîtrisent le mieux le parlé vrai dans la problématique énergético-climatique.), Yves Cochet (Un des verts les plus lucides mais malheureusement bien seul dans son propre parti.), Corinne Lepage (Là, je me plante peut être...) ...et quelques autres personnages fédérateurs. Grâce à vos efforts autour d'un programme clair, vous pourriez décrocher un honorable 15 - 20% des voix. Le second tour serait alors envisageable face à un Nicolas Sarkozy qui n'a jamais préparé ses électeurs à une telle éventualité. Autant je vois mal des gens voter massivement pour l'extrême droite ou l'extrême gauche face à un parti de gouvernement classique, autant je crois que c'est tout à fait possible de voir les gens s'en détourner pour voter pour un parti écologiste avec à sa tête un sympathique Nicolas Hulot. Le mot d'ordre du deuxième tour serait de dire qu'avec vous, cela pourrait vraiment changer. Beaucoup d'abstentionnistes appartenant à cette France résignée sortiraient des rangs. Si je vous ai interpellé avec ma lettre ouverte, c'est parce que je crois que ce scénario est vraiment réalisable. Il ne tient qu'à vous d'emballer la machine médiatique autour de ce projet. Vous pouvez devenir un autre acteur dans votre combat. Saisissez cette opportunité, vous êtes probablement notre dernière chance à nous : les jeunes et les générations futures.

        Si vous étiez élu, il y a de grandes chances pour que vous ailliez une assemblée nationale plutôt à droite. Si sur certaines propositions de lois, elle ne vous suivait pas, il faudrait préparer des référendums. Et je ne doute pas que vous pourriez utiliser l'outil médiatique d'une manière très efficace pour convaincre les gens de vous suivre. 

        Même si je peux encore vous apparaître comme un jeune idéaliste, je suis lucide sur la complexité du problème. Je me pose souvent la question de savoir vers quel système institutionnel nous devons aller. Il faut que les efforts en faveur de l'écologie soient durables. Ceci est contraire au principe de l'alternance cher à nos démocraties actuelles. Je suis convaincu que la démocratie telle que nous la connaissons représente un système vicieux ou la population fait bloc pour maintenir tous les privilèges permis par la science. Ceci conduit à un gaspillage à la fois accepté et subi. Je me demande où est l'intelligence dans tout cela. Qui peut orienter dans le bon sens le destin de l'humanité ? Personne, il me semble. La démocratie où on demande à chacun, quelque soit ses facultés mentales et spirituelles, de donner son avis pour organiser la vie en collectivité en tenant compte de la survie des générations futures est pour moi une anomalie. L'anomalie se situe dans le fait que finalement le peuple décide avec son porte monnaie (c'est lui qui a le pouvoir dans l'économie de marché, un pouvoir sans partage) et décide également du destin collectif avec les élections. Avec un tel système, il n'y a aucune possibilité de régulation, pas de contre pouvoir, car dans les deux cas ce sont les mêmes qui décident. Pour moi, l'idéal serait de conserver l'économie de marché la plus libre possible, mais en y associant un pouvoir organisé par des sages ayant le devoir d'organiser sur le long terme l'avenir de l'humanité grâce à des moyens de régulation pour inciter aux économies d'énergie et des choix stratégiques pour sauvegarder l'essentiel : la paix dans le monde. Les sages ne peuvent pas être élus par les citoyens lambdas trop accaparés à régler l'urgence du quotidien ou encore endormis dans la société de consommation. Je ne sais pas qui aurait le droit d'être électeur et éligible. Il faudrait probablement une sorte d'examen des connaissances pour vérifier que les électeurs maîtrisent bien toutes les données d'un problème pour avoir le droit de donner un avis. Il faudrait aussi que ces personnes aient accompli dans leur vie quelque chose de bien, quelque chose de l'ordre du dévouement collectif, du détachement de soi, comme l'exige il me semble l'exercice du pouvoir. Cela serait compliqué à organiser mais c'est nécessaire car le pouvoir implique selon moi un effort, un effort de concentration, de réflexion. Le pouvoir ne peut pas résulter du hasard comme il semble l'être aujourd'hui. Est-ce qu'on peut par exemple considérer qu'une personne affectée par une drogue (alcool, tabac, médicaments neuro leptiques...) ou fataliste par nature (comme on voit beaucoup en ce moment avec l'occultation du problème du pétrole) peut avoir le droit de donner son avis sur une question qui organise durablement la vie des hommes et des générations futures ? La démocratie d'aujourd'hui n'est-elle pas au final une dictature de la schizophrénie, de la peur ? Peur du chômage, on vote à gauche. Peur des banlieues, de la violence, on vote à droite, voire à l'extrême droite. La peur n'est-elle pas le seul moteur de notre système actuel ? Est-ce compatible avec le détachement qui s'impose pour exercer un pouvoir durable ? Beaucoup de ces questions ouvrent des pistes intéressantes mais les réponses sont encore floues dans mon esprit. J'ai peur de quitter le politiquement correct. Moi aussi, je suis traversé de doutes et d'interrogations. Nous arriverons peut être ensemble à y répondre.

        J'espère ne pas trop vous avoir perdu dans mes propres doutes. Il fallait que je vous les expose car je n'ai pas envie de voter pour un Nicolas Hulot qui ne serait qu'une pâle copie des actuels mouvements écologistes. J'aimerai que vous osiez une nouvelle démarche avec courage. Voici maintenant quelques mesures que vous pourriez mettre en avant et sur lesquelles il y a matière à discussion :

        Il y a d'autres domaines où il faudra réformer notre pays, mais je crois que cela ferait trop long. Votre temps est certainement précieux. J'espère que vous m'appellerez pour que nous discutions de tout cela au téléphone.

        J'ai l'impression d'avoir moi aussi une sacrée responsabilité sur mes épaules. Comment vous convaincre de vous engager dans une démarche exemplaire et politique ? Si j'échouais, qui le ferait à ma place ? Dois-je moi aussi tomber dans le fatalisme parce qu'il ne me sera plus possible de voter en 2007 ?

        Comme je l'ai déjà écrit, vous êtes une des dernières personnes en qui je crois encore. Vous n'avez pas affaire à un simple fan. J'ai largement dépassé ce stade (L'ai-je atteint un jour ?), je suis seulement quelqu'un qui veut vous suggérer un autre destin que celui de rester à la fois acteur et quelque part coupable dans ce théâtre des apparences. J'ai bien conscience d'être aussi une personne rare car sur la toile informatique, il y a très peu de gens aussi engagés que moi. La discussion s'annonce riche, je vous attends non sans une certaine impatience.

Eric Souffleux, nantais de 27 ans.


Petit compte rendu de notre première conversation téléphonique ce jeudi 1er décembre 2005.

        Ce dernier paragraphe sera la conclusion de cette page qui ne doit pas ressembler à un journal intime où je parlerais de toutes mes conversations avec lui. Nicolas Hulot m'a appelé vers 10h25 et nous nous sommes quittés peu avant 11h. Le dialogue a été très intéressant et j'ai l'impression que nous partageons une estime mutuelle. Ce que je peux dire en quelques lignes, c'est que j'ai eu la bonne intuition en envisageant une candidature possible de Nicolas Hulot pour des prochaines élections. Nicolas a comme projet de mettre en place une plate forme écologique sur laquelle les partis politiques pourraient se baser pour bâtir leur programme en vue de 2007. L'objectif de Nicolas est de pousser les partis à adopter cette plate forme parce qu'elle pourrait être soutenue par des millions de personnes, des millions d'électeurs potentiels. Nicolas verra alors comment les partis prendront cette proposition. Il est possible alors que ce que je lui suggère dans ma lettre ouverte devienne la réalité. Mais ceci reste du pur conditionnel.

        Pour ce qui est des idées politiques, nous partageons pas mal de choses. Nicolas m'a fait part de sa conviction pour la fiscalité écologique et aussi pour la norme qui oblige les industriels à des innovations dans le bon sens. De même il est très favorable à un usage important des référendums. Nous avons évoqué pas mal de choses mais je pense que tout ceci sera plus clair lors de la mise en place du projet de Nicolas.

        Sinon, ma tâche va être de convaincre Nicolas de faire la promotion du vélo couché dans ses prochaines émissions. Il ne connaît pas ce type de vélo et il a semblé très intéressé. L'aventure va donc se poursuivre et je pense que je mettrais en avant les prochaines actions de Nicolas sur le site générations futures.

Eric Souffleux, nantais de 27 ans.


Notre première rencontre...

16 janvier 2007, un an plus tard, à moins de 100 jours des élections présidentielles et à moins d'une semaine de l'annonce de la candidature (ou de la non candidature) de Nicolas Hulot (le 22 janvier 2007), nos destins viennent à se croiser à Nantes à la cité des congrès. Je prends quelques lignes pour vous raconter notre rencontre. Vous allez comprendre que cette page entre maintenant dans l'histoire de cette campagne présidentielle. 

Séquence émotion ! (surtout pour nous) Séquence historique ! :-)

Nous le savions depuis deux mois, Nicolas Hulot devait venir à Nantes le jeudi 18 janvier 2007 pour animer une conférence sur le pacte écologique. J'étais ravi car le jeudi soir, je n'ai plus de cours de karaté. Cette date était marquée en rouge sur mon calendrier. Je pouvais espérer reprendre contact avec Nicolas Hulot et poursuivre un peu notre conversation. Un peu avant noël, la date de la conférence est avancée au lundi. Flûte ! Cours de karaté ce soir là !

J'ai donc raté le début de la conférence mais heureusement Eva était là depuis 19h30 et on n'a rien perdu. Malgré l'emploi du temps très serré de cette soirée, nous sommes venus en vélos couchés. J'ai quitté Couëron à 21h20 et je suis arrivé à la cité des congrès à 21h50. L'amphithéâtre de 2000 places est bondé. Je m'assois sur le sol comme d'autres spectateurs. J'en profite pour prendre la photo de gauche (pas très réussie...). A peine suis-je installé que Nicolas termine la présentation du pacte écologique. Immense ovation dans la salle. Deux intervenants viennent le rejoindre sur la scène, une climatologue (Marie-Antoinette Mélières) et un économiste (Jean Paul Besset) appartenant au comité de veille de la fondation de Nicolas. Le journaliste (Denis Cheissoux) pose différentes questions du public. Plusieurs thèmes sont abordés successivement par les deux experts et Nicolas Hulot : le réchauffement de la planète, ses conséquences, la responsabilité de chacun, le nucléaire, le futur aéroport de Notre Dame des Landes, l'extension du port de Donges Est et toutes les questions liées aux marges de manoeuvre des politiques. Nicolas Hulot s'est montré très mesuré et prudent. Je pense qu'il a conquis la confiance de l'ensemble de la salle. Il a très bien expliqué sa position sur le nucléaire. On voit bien (pour ceux qui en doutent encore) qu'on a affaire à un homme de convictions, profondément humaniste et parfaitement conscient des difficultés qui nous attendent.

Une fois la conférence terminée, il fallait bien s'y attendre, Nicolas s'esquive par l'arrière de la scène. J'ai bien tenté de l'approcher, mais il y avait tellement de journalistes et je n'étais pas certain qu'il se souviendrait de moi sans mon vélo couché. Avec Eva, on décide de sortir et de l'attendre dehors. Après un petit jeu du chat et de la souris, nous finissons par le rattraper (On ne sème pas comme cela un chat sur un vélo couché !) et là miracle !

Je lui lance "Nicolas !". Il m'entend, me regarde et s'approche de nous. Il me dit tout de suite "Toi, je sais exactement qui tu es. Rappelle moi ton nom.. " "Je m'appelle Eric Souffleux, nous nous sommes parlés au téléphone... " "Oui, il y a moins d'un an. Sais-tu que c'est à cause de toi que je suis là ?"  "????" Il regarde tous les gens présents à ce moment et leur dit "C'est lui le point de départ de tout cela."

J'ai ressenti une grande émotion. Lui aussi visiblement. Nous échangeons quelques mots sur nos vélos couchés dont il connaît maintenant bien l'efficacité. Je lui explique que nous cherchons de la terre pour produire des légumes bio. Je lui dis qu'il y a une très grande résistance du monde paysan à l'égard du bio. Le bio est vécu par beaucoup comme une insulte vis-à-vis des méthodes conventionnelles. Notre projet est simple, à l'image du pacte écologique, nous voulons planter des graines dans le sol sans pesticides et en traction animale, mais surtout planter des graines dans la tête des gens. Ce à quoi il me répond "Tu vois, tu as déjà commencé, c'est toi qui m'a planté cette petite graine, cette drôle d'idée, que d'aller au devant des élections qui arrivent, c'est un bon début !" Nous nous quittons sur une franche poignée de main en nous promettant de nous revoir après les élections. Heureux comme jamais, je n'ai pas résisté à vider le klaxon de mon Pioneer en m'éloignant de la cité des congrès. Beaucoup ont été surpris et se souviendront de notre joyeuse pollution sonore, à commencer par Nicolas. 

Voilà, c'est fait, je suis maintenant redescendu de mon petit nuage. Un constat s'impose : tout ce que j'ai accompli depuis 4 ans et demi n'a pas été inutile. J'ai même en partie réussi avec mes modestes moyens. L'écologie, le réchauffement de la planète est aujourd'hui au coeur de la campagne présidentielle et force est de reconnaître que je suis un des initiateurs de cette réussite. En quittant Nicolas Hulot, avec Eva, nous avons eu une pensée pour celui qui m'a ouvert les yeux sur cette grande cause, Jean Marc Jancovici, sans qui j'en serais encore probablement à me battre pour des médailles de bronze en karaté. Une fois de plus, merci Jean-Marc. En fait, la question n'est pas vraiment de savoir qui est l'initiateur de quoi. Jean-Marc a épluché les travaux du GIEC avant d'autres. Il m'a ouvert les yeux sur le péril climatique à un moment où j'étais disponible et aujourd'hui je peux penser avoir initié toute la démarche de Nicolas Hulot. J'imagine qu'il ne fallait pas grand chose à ce moment là pour décider Nicolas, mais il fallait un maillon absent jusqu'ici. J'ai été ce maillon qui a conduit à cette chaîne du pacte écologique. Je ressens une immense reconnaissance, mais aussi maintenant une responsabilité énorme.

Au jour où j'écris ces lignes, 18 janvier 2007, Nicolas n'a pas encore pris sa décision. Va-t-il se présenter pour peser dans les débats ? Où va-t-il renoncer pour mieux peser après les élections ? La question est complexe mais je reste sur mon intuition initiale : il doit se présenter.

Plusieurs raisons (que je lui adresse directement) justifient la candidature de Nicolas Hulot aux présidentielles.

Cher Nicolas,

J'espère que tu m'excuseras pour la forme de mon expression mais je crois qu'il y a urgence car tu vas prendre une décision cruciale et le temps me manque pour écrire avec ma plus belle plume.

Suite à notre rencontre à Nantes après ta conférence du 15 janvier 2007, j'ai cru comprendre que j'étais pour partie à l'origine de cette aventure visant à interpeller les candidats sur l'urgence écologique , sur cette nécessité de créer le débat autour d'un pacte écologique (cf ma première lettre ouverte). Ta reconnaissance spontanée m'a comblé de joie car j'ai compris que toute mon action visant à faire émerger l'urgence écologique en 2007 est sur le point de se concrétiser. Sache dès maintenant que tout ce que tu as accompli a déjà largement dépassé mes espérances les plus grandes. J'ai cependant le sentiment de devoir t'encourager encore dans ce sens, car tu as l'air de beaucoup hésiter, ce que je peux comprendre.

Pour faire court, je pense que tu dois aller jusqu'au bout, car ta popularité est une chance historique pour la prise en compte des enjeux climatiques dans le débat démocratique. Et comme tu le sais bien, il y a urgence ! Il y a vraiment urgence. On ne pourra pas attendre cinq ans de plus quand on sait qu'il aurait fallu s'y prendre il y a trente ans. La tâche qui t'incombe est immense, mais mon intuition me dit que tu es bien l'homme de la situation car tu es plus que d'autres lucide, pragmatique et surtout humble. Je comprendrais cependant un droit de retrait légitime pour convenance familiale. Et c'est ton droit le plus strict de renoncer si tu sens que cette aventure peut nuire à ta famille. Mais dans le cas où ta famille te soutient à 100%, n'hésite pas plus longtemps, présente toi ! 

Dans ces élections qui se profilent, tu es notre bonne conscience à tous. Les journalistes ou les politiques qui te blesseront dans cette campagne seront aussitôt exclus du système et de cela beaucoup en sont conscients. Même Nicolas Sarkozy trouvera facile de débattre face à Ségolène Royal plutôt qu'avec toi devant des caméras. Tu peux tous les prendre de cours parce que tu interviens dans la campagne sur une question qui est de l'ordre de la morale. Je ne te comparerai pas au Coluche de l'écologie. Non ! Tu es plutôt un sage humaniste qui vient donner une leçon à tous ces enfants qui festoient sur le dos de la planète et des générations futures. Comme tu le sais, comme tu le sens, la prise de conscience est là. Elle n'est pas encore majoritaire, mais la forte minorité qui peut basculer de l'intention à l'action n'attend qu'un élément rassembleur comme tu peux l'être. Dans le monde, le genre humain compte peu de personnes comme toi qui peuvent faire basculer l'ensemble de l'humanité, via l'exemple d'un pays riche, de la civilisation du gâchis vers la civilisation de la modération. Je ne doute pas que tu en as conscience et que c'est en partie cela qui t'accable dans ta prise de décision actuelle.

Mais c'est comme cela, notre république a hérité d'un président quasi-monarchique et cette élection est la rencontre en confiance entre un homme (ou une femme) et le peuple. Je pense que tu dois préserver coûte que coûte la relation de confiance privilégiée que tu as avec l'opinion. C'est cela qui te fera accomplir des miracles, c'est cela qui nous redonnera un peu plus d'espoir. 

Quelles sont les raisons qui peuvent te pousser à te présenter ?    

Tout d'abord, être crédité de 8 à 12% des intentions de vote, c'est engranger 3 à 4 millions de voix, ce qu'aucun écologiste avant toi n'a réussi à réunir. 3 à 4 millions de personnes qui adhèrent à un programme écologique, c'est pour le gouvernement qui sera mis en place un signal bien plus fort adressé aux décideurs que le pacte écologique signé par 1 million de personnes. En te présentant aux élections, le pacte écologique change d'échelle.   

La seconde raison tient de l'urgence écologique qui impose de tenter le tout pour tout. Depuis le début, j'ai l'intuition (cela ne vaut pas grand chose...) que tu seras au second tour face à un des favoris et que tu gagneras les élections simplement parce que tu accumuleras tous les votes contestataires de l'autre candidat (qu'il soit Sarkozy, Royal, Le Pen ou Bayrou) et aussi parce que beaucoup en ont marre de tout ce qui ressemble de près ou de loin à un politicard de carrière.

La troisième raison tient au fait que même en te présentant aux élections, tu ne cours aucun risque. Si tu perds, tu retrouveras sans problème un job à la télévision, si tant est que cela t'intéresse encore vu ta responsabilité de père de famille. Tu pourras aussi exercer une pression bien plus forte sur les législatives car tu pourrais organiser une liste de personnalités politiques ayant signé le pacte et ayant la charge de le porter dans les débats à l'assemblée nationale. Tu pourrais ainsi constituer une nouvelle majorité bien au delà des clivages politiques habituels. Mais faut-il cependant que tu puisses compter ton électorat à un moment donné ? D'où à mon avis l'intérêt de ta candidature. L'essentiel est de voir qu'entre un pacte écologique signé par 1 million de personnes qui n'engagent que ceux qui signent et 4 millions d'électeurs qui peuvent peser aux législatives pour former une majorité favorable au pacte, il y a deux mondes ! Il y a les intentions (louables) et l'action (stratégique).

L'aspect stratégique - c'est probablement ce qui doit te rebuter le plus - et pourtant, sans faire trop de plans sur la comète, il faut y penser. 

La quatrième raison est plus personnelle car suite aux réactions des autres partis (et notamment les partis écologistes) j'ai découvert de bonnes raisons de ne pas voter pour d'autres personnes que toi. Corinne Lepage (Libération du 12 janvier 2007) te fustige parce que tes émissions sont toujours soutenues par des industries polluantes ou à risques. Elle te demande même de te désolidariser d'une personne extrêmement chère à mes yeux : Jean-Marc Jancovici, sous-prétexte qu'il est nucléo-tolérant (comme toi). Je trouve ses réflexions honteuses car elle renvoie l'écologie à une minorité et nous avons tous bien compris ici qu'il faut que l'écologie devienne un sujet central. Il faut donc que les petits candidats s'effacent devant le plus plébiscité. On voit aussi que cette exigence qu'ont certains écologistes de te positionner contre le nucléaire crée une fracture entre deux façons de voir l'écologie : le carbocentrisme (la lutte contre l'effet de serre est la priorité) et le nucléocentrisme (la lutte contre le nucléaire civil est la priorité). C'est un vrai clivage qui se découvre à nous maintenant. Ensuite il y a les verts qui montrent leur vrai visage. Yann Werhling (Le Monde du 8 janvier 2007) t'accuse d'être le représentant d'une écologie acceptable pour les pollueurs et même rentable pour leur régie publicitaire. Il t'accuse de mettre tout le monde sur le même plan. Il dit que l'écologie politique doit montrer du doigt seulement les plus pollueurs, ce qui est parfaitement contre productif ! Car comme tu le sais, nous avons tous à faire notre part. Sans minimiser les effets de la publicité, les gros industriels n'existent que parce qu'ils ont des clients en face, des consommateurs que tu invites à la réflexion avant chaque achat, ce qui est le plus juste. De même, Dominique Voynet s'énerve sur ton absence de programme. Je ne la comprends pas. Elle doit faire partie des signataires du pacte qui ne l'ont pas lu. Comme d'autres, elle te reproche ta soi disant incompétence politique. Pourtant a-t-elle réfléchi une seule seconde à ce que signifie cette allégation dans le contexte démocratique ? Nous allons tous voter en 2007. Crois-tu réellement que tous les électeurs sont compétents pour répondre à toutes les questions qui se poseront à toi ? Dire que sous prétexte que tu n'es pas un politicien de carrière, tu n'es pas compétent est pour moi une véritable insulte à la démocratie.  

La cinquième raison est que pour moi, tu es le candidat idéal. On sent bien avec ton "J'y vais j'y vais pas ?" que les questions d'égo te sont parfaitement étrangères. Tu es courageux et modeste, comme l'ont été tous les résistants à d'autres époques. Ton atout est justement ton absence de programme traditionnel avec des centaines de mesures qui ne seront jamais appliquées. L'esprit du pacte et l'esprit de ta candidature, c'est de fixer un cap qui va demander à tous un effort important. La fonction de président ne demande alors qu'une capacité de dialogue et de concertation pour mettre tous les acteurs en marche dans le même sens. Au sortir de la seconde guerre mondiale, on a bien fixé le cap de la reconstruction. En 1981, la gauche avait su fixer un cap libéral et social. En 2007, pourquoi ne fixerait-on pas un cap écologique ? 

Enfin, une dernière raison qui prêtera à sourire, j'aimerais te voir inquiéter Jean Marie Le Pen en lui demandant le plus sérieusement du monde ce qu'il compterait faire contre les changements climatiques car le réchauffement va pousser des millions d'immigrés nord africains en Europe. Quelle horreur pour Le Pen ! Une invasion de noirs et d'arabes à cause de nos bagnoles !   (Je ne suis pas raciste pour un sou, je te prie de prendre ce paragraphe avec humour...) Et justement la bagnole, l'extrême droite la défend (surtout les voitures françaises :-)) bec et ongles. Nicolas, avec ta candidature, tu pourrais d'une certaine manière réparer l'affront national de 2002 et cela aussi, toute une génération le réclame.

Conclusion de ma réflexion : les élections présidentielles sont ainsi faites qu'il faut qu'un individu se mette en avant pour entrer en résonance avec le peuple. C'est quelque chose de très difficile, qui à mon avis demande à cet individu un égo surdimensionné, un attrait du pouvoir, ce qui est un point tout à fait détestable de ce type d'élections. Comme tu n'as visiblement pas cet égo, ta problématique est plutôt de te sentir soutenu par tes proches. Ce que tu pourrais le plus perdre dans cet histoire, c'est ta stabilité familiale et l'essentiel pour moi, c'est que tu sois extrêmement soutenu par tes proches. C'est la condition indispensable pour que tu abordes cette épreuve avec sérénité et avec un certain détachement.

Car même si tu renonces, avec le défi pour la Terre et maintenant le Pacte écologique, ton nom résonne dans beaucoup d'esprits comme un immense espoir pour notre avenir, pour l'humanité réconciliée avec le progrès et avec la nature.

Prends le temps de parler avec tes proches et saches que si tu ne te présentes pas, beaucoup le comprendront et te féliciteront pour ce que tu as déjà fait et ce que tu continueras à faire d'une autre manière.

Je te remercie pour l'attention que tu as bien voulu porter à mon texte. J'espère qu'il pourra t'aider dans ta prise de décision finale.

Eric Souffleux 


Un renoncement... qui claque pour moi comme un coup de tonnerre d'un certain 21 avril 2002.

Dans sa conférence de presse du 22 janvier 2007, Nicolas Hulot renonce à sa candidature aux élections présidentielles. 

DÉCLARATION DE NICOLAS HULOT   (22 janvier 2007)   (texte tiré de nicolashulot2007.org le site de la campagne de Nicolas Hulot)

Madame, Monsieur,

Merci d’avoir répondu à notre invitation et plus particulièrement à la mienne, pardon une fois de plus de cette incursion dans la vie politique et médiatique de notre pays, mais j’espère que chacun a compris que cela ne procède en aucun cas d’une ambition personnelle ou d’une soif d’existence supplémentaire.

La gravité de l’enjeu universel dont je suis porteur, avec d’autres, justifie cette intrusion dès lors que celle-ci ne contribue pas à diviser plus encore une société déjà trop fragmentée et où le dialogue se fait trop souvent sur la base de préjugés.

Début novembre, avec le Comité de Veille Ecologique de la fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme, nous avons lancé le PACTE ÉCOLOGIQUE. Deux mois et demi après, un demi million de personnes ont soutenu notre démarche et l’esprit du Pacte.

Cette formidable dynamique d’exigence écologique ne faiblit pas. L’enjeu écologique s’est imposé dans le débat public et les médias. Près de 200 000 lecteurs se sont procuré l’ouvrage «  Pour un Pacte Ecologique » qui est devenu une base de réflexion sur les mesures à engager pour la mutation écologique de notre société. Ce livre n’est pourtant pas d’une lecture facile.

Un tel effort collectif de compréhension et de réflexion  confirme si besoin était l’incroyable disponibilité et maturité de l’opinion face aux menaces climatiques et écologiques.
Il y a là un inestimable et incontournable message de volonté d’agir ensemble face à l’impératif écologique que personne ne doit et ne peut dorénavant ignorer sous peine de bafouer cette mobilisation et cette espérance.

Au cours de ces dernières semaines, le dialogue avec la plupart des candidats à l’élection présidentielle n’a jamais cessé. En dépit de la pression entretenue par l’hypothèse de ma propre candidature et par la constance de notre exigence sur le fond, ces candidats, pour la plupart d’entre eux, ont maintenu la discussion dans un espace de raison et de respect. Je leur en suis reconnaissant.

Les principaux candidats ont signé le Pacte Ecologique et ils ont commenté, comme nous le leur demandions, nos cinq propositions et nos dix objectifs. Les réponses sont, comme cela était prévisible, différenciées. Elles ont en commun d’avoir été étudiées et travaillées avec le sérieux et l’attention que tout cela mérite.

Au passage, reconnaissons que parmi les rares candidats qui n’ont pas signé le Pacte certains ont argumenté avec sérieux et ont accepté de prolonger le dialogue, ce qui  d’ailleurs a commencé à être fait. Un motif de cette réserve des non-signataires relève de l’ambiguïté qu’ils ont ressenti sur la dimension sociale du Pacte. Nous nous efforçons depuis de leur démontrer que cette dimension est au contraire prédominante dès lors qu’aucun des acquis économiques et sociaux ne pourra résister à la crise écologique et que les premiers exposés à ces aléas sont, comme de coutume, les plus démunis.

La Fondation et son Comité de Veille Ecologique prennent acte des engagements des différents candidats et se réjouissent globalement des propositions des uns et des autres. Ces engagements sont à la hauteur des enjeux et de nos espérances. Nous avons conscience qu’il y a là, si tout cela ne se dissout pas dans l’échelle du temps, une base préalable et nécessaire pour que la France commence à prendre efficacement sa part de responsabilité dans l’inévitable mutation écologique.

Nous avons néanmoins conscience que ces engagements ne constituent en aucun cas un aboutissement mais bien plutôt un point de départ, un socle minimum qui devra rapidement s’enrichir et se nourrir, notamment des propositions d’autres associations environnementales et de tous les acteurs de notre société convaincus de l’urgence écologique.

Au delà des réactions et des engagements écrits des politiques, nous pensons que le Pacte Ecologique a ancré un peu plus en profondeur dans notre société ce défi supplémentaire que sont les périls écologiques et climatiques que nous devons relever ensemble, sous peine de participer en spectateur informé à la marche vers la tragédie globale.

Le Pacte Ecologique est un révélateur d’attentes, d’inquiétudes, d’espoirs et de volontés enfouies ou jusqu’alors peu audibles. Il a soudainement permis de les faire jaillir. Je dirais simplement que le succès du Pacte Ecologique est implicitement le succès de tous ceux qui patiemment et parfois dans l’ingratitude, depuis des décennies, ont ensemencé les consciences. Je pense notamment aux milliers de petites associations qui œuvrent dans l’ombre pour le respect de l’environnement, mais aussi aux élus écologistes qui sur le terrain, localement et régionalement, souvent avec courage et assiduité, s’opposent aux logiques aveugles qui font l’impasse sur le facteur écologique.

Je pense également à ces scientifiques qui rompent parfois avec les conventions et la vanité pour nous rappeler à la prudence et à l’humilité.

Enfin, il faut dire que des évènements sont venus renforcer notre démarche. Le film d’Al Gore fut une utile démonstration pédagogique, le rapport de Nicolas Stern a eu le mérite de donner un prix au problème et à la menace. Les derniers rapports scientifiques sur l’état de nos ressources halieutiques ou sur l’alerte alimentaire ont eux aussi enfoncé le clou de la réalité un peu plus. Encore faut-il ajouter les aberrations climatiques qui se multiplient et viennent chaque jour éteindre les derniers feux de scepticismes. Tout cela a contribué à ce que l’évidence écologique se partage un peu plus à chaque instant.

Si l’on s’en tient aux objectifs du Pacte Ecologique, globalement réalisés, la logique aurait voulu que spontanément je lève l’hypothèse de ma propre candidature.

Pardon, mais dans mon esprit cela n’a pas été aussi simple et je n’ai pas pu me cantonner à ce seul paramètre. Je ne pouvais pas ignorer d’autres réalités, d’autres arguments, d’autres sentiments, y compris les miens, et surtout l’espérance et l’attente profonde exprimées dans le soutien au Pacte et bien au delà de celui ci, même si, dans ce vent puissant, il y a une part de rationnel et d’irrationnel qu’il est difficile de discerner.

Au-delà des mesures parfois techniques proposées dans le Pacte sur lesquelles chaque citoyen n’a pas forcément un avis tranché, il me semble qu’il y a aujourd’hui une fantastique adhésion à l’esprit du Pacte. Esprit auquel je crains que tous les signataires n’adhèrent pas forcément alors que pour moi cet esprit est aussi essentiel, si ce n’est plus, que le reste.
Ce désir sans équivoque de Pactiser et de se Rassembler autour de cet enjeu vital n’a probablement pas été entendu par tous les candidats.

Le Pacte écologique, c’est un désir de réconciliation, un devoir de nous humaniser, d’absoudre le passé pour nous concentrer sur l’avenir. Cet avenir si incertain parce qu’il dépend en partie de nous.

Le Pacte écologique, c’est une volonté de cesser de réduire la politique à quelque chose de mesquin et de vulgaire. Cette logique de partis qui s’affrontent plutôt que de se compléter et qui cherchent à s’exclure.

Le Pacte écologique, c’est une requête pour mettre fin au « théâtre des apparences », à cette société où les jeux de rôles se substituent en permanence aux débats de fond.

Le Pacte écologique, c’est l’affirmation de cette lassitude envers un monde politique trop prompt à l’affrontement où la consigne préempte souvent la conscience. Ce monde où l’on s’obstine à exalter nos bas instincts, à dénoncer nos faiblesses, nos incohérences, pour mieux nous diviser, plutôt qu’à faire jaillir et valoriser ce que nous avons de beau et d’utile en nous et de nous rassembler sur ces énergies positives.

Je crois profondément qu’il y a une majorité silencieuse dans ce pays qui demande aux politiques de mettre fin à ce jeu car, compte tenu de la gravité et de la complexité des enjeux, cela apparaît de plus en plus comme une attitude ou une posture dont on ne peut plus se payer le luxe. Cette indécence peut sans doute perdurer dans l’opulence ou l’abondance mais elle est indigne quand elle se présente au carrefour de crises et de civilisations auquel nous sommes parvenus.

Voilà ce que tout ce mouvement autour du Pacte signifie implicitement.

Quelle que soit la sincérité des uns et des autres, je crains aussi que beaucoup de politiques n’aient pas encore pris réellement la mesure des enjeux, ni de l’échelle de la mutation qui s’impose à nous. Je crains qu’ils pensent que nous avons encore le choix et que tout est encore possible. En clair, je pense qu’ils restent persuadés qu’on peut continuer comme avant, avec la même logique, assortie de quelques traitements marginaux. On a érigé un modèle et on ne le remet pas en cause pour arriver à une logique viable. On continue de se livrer à un acharnement thérapeutique sur un système devenu obsolète qui nous mène à l’asphyxie et à l’impasse planétaire.

La conviction de quelques uns est loin d’être la conversion de tous.

Beaucoup n’ont pas, me semble-t-il, intégré totalement les changements radicaux et en profondeur que notre système et notre économie doivent opérer. Ils résistent encore à l’idée que le monde de la rareté et de la fragilité nous impose de changer progressivement de logiciel. Or, je crois que sans remise en cause profonde, débarrassés du poids et de la rigidité des dogmes, sans assumer ce rendez-vous critique inespéré que l’impératif écologique nous contraint à réaliser individuellement et collectivement, nous n’y arriverons pas. Il n’est pas certain non plus que l’inertie culturelle dans laquelle nous sommes plongés nous permette d’y parvenir.

Je doute que mes interlocuteurs soient parvenus à se convaincre que le facteur écologique et climatique surdétermine tout le reste et conditionne tout projet économique et social.

Je doute aussi, et je souhaite me tromper, que chacun ait pris suffisamment conscience des conséquences géopolitiques et de l’objet de tensions et de conflits supplémentaires que cela représente. Je crains que peu aient admis que nos frontières ne nous mettront pas à l’abri de l’insécurité planétaire que la crise énergétique, climatique et écologique diffuse dans le monde.

Je doute aussi que tous aient conscience que cette contrainte représente aussi une opportunité économique pour ceux qui répondront à cette obligation de créativité et d’inventivité écologique.

Je crains aussi et surtout que, dès lors que l’hypothèque de ma candidature soit levée, chemin faisant, la campagne électorale ne retrouve ses codes, ses priorités conventionnelles, ses joutes et ses fractures usuelles, et ne traite progressivement cet enjeu fondamental que de manière accessoire et non plus de manière essentielle, jusqu’à peut-être l’oublier complètement.

Je sais encore par expérience qu’à l’avenir, ce que le pouvoir exécutif pourra proposer ou tenter en cette matière risquera d’être entravé ou contrarié par un pouvoir législatif qui s’est montré jusqu’à présent peu enclin à ce type de préoccupation. Je sais que la détermination et la conviction du futur gouvernement ne suffiront pas à elles seules si nos députés et nos sénateurs, demain, ne sont pas imprégnés de la même nécessité et n’admettent collectivement que, là plus qu’ailleurs, la somme des intérêts particuliers ne fait pas l’intérêt général.

Je sais enfin que la culture même des partis politiques aujourd’hui n’est pas toujours compatible avec l’esprit et les ambitions du Pacte.

Fort de ce constat et de ces interrogations, depuis quatre semaines, j’ai envisagé toutes les alternatives au delà de mes considérations personnelles. J’ai étudié tous les scénarios possibles avec comme seul déterminant celui de trouver ce qui pourrait être le plus utile à long terme à la cause que nous défendons. J’ai écouté et discuté avec tous ceux qui avaient un avis pertinent sur le sujet et qui me demandaient de le prendre en considération.

Pour ne pas avoir de regret, et surtout celui d’ignorer une évidence qui aurait facilité mon choix, j’ai été au bout de cet exercice n’écartant aucune possibilité, même les plus insoupçonnées, et qui auraient probablement pu modifier radicalement la chronique d’une campagne déjà écrite.

Au final, mon choix s’est réduit à deux alternatives. La première, cohérente avec ma démarche initiale, maîtrisable, convenue, qui me conduit à rester dans mon domaine associatif et à continuer à jouer ce rôle que je crois essentiel de médiateur entre la société civile et politique, entre la communauté scientifique et l’opinion. Un rôle de passeur pour accompagner et entraîner chaque acteur sur le chemin de la mutation écologique.

La deuxième alternative conduit à me déclarer candidat. Ce choix permettrait de profiter des trois derniers mois de la campagne électorale pour tenter de maintenir au dessus de la mêlée prévisible cette indispensable permanence de réflexion et d’exigence écologique, et d’aller chercher une matérialisation politique autant qu’une garantie électorale du Pacte Ecologique. Et, pourquoi pas, de constituer dans la foulée un mouvement, une force susceptible de pérenniser la mobilisation écologique dans les prochains rendez-vous électoraux. Dès lors, un immense domaine d’incertitude s’ouvrait devant moi : un risque énorme et par là même une chance énorme.

Pour trois raisons, j’ai décidé de ne pas être candidat à l’élection présidentielle et de suspendre mon ingérence politique.

La première raison, la plus importante, revient à dire que j’ai choisi de faire confiance à la parole et à l’engagement des candidats et donc ainsi de respecter la parole implicite que je leur avais donnée de lever l’ hypothèse de ma candidature, dès lors qu’ils répondaient avec sérieux à nos propositions.

La deuxième raison qui me pousse à ne pas être candidat est aussi une question d’honnêteté vis-à-vis des militants écologistes. Dans l’aventure d’une candidature, j’aurai entraîné, à leurs corps défendant, tous ceux qui se battent pour la cause. Un échec de ma part, toujours possible, leur serait préjudiciable ainsi qu’à la cause elle même; en d’autre terme, un faible score électoral réduirait  vulgairement à un simple chiffre un enjeu aussi fondamental et magnifique. Il ne faut pas sous-estimer non plus les risques que notre message universel, que beaucoup semblent avoir compris jusqu’ici, soit dénaturé chemin faisant et que sa pertinence ne soit laminée par les mécanismes intransigeants et implacables de la campagne électorale telle qu’elle se déroule habituellement dans notre pays. Le risque que l’on interprète différemment notre engagement et que la forme se substitue une fois encore au fond n’est pas négligeable. J’ai donc pesé le risque qu’une candidature puisse transformer notre légitime exigence en obstination capricieuse et qu’elle soit ainsi susceptible de dévoyer notre démarche. J’aurai compromis alors l’inestimable potentiel qui devrait, quoiqu’il en soit, nous permettre de continuer à peser à l’avenir.

La troisième raison tient au fait que je suis convaincu qu’en restant à l’écart du jeu des pouvoirs, l’élan du Pacte Ecologique va s’amplifier et se transformer en véritable Lobby des Consciences et qu’il aidera à la mutation écologique de la société, en validant et en explicitant sans cesse les choix nécessaires à ce profond changement.

Ayant moi seul fait ce choix, je demande aux candidats d’inscrire dans notre démocratie trois principes supplémentaires, essentiels à mes yeux: Humilité, Mesure et Solidarité.

Je demande et je supplie les candidats de nous montrer dès demain que les mots et les signatures ont enfin un sens,  que le temps ne saurait en aucun cas les rendre obsolète. Si les engagements du Pacte Ecologique devaient s’étioler,  le discrédit de la politique, j’en conviens parfois exagéré, y trouverait une assise légitime sur laquelle, entre autre, l’abstentionnisme ainsi qu’un désarroi dangereux pourraient se développer.

Je leur demande de faire mentir ceux qui ne manqueront de me reprocher une forme de naïveté. Je leur demande de maintenir jusqu’au deuxième tour l’impératif écologique comme le thème majeur du débat et des réflexions. Je leur demande de ne pas oublier la question de la biodiversité tout aussi cruciale que celle des changements climatiques et, j’en profite pour le dire,  qu’ils n’aient pas de scrupules à parler de la condition animale.

Je leur demande qu’ensemble nous travaillons sans à priori sur l’immense domaine de la santé et de l’environnement ainsi que sur la complexe et affolante dynamique de l’artificialisation des sols et de l’étalement urbain. Je leur demande d’organiser dans la foulée des élections, des Etats Généraux de l’Agriculture pour voir comment réconcilier les paysans, la nature et l’alimentation à travers des mécanismes qui favorisent une production de qualité. Je leur demande d’approfondir le chantier de la fiscalité sur le principe d’un déplacement de la fiscalité du travail vers la fiscalité énergétique et environnementale.

Je leur demande aussi et surtout, au delà bien entendu de leurs engagements spécifiques sur nos propositions, de ne jamais oublier la valeur des quatre principes fondamentaux du Pacte Ecologique qu’ils ont signés et que je me dois de rappeler ici.


Les candidats se sont formellement engagés :
  1. à considérer que l’enjeu écologique est une priorité commune qui dépasse les clivages entre partis politiques ; et faire de la France un pays exemplaire en matière de développement durable ;
  2. à faire de la lutte contre le changement climatique et de la préservation de la biodiversité les déterminants majeurs de l’action publique ;
  3. à mettre en place les outils économiques, juridiques, technologiques et éducatifs pour adapter ou réduire notre consommation en fonction des exigences écologiques et sociales actuelles et futures ;
  4. à engager immédiatement une révision fondamentale des politiques de l’énergie, du transport et de l’agriculture ;
Par delà le Pacte lui même, je demande aux dirigeants politiques de ne plus mépriser le peuple de l’écologie d’autant qu’il est probable que celui-ci se confonde bientôt, sous le joug des évènements climatiques, avec le peuple tout court. Je demande de considérer les militants associatifs comme des acteurs et des contributeurs indispensables auxquels la réalité des faits confère une plus grande légitimité encore.
Je leur demande, dans  cette esprit, de recevoir avec la même attention qu’ils nous ont portée les ONG environnementales, et notamment celles regroupées dans l’Alliance pour la planète, pour évaluer également leurs propositions.

J’invite tous les candidats qui ont signé le Pacte écologique - la plupart s’y sont déjà engagés et je les en remercie - à venir le 31 janvier au matin solenniser publiquement leur signature du Pacte écologique, à formaliser leurs engagements et expliquer leurs propositions devant les associations environnementales et 50 signataires du Pacte Ecologique tirés au sort.

Enfin, j’invite les Français à continuer à soutenir le Pacte Ecologique pour nous aider à maintenir cette exigence et cette vigilance. Les 500 000 signataires d’aujourd’hui doivent être un million demain !
J’annonce que la campagne autour du Pacte Ecologique se prolongera jusqu’aux élections législatives et que, dans le même esprit de cohérence et de mobilisation, nous inviterons les députés à souscrire à une formule adaptée du Pacte.

Nous envisageons également après nos propres rendez vous électoraux de tenter de déployer le Pacte au niveau européen.

Au sein du Comité de Veille Ecologique de la Fondation Nicolas Hulot, nous créons un Observatoire permanent pour évaluer et analyser les propositions à venir. Cet observatoire veillera, tout au long de la campagne électorale et après celle-ci, au respect des propositions déjà formalisées par les uns et les autres.

Je veux dire aux 500 000 signataires du Pacte Ecologique et aux membres du Comité de Veille Ecologique ainsi qu’à l’équipe de la Fondation que leur confiance m’oblige et qu’ils peuvent être certains que je mettrai tout mon poids pour que les engagements soient tenus.

Ensemble sortons du cycle de la peur et de la prostration pour entrer dans celui de l’espoir et de la détermination !

Je crois que dorénavant nous avons collectivement compris que nous ne pouvons pas éternellement fuir les faits tels qu’ils sont, que les ignorer est une injure à l’avenir et à la vie.  Prendre en compte la réalité, c’est l’ultime occasion de manifester notre Humanité et d’incarner notre solidarité avec le futur, de consacrer la communauté de destin qui unit tous les êtres vivants et de redonner du sens au Progrès.

Si vous le voulez bien, je m’en tiendrai là pour le moment. De nombreuses occasions se présenteront dans les semaines à venir pour répondre à vos questions.

Je vous remercie !

Nicolas HULOT

Voici le dernier courrier que j'ai envoyé à Nicolas Hulot le 2 avril 2007. Ce courrier conclut cette page définitivement.

Cher Nicolas,

Nous sommes à trois semaines des élections présidentielles. Ma déception reste grande de ne pas pouvoir voter pour toi. Il m'a fallu du temps pour accepter ta décision, pour assumer l'échec de ma propre démarche visant à te convaincre de te présenter pour que l'écologie montre enfin sa vraie force lors de cette élection majeure. Je me suis trompé. La population n'est majoritairement pas prête à nous écouter d'une façon constructive. C'est notre échec à tous.

J'ai de plus en plus le sentiment que cette occasion était la dernière. Ces dernières années, je ne me suis pas seulement intéressé à l'écologie. J'ai aussi pris le temps d'étudier d'autres phénomènes qui nous menacent, comme le possible effondrement des prix de l'immobilier, la possible récession américaine entraînant le monde dans une terrible déflation. Nous ne sommes plus très loin d'une crise similaire à celle des années 1930. Dans quelques temps, les problèmes de chômage seront tellement graves que l'écologie n'aura plus voix au chapitre. C'est pourquoi j'ai le sentiment que les élections de 2007 étaient la chance à saisir. Je crois que nous avons fait ce qui était en notre pouvoir. Moi en écrivant à qui voulait bien me lire et toi en interpellant les candidats.

Si je t'écris maintenant, c'est pour te dire que je me suis à priori positionné pour voter François Bayrou au premier tour des élections. Je dis "à priori" car mon choix n'est pas définitif. Il s'agit d'un choix stratégique, sans grandes convictions et largement influencé par les sondages. Je voulais que tu saches que si tu te positionnes publiquement derrière un candidat, fusse-t-il un  candidat mineur, je tiendrais compte de ton avis et je remettrais en cause mon choix. Je pense que tu as le pouvoir de motiver 1 à 2% de la population en faveur d'un ou d'une candidat. Cela pourrait s'avérer décisif en cas de duel serré. Alors je voulais te témoigner simplement que si tu te positionnes à un moment donné pour un candidat plus qu'un autre, je suis disposé à te suivre. 

Amitié 

Eric Souffleux

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Dernière mise à jour : 2 avril 2007
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