Ma vision de ce qu'il faut faire pour éviter l'écueil de la bulle immobilière.
Que faut-il faire au regard de cette énorme bulle en cours d'éclatement ? Voici ma vision personnelle de ce qu'il faut faire sachant que le krach immobilier arrive à peu près au même moment que la pic de la production pétrolière. C'est ce que j'avais appelé dans une version précédente du site la bulle immobilière d'Olduvai.
La bulle immobilière arrive au plus mauvais moment qui lui soit donné d'arriver. Elle va éclater inévitablement parce que les jeunes générations, dont la caractéristique principale est une démographie faible dans les pays riches, vont devoir opérer des choix stratégiques entre :
A cela s'ajoute des facteurs aggravants :
La liste pourrait probablement s'allonger encore mais je veux garder le fil directeur de cette page qui est que faire pour limiter la casse en se logeant ?
Tout d'abord cette question n'a pas le même sens si on gagne plus de 3000 euros par mois avec un emploi à priori stable ou 1000 euros en étant confronté à la précarité du marché du travail. Les gens qui ont un salaire important sont les seuls qui peuvent réellement se poser la question de savoir s'ils vont louer ou acheter. Les gens qui gagnent péniblement entre 1000 et 1500 euros sont d'office exclus du marché de l'immobilier tel que nous le connaissons aujourd'hui. C'est actuellement notre cas et cela explique une certaine distance que nous avons pris à l'égard du phénomène bulle krach boom de l'immobilier. Ayant compris ce qui se tramait pour les gens endettés sur les 15 ou 25 prochaines années, nous nous sommes nous mêmes exclus du marché immobilier.
Le premier conseil de base est évidemment de privilégier la location à la propriété. Si on a les moyens, on peut très bien choisir de se faire plaisir en investissant en pure perte dans un bien immobilier sur côté. L'essentiel est que vous soyez conscient de l'argent que vous jetez par la fenêtre et que vous n'investirez pas dans de vrais valeurs : des capteurs solaires, une chaudière au bois, une isolation renforcée, une habitation proche de son lieu de travail... Le krach immobilier est enclenché, les loyers vont naturellement baisser dans les mois et années à venir. Il faut juste que les locataires soient patients, comme l'ont été leurs parents et grands parents, et qu'ils s'excluent du marché sur côté de l'immobilier pour le faire plonger plus rapidement.
Si on est locataire, il faut privilégier la location d'un logement proche de son lieu de travail car le secteur où on peut faire le plus d'économie est bien celui des transports. Je ne comprends pas les gens qui achètent un pavillon dans un lotissement et qui doivent travailler à 30 ou 40 km de là. Les frais de transports peuvent rapidement s'élever à 700 euros par mois, alors même que le remboursement de l'emprunt longue durée pour habiter s'élève à 600 ou 900 euros. Si ces mêmes personnes avaient décidé d'habiter plus près en étant locataire plus longtemps, elles auraient dépenser 700 euros (quelques années) dans un loyer et mis de côté 500 euros supplémentaires pour s'acheter la maison de leurs rêves un peu plus tard.
Il faut donc bien penser ce que l'on veut faire dans sa vie et ne pas oublier que tout achat est également un bulletin de vote en faveur de la société que l'on souhaite voir se développer. Si les gens préfèrent investir dans une maison loin de leur lieu de travail, cela aura des implications énormes sur les choix qu'ils feront pour acheter une voiture et cela aura d'énormes conséquences sur leur emploi du temps. Plus les gens habitent loin de leur travail plus ils vont privilégier les voitures neuves pour leur fiabilité et leur confort. Cela imposera à la collectivité davantage de rocades et de routes. Le budget et l'espace réservés aux modes de transport doux seront d'autant plus réduits. Nous regretterons tous ce choix du tout voiture lorsque le prix du pétrole explosera. L'impact d'un tel choix de vie (vivre dans des banlieues pavillonnaires et lointaines alors qu'on travaille en ville) a aussi de grosses conséquences sur l'emploi du temps des ménages. Si on passe 7 heures par jour à travailler, 2 heures par jour à se déplacer (dont 1 heure dans des bouchons) et 8 heures par nuit à dormir, il ne reste plus que 7 heures pour manger, se laver, faire du sport et passer un peu de bon temps devant la télévision (plus de 3 heures par jour en France !). Le résultat de cet emploi du temps de dingue, c'est que les gens n'ont plus le temps de se faire à manger. Ils achètent des produits surgelés et des plats préparés et cautionnent ainsi massivement la grande distribution (avec la pression insupportable qu'elle exerce sur les producteurs) et l'industrie agro-alimentaire (avec pesticides et OGM à volonté). Dans quel monde voulons nous vivre ? Il est clair qu'être pressé d'acheter une maison pavillonnaire en empruntant sur 25 ans et en se condamnant à une dépendance aiguë vis-à-vis de l'automobile n'aura pas le même impact que si on reste modestement locataire d'un petit appartement dans une zone urbaine et à proximité de son travail.
J'ai un principe fort à vous transmettre qui se résume dans cette maxime : Il vaut mieux vivre petit à petit que vivre à crédit. Certes les dernières décennies de croissance économique et d'hyper-inflation ont largement bénéficié à ceux qui empruntaient. Les temps ont changé ! La croissance économique n'est plus possible à l'infini car notre monde a des limites inscrites dans les lois de la physique. Tout le monde ne le perçoit pas avec lucidité et c'est ce qui explique les bulles spéculatives qui se sont formées et qui perdurent malgré les avertissements de certains. La bulle immobilière actuellement est pour une bonne part due à une anticipation d'achat des primo-accédants depuis l'an 2000. Cette anticipation d'achat a été encouragée par des taux d'intérêt historiquement bas. En 2006, il est encore facile d'emprunter de l'argent avec des taux très bas (moins de 4%) mais les prix de l'immobilier sont tels que les nouveaux potentiels primo-accédants comme nous pouvons l'être sont d'office exclus du marché des acheteurs. Il semble que les plus perdus des haussiers ont quand même maintenu le marché en s'endettant sur 30 à 40 ans. Mais problème, aujourd'hui les banques refusent pas mal de dossiers car elles voient venir le retournement du marché. La question qu'il faut se poser quand on achète un bien en s'endettant sur 30 ans est "Est-ce qu'on va être les derniers à payer aussi cher ?" A l'évidence, la réponse est oui ! A moins bien sûr d'avoir guéri le cancer ou de profiter d'une croissance économique complètement folle. Les primo-accédants qui achètent dans les conditions actuelles en s'endettant lourdement seront les derniers à payer leurs toits aussi chers. C'est pourquoi il faut attendre que le marché de la pierre devienne raisonnable pour pouvoir se décider à acheter un bien. Profitons de ce temps d'attente pour mettre de côté et diminuer d'autant plus fortement le besoin d'emprunter de l'argent lorsque nous achèterons. Vivre petit à petit, c'est vivre avec les revenus de son travail, ce n'est pas vivre au-dessus de ses moyens et c'est accumuler un petit capital qui donne une assurance, une liberté et une capacité d'adaptation que n'ont pas ceux qui se sont enchaînés aux banques en vivant à crédit.
Même si je vous invite à rester locataire en ce moment, je pense qu'il faudra que vous soyez propriétaire à un moment donné. Le tout est de ne pas acheter en s'endettant à mort, un bien plus cher qu'il ne pourra être acheté dans 20 à 30 ans. C'est là qu'il faut regarder l'indice de fécondité des femmes qui est l'argument le plus fort en faveur d'un krach immobilier d'une grande ampleur. Nous ne faisons plus assez d'enfants pour occuper tous les logements actuels. La demande sera inférieure à l'offre et mécaniquement les prix baisseront car le parc de logement sera une friche immobilière. Les investisseurs haussiers peuvent dire ce qu'ils veulent de la sécurité de l'immobilier, tant qu'ils n'ont pas vendu leur bien, l'immobilier ne vaut rien ! Revenons à l'idée du paragraphe : il faudra devenir propriétaire un jour. Je pense que le type de logement qui est offert aujourd'hui aux locataires est tellement mal conçu que la location ne doit se faire qu'à minima. Si vous êtes locataire, contentez vous du minimum de surface et choisissez des loyers faibles. Pourquoi cette austérité ? En choisissant de dépenser le minimum dans des logements mal conçus (car construit sur le seul critère de la rentabilité) vous augmenter votre capacité épargnante, capacité qui vous permettra un jour de devenir propriétaire d'une maison construite sur d'autres critères beaucoup plus utile à votre survie future, comme une isolation à base de matériau naturel, une maison conçue comme un capteur solaire, des toilettes sèches, un système de recueil de l'eau de pluie et pourquoi pas une éolienne et des panneaux solaires. C'est dans ce genre de logement que nous devrions tous habiter, pas dans des cages à lapin, sans jardin, sans accès à la lumière et où nous nous sommes rendus dépendants de l'automobile. Arrêtons de cautionner ce projet de société ? N'oubliez pas que notre pouvoir d'achat est un bulletin de vote pour la société de demain. Le fait de devenir propriétaire vous place comme un acteur de cette société nouvelle que nous souhaitons voir naître. Il faudra un jour que vous deveniez propriétaire pour construire ce type d'habitation. La location ne permet pas ce genre d'expérience. C'est pourquoi il faut louer à minima ! Il n'y a qu'une exception à cette règle : c'est quand vous louez un appartement ou une maison conçue autour de la préservation de l'environnement. Là seulement, cela vaut le coup de dépenser plus d'argent dans son loyer car l'essentiel est de limiter son impact sur la planète. L'idée de devenir propriétaire me plaît car elle me donne une liberté mais aussi une responsabilité. La propriété est une idée qui nous protège, nous rassure. Pourtant l'évidence est que nous sommes locataire à vie de notre belle planète : la Terre.
Pour terminer cette page, je vous livre notre projet de vie, un projet qui évite l'écueil de la bulle immobilière et qui inspirera certains d'entre vous.
A l'automne 2004, nous étions à la recherche d'un appartement ou d'une petite maison pour quitter notre actuel appartement que nous louons et qui commence à s'avérer trop petit. Visites après visites, on se rend compte de la folie du marché. Les biens pour lesquels nous nous déplacions étaient des biens pas chers (autour de 60 000 à 80 000 euros). A chaque fois, il fallait venir visiter le jour même et se décider juste après la visite car un autre acheteur pouvait visiter juste après nous. La calculette tournait à plein régime. Combien pouvions-nous apporter ? Emprunter ? C'était la folie ! Heureusement internet m'a fait découvrir le site de Jean-Michel Pouré, http://www.bulle-immobiliere.org au cours du mois de janvier 2005. J'étais assez incrédule au début. Nous ne voyons pas le retournement du marché aussi clairement qu'il pouvait être vu sur le site de la bulle immobilière. En mars 2005, on jette l'éponge, on quitte la population des acheteurs potentiels et on décide de rester locataire.
Un évènement va bouleverser notre vie au cours du printemps 2005. Nous connaissions depuis quelques temps la famille Baronnet qui habite une maison autonome à Moisdon la Rivière (près de Chateaubriand). Nous sommes conviés un week end pour participer à la construction d'une maison révolutionnaire : la maison 3e. Il s'agit d'une maison que l'on peut construire soi même avec 20 000 euros de matériaux. Elle s'appelle 3e pour les 3e de écologique (pour les matériaux et l'impact moindre sur l'environnement), économique (pour le prix et pour les économies en besoin de chauffage) et entre aide (pour le côté lien social et solidaire qu'impose ce type de construction).
Maison 3e : Ossature bois Bonne humeur ! |
Cette maison a bouleversé notre façon de voir l'immobilier. Nous ne pouvons plus acheter n'importe quoi maintenant. Nous sommes devenus hyper exigeants. L'habitat que nous achèterons respectera les principes de la maison 3e. Nous n'investirons jamais dans autre chose. Nous voulons un habitat deux à trois fois moins cher que les habitats conventionnels, pour une très haute exigence environnementale.
Dès lors que nous savions à quoi ressemblera l'habitat de nos rêves, comment arriver à nos fins ? Au cours de l'été 2005, la question restait entière. Je me suis intéressé au prix des terrains et aux possibilités de vivre à la marge pour mieux vivre petit à petit et pouvoir un jour construire notre maison 3e. J'ai découvert une faille. En devenant agriculteur, il nous est permis d'habiter sur nos terres.
La rentrée karaté en septembre 2005 n'a pas autant marché que je le souhaitais. La flambée des prix de l'essence au cours de l'été 2005 (Le baril avait dépassé les 70 dollars) a sérieusement restreint le budget "sport" des ménages. Autour de moi, tous les clubs accusent également d'une baisse sensible. Tous les sports semblent être touchés. Je décide de faire une croix sur une carrière 100% éducateur sportif. Le monde de l'après pétrole ne sera pas favorable aux loisirs. On ne se déplacera pas aussi facilement qu'aujourd'hui pour faire du sport et on en fera probablement suffisamment avec le vélo pour ne pas en rajouter. Je décide donc de faire le virage à 180° vers ce que je pressentais depuis quelques années comme étant ma destinée : l'agriculture. Je suis actuellement en formation pour devenir maraîcher. Nous devrions reprendre une exploitation début 2008. Nous ferons de la vente directe sur un marché et une AMAP en biologique et en utilisant la traction animale.
Nous habiterons alors un mobil-home à côté duquel nous construirons notre maison autonome. Cela prendra plusieurs années. Nous ferons avec notre budget en empruntant le minimum d'argent. Plutôt que de passer du temps à travailler pour rembourser une banque, nous consacrerons du temps à aider des gens comme nous pour qu'ils construisent également leur maison 3e. Le troisième e de entre-aide n'est pas un vain mot. Ce type de construction exige du lien social et de la coopération.
En attendant cette aventure qui débutera début 2008, nous allons rester locataires. Nous déménagerons probablement pour nous rapprocher de nos lieux de travail et de stage. Nous assisterons tranquillement à l'éclatement de la bulle immobilière, en profitant de la baisse des loyers.
En espérant que cette vision personnelle de ce qu'il faut faire pour éviter de perdre trop d'argent dans l'habitat puisse éveiller votre curiosité.
Eric Souffleux
Dernière mise à jour : 6 mars 2006 |