Faut-il instaurer un salaire maximum ?

L'actualité, ce mercredi 28 juin 2006 :

        Anticipant un jugement très sévère de l'opinion sur ces pratiques, tous se sont dits choqués. "Il n'est pas possible qu'un dirigeant de grande entreprise puisse se faire une plus-value de 2,5 millions d'euros sur des stock-options", s'est exclamé le premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, mardi 27 juin sur France 2. "Cette situation est de nature à créer une rupture entre l'entreprise et l'opinion qui est dangereuse pour l'économie", estime François Bayrou, le président de l'UDF, qui a réclamé le 18 juin sur Europe 1 "une réforme du système par la mise en oeuvre de règles déontologiques internes".

        Nicolas Sarkozy, président de l'UMP, a parlé lui, jeudi 22 juin à Agen, d'"outrance (qui est) une insulte à tous ceux qui travaillent dur pour gagner péniblement leur vie". Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF s'insurge : "Il y a une forme d'indignité que la France soit au premier rang européen pour le niveau des salaires de patrons et au 14e en ce qui concerne le salaire médian." Et, Jean-Marie Le Pen, président du Front national, utilise les mots de "scandale" et "insolence" en évoquant la rémunération de certains patrons alors que "le pays connaît un appauvrissement généralisé". A part ce dernier, tous sont favorables à une transparence sur les rémunérations des grands patrons.

        Les autres responsables politiques envisagent des aménagements. Au PS, François Hollande et Laurent Fabius parlent d'"encadrement des rémunérations". Dominique Strauss-Kahn plaide pour la mise en place d'un dispositif "qui profiterait à de nombreux salariés". "On peut imaginer un mécanisme n'autorisant les distributions d'options que si elles concernent au moins un pourcentage donné - et pour le moins élevé - des salariés d'entreprise", explique-t-il. Nicolas Sarkozy et Jean-Marie Le Pen souhaitent aussi un élargissement des stock-options aux salariés "de sorte que chacun soit partie prenante au succès de tous", a souligné M. Sarkozy.

        Au-delà des stock-options, M. Besancenot demande la création "d'un nouvel impôt sur les grandes fortunes qui prenne en compte l'entièreté du patrimoine" et souhaiterait qu'il n'y ait "pas de salaire supérieur à trois fois le smic". M. Cochet fixe, lui, à dix fois le smic ce "salaire maximum". La société de conseils aux actionnaires Proxinvest propose de plafonner les salaires à 240 fois le Smic pour les PDG non fondateurs des entreprises françaises. Soit un maximum de 3,5 millions d'euros brut par an.

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Comment peut-on admettre des rémunérations mensuelles dépassant 10 000 euros pour des métiers peu épuisants quand d'autres sont rémunérés au SMIC à s'user le corps pour des métiers souvent ingrats mais indispensables ? Si on accepte volontiers l'idée d'un salaire minimum, pourquoi ne pas accepter l'idée d'un salaire maximum ?

Un PDG du CAC 40, les 40 premières plus grosses entreprises françaises cotées en bourse, gagne, en moyenne, en un an, ce que percevra un smicard en 366 années. Taxons les patrons !

Vous avez tous entendu ce discours, à consonance chrétienne, qui vise à limiter le revenu des grands patrons. Mais faut-il le faire ? Je vais analyser l'impact qu'aurait une telle mesure sur le monde économique. La réponse à cette question n'est pas si évidente.

Comment fixer un plafond de salaire ? En l'indexant sur le salaire minimum.
Avec quel coefficient multiplicateur ? Trois fois dit l'extrême gauche, 10 fois disent les verts, 240 fois selon un cabinet d'actionnaires.

Si on fixe un plafond pour le salaire, doit-on fixer un plafond pour le patrimoine ?
Le salaire est une mise en réserve du travail. La notion de patrimoine est voisine du capital, il résulte d'une accumulation de revenu non consommé et ayant parfois pris de la valeur avec le temps. Le patrimoine a la particularité de pouvoir se transmettre à ses enfants. Si on veut fixer un plafond pour le patrimoine, parce qu'on souhaite diminuer les inégalités liées à la naissance, cela revient à empêcher les parents d'aider leurs enfants. Est-ce que les gens sont prêts à cela ? Je ne le crois pas même si fixer un plafond pour le patrimoine peut avoir des avantages notamment celui de pouvoir brider les objectifs de richesse de tout le monde. On pourrait imaginer qu'une fois le plafond atteint (200 ou 400 ou 600 fois le SMIC ? Encore un coefficient multiplicateur à mettre au point.) une personne s'arrête de travailler et se consacre à l'éducation de ses enfants, ou à du bénévolat.

Qui est responsable du salaire des patrons ?  Nous tous, les consommateurs.
Il n'y a des gens riches que parce que des gens comme vous et moi contribuent à leur richesse, en achetant les biens ou les services qu'ils produisent. Un joueur de football est riche parce qu'il est adulé par des dizaines de milliers de personnes. Une pop-star est riche parce qu'elle a su remplir des salles de concert avec un public qui a accepté de payé chaque place. Un grand patron de l'industrie automobile est riche parce que nous achetons les voitures de sa firme. On peut même aller plus loin en disant un grand patron de l'industrie automobile est bien plus riche qu'un vendeur de vélo couché parce que les consommateurs préfèrent l'automobile au vélo couché. Les richesses des uns est permises par le bon vouloir des autres. Dans une économie de marché, les patrons des patrons restent les consommateurs.

Comment devenir riche ?
Comme on pu le voir, dans une économie de marché, ce sont les consommateurs qui décident. Pour s'enrichir il faut donc proposer un produit ou un service qui intéresse le plus grand nombre de consommateur. Il faut les séduire. On peut aussi exercer un métier rare que les autres ne savent pas ou ne peuvent pas faire. C'est le cas des joueurs de football international. C'est le cas des artistes du cinéma ou de la musique. Dans tout les cas il faut rencontrer son public, son marché, sa clientèle. La dernière façon de devenir riche est de naître riche. Se pose alors la question de l'héritage, doit-on redonner à la collectivité tout ce qui appartenait au défunt ou doit-on le laisser à ses enfants en ponctionnant un impôt ? La question reste ouverte mais on arrive toujours à cette question qui me tourmente :

L'argent des patrons est-il mieux gérer que l'argent de l'état ? 
A priori, l'argent des patrons est bien mieux géré que l'argent des collectivités car je connais peu de collectivités qui ne soient pas déficitaire. L'état français est par exemple déficitaire depuis les années 1970. Connaissez-vous une grande entreprise privée déficitaire depuis tout ce temps ? J'en connais aucune. Qui dit déficit depuis 35 ans, dit déficit cumulé depuis la même période. C'est tout ce déficit cumulé qu'on appelle la dette nationale. Elle s'élève à plus de 1100 milliards d'euros et on ne rembourse que les intérêts de cette dette. Je ne comprends pas comment l'état français trouve encore des gens pour lui prêter de l'argent. Il y a bien un jour où la maison France ne remboursera plus et où les derniers à avoir prêté de l'argent ne retrouveront jamais leur mise. L'état sera alors en cessation de paiement, les fonctionnaires ne percevront plus leurs salaires et l'économie sera pour très longtemps dans une phase de récession. 

L'état est-il plus écolo que les patrons ?

Qu'est-ce qui se passe s'il n'y a plus de riches dans le monde ?
Les métiers du luxe disparaissent, l'art monumental disparaît, les gens travaillent moins tant que les machines fonctionnent et travailleront plus dès qu'elles tomberont en panne car il n'y aura plus personne pour avoir la capacité d'investir..
On perd une capacité d'investissement du privé. On est donc obligé de fonctionner avec des capitaux provenant de l'état, des contribuables, et on retombe sur les questions précédentes.

Qu'est-ce qui se passe s'il n'y a plus de riches en France ?
Aujourd'hui, les riches ont tendance à voter avec leurs pieds en quittant le pays qui ne leur fait pas bon accueil, ce qui évidemment ne nous enrichit pas, mais fait le bonheur de la Suisse, de la Belgique, de la Grande-Bretagne, de l'Espagne, etc...

Les patrons sont-ils trop payés par rapport aux salariés ?
Si les salariés s'estiment exploités, c'est que leurs patrons gagnent trop. Un salarié qui voit que son patron bosse comme un chien pour ne rien gagner courbera l'échine. A l'inverse si un salarié voit son patron faire peu et gagner beaucoup, il lui sera légitime d'exiger une meilleure répartition des richesses de l'entreprise. Le raisonnement pourrait tenir la route, mais le salarié ne voit la condition de son patron que dans le présent et il ne voit pas quelle a été sa condition dans le passé. Est-ce anormale que sur la fin de sa vie, le patron d'une entreprise qu'il a construit durement pendant l'âge adulte se repose sur ses ouvriers et gagnent beaucoup comparativement au travail fourni ? Je pense que non. Si un salarié s'estime exploité, il faut qu'il tente sa chance lui aussi, qu'il créé son entreprise, qu'il se mette au service du marché. Certes il sera empêcher car la place est déjà prise, car le brevet a été déposé. Donc s'il faut limiter le salaire des patrons, il faudra limiter la taille des entreprises et limiter la durée de protection des inventions.

Les surprises d'un plafonnement du salaire maximum ?
Cela serait la fin du loto nationale. Impossible de gagner 60 millions d'euros si on vous dit que vous ne pouvez pas gagner dans une année plus de 10 fois le SMIC. Le loto nationale serait remplacé par le loto municipal !

Faut-il instaurer un salaire maximum ?

Eric Souffleux

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Dernière mise à jour : 28 septembre 2006
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