L’aéroport de Notre Dame des Landes, un enjeu climatique.

        Le dossier de l'aéroport de Notre Dame des Landes a été accepté par le gouvernement. J'aimerais rappeler quelques ordres de grandeur pour exprimer mon désaccord avec cette décision.
        En 2001, les voitures particulières françaises ont consommé environ 25 millions de tonnes de pétrole, conduisant, à peu près, à la même quantité d'émissions de gaz à effet de serre en équivalent carbone. La même année, notre pays a servi près de 6 millions de tonnes de kérosène aux avions décollant des aéroports français, conduisant, parce que l'avion vole à haute altitude, à des émissions de gaz à effet de serre de l'ordre du double, soit 12 millions de tonnes équivalent carbone. En d'autres termes, les avions décollant des aéroports français engendrent aujourd'hui la moitié des émissions des voitures particulières des 60 millions de Français. Sur les 30 dernières années, la consommation de carburant des avions a augmenté de 4,5% par an, en moyenne, contre 2,4% par an pour les voitures particulières. Un seul vol international représente pour chaque passager plus de la moitié de la consommation annuelle d’une voiture particulière.
        Chacun comprendra donc facilement que tout encouragement du transport aérien n'est pas compatible avec la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, désormais objectif affiché du gouvernement.
        Enfin, chacun sait qu'il est plus facile de ne jamais fumer que de s'arrêter ensuite, et de même il est bien plus facile de ne jamais construire cet aéroport que de devoir expliquer ensuite qu'il vaudrait mieux ne pas prendre l'avion pour préserver le climat.
        Aucune solution technique n'est en vue pour supprimer les émissions des avions, pas plus l'hydrogène que le reste contrairement à ce que nombre de journalistes semblent - ou aimeraient - croire. En effet, la production d’hydrogène nécessite une source d’énergie énorme, et la seule qui puisse permettre une démocratisation de l’aviation est le nucléaire. Mais personne ne souhaite une multiplication des centrales atomiques pour des besoins aussi futiles qu’aller se dorer la pilule aux antipodes.
La canicule a révélé l’étendue d’une catastrophe climatique. M. Raffarin, ces derniers mois, a expliqué à plusieurs reprises qu'il fallait diviser par quatre les émissions françaises d'ici à 2050. Il a d'autant plus raison que, le monde a ses limites, si nous ne nous chargeons pas nous-mêmes de faire baisser les émissions, c'est un ou plusieurs processus de régulation qui se chargeront de le faire à notre place (épidémie, récession, guerre, pénurie, etc, toute combinaison pouvant bien sûr être imaginée). Personne ne peut exclure que ces rétroactions violentes ne prennent place dans les décennies à venir.
        En guise de conclusion, je ne vois pas bien ce que nous reprochons aux USA qui ont refusé le protocole de Kyoto avec franchise. Oublions les discours, et regardons les actes : ces dernières années, nous avons " spaghettisé " la France avec les autoroutes, étendu Roissy, amélioré les rocades autour des grandes villes, supprimé la vignette, baissé la TIPP, autorisé les grandes surfaces et leurs parkings aspirateurs à voiture en sortie de ville ; bref nous avons fait à peu près tout ce que nous pouvions pour encourager le transport routier et aérien. Pourquoi Diable devrions nous souhaiter par ailleurs qu'il baisse au nom de la lutte contre le changement climatique ? Et pourquoi baisserait-il spontanément, alors que nous continuons à mettre en chantier toutes les infrastructures nécessaires pour qu'il augmente, et les émissions avec ?
        Le gouvernement français doit assumer les paroles de M. Chirac qui a déclaré au dernier sommet de la Terre que " Notre maison brûle ". L’avenir climatique de notre planète est un enjeu majeur et il vaut bien l’abandon de ce projet d’aéroport.

Eric Souffleux

Les chiffres sur les consommations de carburant et les augmentations proviennent de l'Observatoire de l'Energie (Ministère de l'Industrie).

Voici maintenant le texte, tel qu'il a été publié dans le Presse Océan :

 

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Dernière mise à jour : 29 janvier 2006
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