Bulle Immobilière : disons la vérité.


        L'éclatement de la bulle immobilière n'est pas un mythe, c'est déjà la réalité. Les preuves s'accumulent et c'est avec étonnement que je constate que le Ouest France participe insidieusement à la propagande de la bulle.

        La bulle, commençons par la définir : il s'agit d'un monde imaginaire dans lequel les prix de l'immobilier ne peuvent plus baisser, un rêve déconnecté de toutes réalités physiques, économiques et démographiques. La bulle et la flambée des prix qui la caractérise justifie des investissements massifs dans la pierre. Le problème est que beaucoup de ces investissements sont réalisés en contractant d'énormes dettes. La bulle immobilière est donc un rêve dans lequel nous vivons au-dessus de nos moyens.

        Un tel rêve ne pourrait pas être entretenu s'il n'y avait l'existence de mythes. Il serait long de tous les exposés. Je vais simplement me baser sur un mythe entretenu récemment dans le Ouest France : le mythe des étrangers avec en particulier les anglais qui s'arracheraient nos vieilles pierres. En fait depuis 5 ans, les transactions immobilières faites avec des étrangers représentent une petite part de toutes les transactions du secteur. Pas de quoi justifier une augmentation des prix de l'ordre de 70%.

        Concernant ce mythe des étrangers, je retiens un article paru dans le Ouest France du 5 juillet 2005. Le gros titre de l'article était hôtels et campings "Les anglais boudent la région" et l'article commence par "Ils sont toujours de plus en plus nombreux à chercher de vieilles bâtisses pour vivre à demeure. Mais de moins en moins nombreux à venir en vacances." Qu'est-ce que vous cherchez à protéger avec ce double langage ? Vous êtes censé parler du tourisme et vous rassurez les promoteurs de la bulle.

        En ce moment le double langage caractérise tous les articles traitant de l'immobilier. Dans le Ouest France du 6 juillet 2005 il y a un article au titre éloquent "L'immobilier reste scotché à la hausse" et qu'est-ce que je lis à la fin de cet article ? Le délai de vente s'allonge, les stocks de biens à vendre augmentent et surtout les loyers baissent. Encore une fois, qu'est-ce que vous cherchez à protéger ? L'information qu'il faut retenir d'un tel article est que l'immobilier amorce son krach.

        Maintenant, parlons le langage de la vérité. Plus rien ne justifie le sacrifice de jeunes primo-accédants qui prennent la décision de s'endetter sur 30 ans, histoire de ne pas jeter par la fenêtre l'argent d'un loyer, alors que le logement pourrait devenir pratiquement gratuit dans les 5 ans à venir. Il y a des éléments de fond qui imposent un retournement du marché. Le plus fondamental est la démographie qui plonge (1.4 enfants par femme en Europe). Dans 30 ans, l'Europe pourrait perdre 50% de sa population. Il y aura des logements inoccupés partout et l'offre étant très supérieure à la demande, les prix ne peuvent aller que dans le sens d'un effondrement durable.

        Autre facteur fondamental : des choix stratégiques s'opèreront dans l'avenir. Les jeunes générations ne pourront pas payer les retraites des parents, rembourser la dette de la France, s'adapter au changement climatique, à l'épuisement des ressources énergétiques fossiles et en même temps s'acheter un logement à 5000 euros le m².

        Qui faut-il protéger ? Les plus grandes victimes de la bulle sont les jeunes couples écrasés par les loyers qui se décident à acheter un bien en empruntant sur 20 à 30 ans. Quand on analyse l'efficacité avec laquelle agissent les acteurs de la bulle (les agences immobilières, les banques, les médias et les politiques), pas étonnant qu'ils prennent une telle décision.

        Qui sera sacrifié ? Il ne s'agit pas de tomber dans la sinistrose mais le krach en cours mérite qu'on s'y prépare pour qu'on y survive tout simplement. Les agences immobilières qui ont poussé comme des champignons ces dernières années vont mettre la clé sous la porte assez rapidement. En Allemagne (le krach est international), le métier d'agent immobilier n'existe plus. Les biens immobiliers sont maintenant vendus aux enchères à des prix qui touchent le fond (5000 euros pour acheter une maison de 80 m²). Tout le secteur du bâtiment sera sérieusement touché et il est probable que l'ensemble de l'économie en subisse les conséquences car tous les primo-accédants des années 2000 à 2005 devront faire face à des remboursements bancaires énormes alors qu'en parallèle ceux qui auront choisi la location se logeront pour presque rien.

        Pour conclure sur ce long texte (mille excuses), si vous êtes candidat à l'acquisition, posez-vous cette unique question "Vais-je être le dernier pigeon à payer aussi cher ?". Si vous êtes en location, demandez une baisse de votre loyer, les appartements construits avec les mesures fiscales De Robien vont inonder le marché dès le mois de septembre et beaucoup de candidats à la location sont aujourd'hui prisonniers des banques en devenant des primo-accèdants. N'hésitez pas à déménager si votre propriétaire ne veut rien entendre. Pour lui baisser le loyer sera toujours mieux qu'un logement vide.

Ma devise personnelle : Il vaut mieux vivre petit à petit que vivre à crédit.

Eric Souffleux, 26 ans, un jeune qui refuse de se sacrifier sur l'autel de la bulle immobilière.

Cet article a été publié dans le Courrier des lecteurs du Ouest France du 22 juillet 2005.

Cette publication est intéressante car on voit comment les médias peuvent nous manipuler en modifiant les courriers qu'on leur envoie.

Première modification : le titre. Au lieu de "Bulle Immobilière : disons la vérité" ils ont mis "Bulle immobilière : dire tout". Peut être qu'il y a une question de place mais cela ne fait pas terrible.

Seconde modification importante : ils ont supprimé 3 paragraphes où j'attaquais de front la rédaction du Ouest France. Les médias n'aiment pas quand on les critique. Ils s'arrangent toujours pour avoir le bon rôle. Ils devront rendre des comptes aux générations futures lorsque celles-ci leur demanderont "Vous qui aviez le pouvoir de l'information au moment le plus critique de l'histoire de l'humanité et probablement de la vie, qu'avez vous fait pour suggérer aux gens davantage de sagesse et de modération dans leur comportement ?" 

Troisième modification notable : ils ont remplacé le terme effondrement par baisse dans le deuxième paragraphe de la publication. Comme quoi même au niveau du courrier des lecteurs il y a une censure pour maintenir la tendance haussière.

Quatrième modification, peut être par manque de place pour celle-là : ils ont supprimé dans le troisième paragraphe cette formule : "des choix stratégiques s'opèreront dans l'avenir

Mais globalement l'article a du piqué au vif les acteurs de la bulle immobilière en apportant notamment des nouvelles de l'Allemagne. Des gens m'ont appelé pour en savoir davantage, pour savoir qui j'étais et d'où je tirais mes informations. Pour beaucoup, cet article aura été une confirmation de ce qu'ils espéraient, un déclencheur pour résister à la tendance haussière.

Une coïncidence particulière : le Ouest France a publié en page 5 un article sur la démographie, ce qui vient appuyer mon courrier puisqu'il est question d'un effondrement de la démographie partout en Europe sauf en France. Il faudra recourir à une immigration massive pour limiter la casse, sauf dans l'immobilier parce que les populations importées seront incapables de se payer un logement à 5000 euros le mètre carré. Bref, les médias essaient par tous les moyens de gonfler la bulle mais la réalité les dépasse totalement.

Eric Souffleux

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Dernière mise à jour : 29 janvier 2006
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