Le Clan des Centaures, Claude Auclair 1/05/1943 - 20/01/1990 France


Claude Auclair a entamé sa carrière à la fin des années soixante avec des illustrations de science-fiction, des débuts difficiles à concevoir pour tous ceux qui sont davantage familiers de sa production ultérieure, qui le verra évoluer vers un style nettement plus réaliste et terre à terre. En quelques années, la vision du futur développée par Auclair devient de plus en plus sinistre, une tendance qui culmine avec l'univers hostile et apocalyptique de la série 'Simon du Fleuve'. 
Après avoir mis un terme à cette dernière, Auclair se concentre sur les sociétés d'avant l'ère moderne et consacre des albums entiers à l'esclavage du peuple africain ('Le Sang flamboyant') ou à l'histoire de la Bretagne ('Bran Ruz').
Auclair décède prématurément en 1990 à Nantes.

Le Clan des Centaures est une bande dessinée que j'ai découvert en 2002 en la lisant à la médiathèque de Nantes sur les conseils d'un ami. Son auteur, M. Claude Auclair, raconte l'histoire de Simon du Fleuve, un être perdu dans un monde apocalyptique. Cette bande dessinée m'a paru exceptionnelle dans son réalisme et nous pouvons tous regretter la disparition de M. Auclair qui nous laisse pour héritage ce terrifiant présage sur ce que pourrait bien être notre avenir à tous.

Étant donné que cette bande dessinée est introuvable dans le commerce (à l'exception des bouquineries d'occasion et des grandes bibliothèques comme celle de Nantes), j'ai choisi de publier un extrait de cette bande dessinée qui décrit comment l'apocalypse est arrivée. Juste après ce cours extrait, j'ai repris le texte de M. Auclair en le plaçant dans un contexte actuel.

Il existe une suite du même auteur à cet album : les esclaves (1977), mailis (1978), Les pèlerins (1978), Cité N.W. Num.3 (1979), L'éveilleur (1988), Les chemins de l'Ogam (1988), Naufrage T1 (1989) et Naufrage T2 (1989). Les quatre derniers cités ont été dessinés par Auclair, mais les textes ont été écris par Riondet.

Extrait du clan des Centaures, bande dessinée écrite par Auclair en 1976 (Edition Lombard chez Dargaud).

Cliquez sur les images pour les agrandir et pour pouvoir lire le texte des bulles.

Voici maintenant comment j'ai adapté le texte de cette bande dessinée au contexte actuel :

Comment en sommes nous arrivés là ?

Oh, il faut remonter assez loin pour cela. Ce que j’en sais, c’est que les symptômes ont commencé à se manifester vers les années 2004-2007, je crois. 

Les jeunes de différents pays du globe, inquiets de la dégradation générale de l'environnement, ont demandé à se faire entendre vainement.
Une grande puissance d’alors livrait une lutte économique sans merci au reste du monde, soutenue dans son action par les autres puissances démocratiques qui profitaient un peu du gâteau. Elles s’engluaient dans des guerres sans fin, où les peuples agressés luttaient vaillamment pour leur dignité d’hommes libres. 

Or pendant ce temps les ressources énergétiques, de la planète s’amenuisaient. Des cris d’alarmes s’élevaient de toutes parts. Des peuples comprirent alors qu’ils possédaient une arme de choix, un liquide qu’ils tiraient de la terre : le pétrole, et sur lequel était basée presque toute l’économie de ces autres pays hyper consommateurs. Nous avions atteint le fameux pic de Hubbert qui signifiait que le pétrole deviendrait de plus en plus cher. Ils l’utilisèrent, étant les plus gros producteurs à des fins politiques en réduisant son débit. Les économies mondiales s’en trouvèrent tellement ébranlées qu’il s’ensuivit des troubles sans nombre. Cette confusion dura pendant des années. Des conflits éclatèrent en différents points du globe pour s'approprier les richesses qui s’y trouvaient.

Il me faut schématiser, car la situation mondiale de cette époque-là était d’une complexité sans nom. Partout , dans chaque nation, des minorités nationales se réveillaient et se lançaient dans la lutte contre les agresseurs. Les grandes puissances, empêtrées dans leur contradictions idéologiques armées jusqu’aux dents d’engins atomiques, capables de les rayer mutuellement de la carte de la planète, réfrénèrent leurs désirs de domination et évitèrent à grand peine l’holocauste.

Les gouvernements incompétents et les citoyens indifférents accentuèrent la confusion. Les structures qui se désagrégeaient finirent bientôt par éclater, tant la désaffection des populations et leur lassitude étaient devenues grandes. Des troubles éclataient partout, les services du maintien de l’ordre étaient débordés. Ce fut la chute et c’est dans les pays les plus évolués matériellement qu’elle fut le plus cruellement ressentie. Les changements climatiques apportèrent des difficultés supplémentaires : sécheresse dramatique l'été, inondation terrible à l'automne, arrivée de nouvelles maladies, insalubrité... et tout ceci avec une grande variabilité, des années très sèches et chaudes suivies d'années très très humide et parfois polaire l'hiver.



 Il fallut réapprendre à vivre, sans énergie fossile et en s'adaptant à de nouvelles conditions climatiques de plus en plus défavorables. Chacun chercha à sa manière. La traction animale est redevenue une nécessité pour faire face à la disparition des tracteurs. On vit des exodes massifs vers les campagnes, puis des regroupements s’opérer, une vie communautaire s’instaurer. Les agriculteurs sédentaires cultivant pour les pasteurs nomades et les pasteurs élevant pour les sédentaires. Ce fut souvent difficile, mais la volonté de vivre était la plus forte. Seuls survécurent les mieux organisés, car les bandes de pillards vomies par les villes, ou du moins ce qui en restait, écumaient de plus en plus souvent les campagnes.
Dans différents points du monde, des noyaux politiques se formèrent et prirent contact entre eux, ayant pour volonté commune que cesse cette régression de l’humanité, et que celle-ci renaisse enfin sur d’autres bases. Un gouvernement mondial finit par se créer, chaque ancienne capitale devint centre administratif et prit le nom de cité. Celle dont nous dépendons encore actuellement se nomme cité III, une mégapolis selon les écrits de ces temps-là. Ces cités ne sont pas belles à voir. Entourées de champs de ruines, elles sont le repère de snipers et de bandes armées qui sème la mort entre les gravas.

On réunit tous les moyens techniques utilisables, ainsi que les ressources énergétiques encore exploitables, pour les mettre à disposition de ces gouvernements locaux. Des bases avancées furent également créées pour aider au regroupement des populations, mais ces bases avaient un caractère militaire, et la méfiance – voire l’hostilité – fut grande, on se souvenait du passé… 
Des heurts violents eurent lieu, surtout avec les nomades qui avaient réappris la liberté et refusaient toute intégration.

Parallèlement à ces événements, toutes les intelligences disponibles furent regroupées, puis affectées à différents postes de recherche ou de réalisation. Leur mission était soit de trouver des solutions pour nous sortir de l’ornière dans laquelle on nous avait précipités, soit de relancer certains secteurs de l’industrie, les moins touchés et les plus indispensables. Plusieurs cités avaient fait sécession avec le gouvernement central. Des chefs, soutenus par des troupes mercenaires, s’instituaient « maîtres des cités ». Les épurations devenaient quotidiennes, des collègues, des amis disparaissaient mystérieusement. Certains d’entre nous prirent conscience qu’en fait, sous des prétextes humanitaires, nous réarmions des dirigeants qui iraient, dès qu’ils le pourraient, réinstaurer un ordre totalitaire.
C’est l’époque où je vous ai connus toi et ton père. Lorsque ma femme qui était aussi ma collaboratrice est morte des suites d’une longue maladie apportée par des moustiques tropicaux, j’ai pris ma décision.
Grâce à des complicités, car nous étions étroitement surveillés, j’ai fui avec Estelle, alors âgée de deux ans…

Eric Souffleux, nantais de 26 ans.

Pour en savoir plus sur le monde de Simon Du Fleuve, visitez cette page très complète sur l'acuité de M. Auclair sur notre avenir.

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Dernière mise à jour : 29 janvier 2006
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