L'énergie hydrolienne, une énergie qu'il ne faudrait pas négliger.

     
Un projet intéressant de la société Hydrohelix, une rangée d'hydroliennes pour capter la force des courants de marée dans l'embouchure des fleuves.

Comment le courant peut-il faire de l'électricité ?


Dans un futur peu éloigné, des pétroliers et des paquebots partageront la mer avec des champs d'hydroliennes, devenus des paradis pour les poissons.
( Illustration tirée du site http://www.floridahydro.com )

Un bémol cependant : Peut-être faudrait-il remplacer les bateaux mus par des combustibles fossiles par d'autres types de bateaux plus vertueux ? 

Les courants marins représentent une énergie fabuleuse qui contrairement aux vents sont constants et prévisibles. C'est un avantage déterminant par rapport aux autres énergies renouvelables intermittentes. 

Il existe deux grands types de courants : les courants marins situés plus ou moins au large des côtes et les courants de marée (ou de marnage) que l'on rencontre dans l'embouchure des fleuves et près des côtes. 

Pour capter cette énergie, il faut placer des hélices ou des turbines dans l'axe de ces autoroutes de la mer, c'est ce qu'on appelle les hydroliennes (On rencontre aussi les appellations hydrohélienne et aussi éolienne sub-aquatique). 

Cette source d'énergie commence seulement à être étudiée en Angleterre, en Italie, en Norvège et aux États-Unis. En France, EDF a comme projet d'en installer dans le Cotentin et en Bretagne. Une entreprise bretonne développe un projet d'hydrolienne pour capter les courants de marée. Il ne faut pas oublier l'usine marée motrice de la Rance qui depuis 1960 permet aussi de capter l'énergie des courants de marée à partir d'un barrage. Une page est entièrement consacrée à l'énergie marée motrice ainsi qu'à l'énergie de la houle.

Voici ci-contre, une vue d'artiste qui pourrait bien représenter le monde sous-marin en Floride dans quelques décennies. 

Les sites favorables sont des sites côtiers permettant l'encrage des hélices. On dispose de deux possibilités pour fixer les hydroliennes. Soit on monte les hélices sur des supports verticaux posé sur le fond (ce qui ressemble aux éoliennes), soit on attache par des câbles un ensemble générateur / turbine qui flotte à mi-profondeur pour capter au mieux l'énergie du courant et ne pas gêner la navigation de surface.

Le principal problème est causé par la corrosion de l'eau de mer. Nous disposons cependant de revêtements anti rouille très performants et ce vieux rêve technologique pourrait bien devenir la réalité dans peu de temps.

Une hydrolienne située dans l'embouchure d'un fleuve ou près des côtes pour le capter les courants de marée.

Hydrolienne côtière fixée sur le fond par une structure métallique rigide

Une turbine hydrolienne flottant à mi-profondeur et éloignée des côtes pour exploiter efficacement les courants marins

Regardons maintenant où nous pourrions rencontrer des sites favorables à l'implantation d'hydroliennes. Tous les courants de surface peuvent être exploités, voici donc la carte mondiale de ces courants.


Objections à l'implantation des hydroliennes

Les hydroliennes rencontrent comme les éoliennes offshore une forte opposition des pêcheurs qui craignent de casser leurs filets dans ces installations métalliques. En réalité seuls les gros chalutiers se verraient interdire l'approche des hydroliennes, les petits bateaux de pêche disposant de ligne et de casier pourront accéder à ces zones devenues de véritables sanctuaires à poisson. 

Il faudra aussi tenir compte des militaires qui pourraient causer de gros dommages avec les sous-marins et des routes maritimes habituellement empruntée par la marine marchande.


Un projet d'hydroliennes au large du Cotentin et de la Bretagne, EDF s'intéresse aux courants marins.

Des prototypes d'hydroliennes seront immergés dans le Cotentin et en Bretagne. L'objectif ? Produire de l'électricité à partir des courants marins. Pour EDF, la première étape du projet consiste à mesurer le potentiel énergétique de ces courants.
D'ici à quelques années, des champs d'hydroliennes pourraient fleurir à proximité des côtes de Bretagne et du Cotentin. C'est dans la Manche , en effet, que se concentre l'essentiel du potentiel de cette forme d'énergie. L'hydrolienne est à l'eau ce que l'éolienne est à l'air. Le principe est simple. La force des courants marins actionne les pales d'un ou de plusieurs rotors. L'énergie mécanique produite par la rotation des pales est transformée en énergie électrique.
Ces « éoliennes sous marines » sont attractives pour plusieurs raisons. « D'une part, la production d'électricité est prévisible, puisque les marées peuvent être calculées à l'avance. Par ailleurs l'espace nécessaire pour ces installations et l'impact sur l'environnement sont réduits. Enfin l
es courants marins constituent une ressource énergétique intéressante car la densité de l'eau est importante (1.000 fois supérieure à celle de l'air). », explique Cyrille Arbonnel, chargé du projet hydroliennes à EDF.
Hier, des courantomètres ont été installés près de la pointe de Barfleur, dans le Cotentin. Ils vont mesurer, pendant quinze jours, l'énergie produite par les courants marins.
Immergés entre 20 et 50 mètres de profondeur, ils seront signalisés en
surface par des bouées lumineuses. La même opération sera renouvelée, au printemps, sur les côtes bretonnes. Cyrille Arbonnel estime que « 3 000 mégawatts peuvent être installés en France. Soit 20 % du potentiel théorique européen, ce qui est important. L'objectif à terme est la mise en place d'ici 2008 d'un site démonstrateur industriel. »
Le temps de charge d'une hydrolienne, c'est-à-dire le temps durant lequel elle produit de l'électricité dans une année, sera de l'ordre de 40 %. Par comparaison, une centrale nucléaire comme Flamanville produit 2 600 mégawatts quasiment sans arrêt.
Le projet est européen. Déjà, la Grande-Bretagne , la Norvège et l'Italie testent des prototypes. En France, l'Institut national polytechnique de Grenoble et la société Hydroélix Énergies de Quimper travaillent sur ces technologies. Mais on est encore loin de la phase industrielle. « Pour l'instant, il s'agit de doter EDF des éléments pour décider de l'implantation d'un site pilote. La prochaine étape consistera à s'associer avec des constructeurs de machines. » EDF croit au développement des énergies marines, mais ne veut pas brûler les étapes, échaudée par les critiques formulées à l'encontre des éoliennes. « Tout cela doit se faire en concertation avec les acteurs du monde maritime. À commencer par les pêcheurs. »
Le premier site pilote d'hydroliennes devrait être implanté en 2008. Pas forcément là où le courant est le plus fort, comme dans le raz Blanchard, où sa vitesse atteint 6 à 10 m par seconde. « Nous considérons qu'à partir de 2 m par seconde un courant est suffisamment fort pour faire fonctionner une hydrolienne. » À terme, des parcs de 10 à 50 machines pourraient coloniser certaines zones et compléter l'offre énergétique, notamment en bout de ligne, comme en Bretagne. « Il n'est pas exclu de décentraliser quelques unités pour alimenter des îles par exemple. »
Mieux, avec cette technologie EDF espère se placer à l'exportation. Les énergies renouvelables intéressent les pays en voie de développement.

(source de ce paragraphe : Ouest France du vendredi 7 janvier 2005 et dépêche AFP du 6 janvier 2005)


Utiliser l'énergie du Gulf Stream, un projet est en cours près des côtes de Floride aux États Unis.

Au large des côtes de Floride, le Gulf Stream se trouve à moins de deux kilomètres du rivage. Une zone de 100 km sur 25 km, situées à 5 km du rivage est considérée comme idéale pour la production d'électricité. 

Cliquez ici pour agrandir l'image.           Cliquez ici pour agrandir l'image.    

Les turbines seraient immergées à 60 m de profondeur. Le Gulf Stream a une vitesse quasi-constante de 8 km/h. 
L'eau du Gulf Stream étant 832 fois plus dense que l'air, l'énergie cinétique est équivalente à celle de vents de 230 km/h. 
Avec un débit total de 14000 m3 d'eau par seconde, le Gulf Stream constitue une source d'énergie renouvelable quasiment illimitée, qui a pour origine le régime des vents entre l'équateur et les pôles dû aux écarts d'apports solaires et à la rotation de la terre. 
Le plan de développement prévoit un premier parc de 1500 MW pour un coût total équivalent à 650 millions d'euros et un temps de retour de l'investissement de quatre ans. Au total, le projet prévoit 3520 turbines de 2.4 MW chacune en moyenne, pour une production totale de 8.44 GW. Remplacer l'équivalent de 8 réacteurs nucléaires en investissant si peu, voilà une énergie que les antinucléaires devraient défendre avec force.
Pour la fourniture d'électricité au réseau continental, le système est limité à des zones côtières pour éviter de transporter l'énergie par des câbles sous-marins sur de grandes distances. En revanche, le système pourrait aussi être utilisé pour produire de l'hydrogène par électrolyse de l'eau. Dans ce cas, les turbines peuvent être situées dans une multitude de sites dans les océans où existent des courants marins. Le coût de production estimé serait inférieur au seuil de deux dollars par kilogramme fixé comme objectif par le département américain de l'énergie.

Une turbine hydrolienne hors de l'eau.

 


Une première hydrolienne dans les eaux glacées de la Norvège

Une usine marémotrice d'un nouveau genre fourni ses premiers Kilowattheures fin septembre 2003 dans le bras de la mer de kvalsund, à l'extrème Nord de la Norvège. Il s'agit d'une version sous-marine de l'éolienne, une hydrolienne de 20m de diamètre installée par 45m de fond. L'hélice est entraînée par la force du courant de la marée qui atteint 2,5m/seconde (soit 4,5 noeuds) à cet endroit. Le générateur associé restitue 3OOkW de puissance. La prévision de la production électrique annuelle du générateur est de 700 000 kWh/an: soit assez pour alimenter 35 habitations. Si l'hydrolienne installée par 35m de fond confirme son potentiel, l'industriel norvégien Hammerfest Strom, compte en installer 19 autres à proximité(pour un coût de 10 millions d'euro l'unité.

(©Science&Vie/p37/Décembre/2003/N°1035)

source de l'image : http://www.ifrance.com/Energie-France/h.html

Ce mardi 20 janvier 2004, alors qu’une société de la région de Quimper travaille sur un projet d’hydroliennes dans le raz de sein. Hydrolienne, les norvégiens inaugurent une première hydrolienne de 20m de diamètre. Installée par 45m de fond à l’extrême Nord du pays, son potentiel électrique est 700.000 KWh/an.
A quelques 1000 km au Nord d'Oslo, la ville d'Hammerfest est facile à trouver, sur n'importe quelle carte : elle est toute en haut ! On ne peut se baigner dans les eaux glaciales de son littoral, mais le froid n'a jamais empêché une éolienne de tourner.

Le gel pourrait évidemment tout bloquer, mais l'éolienne (ou plutôt hydrolienne) d'Hammerfest est posée sur le fond de la mer, où il ne gèle jamais, et ce sont les marées qui la fait tourner. Avec des pales de 10 mètres qui tournent grâce à un courant dont la vitesse est de 2,5 m/s (lors du flux ou du reflux), mais avec des temps de pause au maximum du flot et à la fin du jusant, l'hydrolienne, dont le rotor tourne automatiquement pour se mettre face au courant, devrait générer en une année 700 000 kW. Ce qui est peu au regard de l'investissement nécessaire à sa mise en place (environ 10 millions d'euros). De plus, en cas de problème, plonger dans les eaux à 1°, et noires 6 mois par an, pour les opérations de maintenance, ne sera pas une mince affaire... Mais c'est tout à l'honneur des norvégiens que d'avoir fait ce choix de production 100 % écologique. ABB et Statoil sont parties prenantes dans le projet, et on sait que ces 2 sociétés investissent aussi dans l'hydrogène, comme au Japon, on devrait donc voir bientôt aussi en Europe des unités de production sous-marine d'hydrogène.


Et en France ? Voici un plaidoyer d'Hervé Majastre (un des fondateurs d'Hydrohélix Énergies) en faveur de l'énergie hydrolienne.

Il existe une source d’énergie propre, abondante, renouvelable, pas chère, parfaitement prédictible et qui ne défigure pas le paysage : les courants maritimes. Un peu partout dans le monde, des projets de turbines électriques sous-marines voient le jour. En France, seule une petite société bretonne située à Quimper dans le Finistère s’est lancée dans les "hydroliennes". Mais elle ne touche pas un centime d’EDF, qui préfère investir dans cette technologie... au Royaume-Uni.

Créée en 2000 à Quimper, Hydrohélix projette de construire des hélices activées par la marée d’une puissance de 1,2 mégawatt chacune, l’équivalent d’une grosse éolienne. Mais faute d’avoir encore su éveiller l’intérêt de l’Etat et d’EDF, les deux ingénieurs d’Hydrohélix vivotent grâce à une maigre subvention de 120 000 euros, débloquée en novembre 2002 par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Depuis, leur projet d’hydrolienne dort dans les cartons.

Les côtes françaises sont pourtant parcourues par des marées puissantes et régulières. Le Service hydrographique et océanographique de la marine (Shom) est capable d’en prédire les fluctuations cent ans à l’avance. Les marées sont le fruit de l’attraction de la Lune, dont les mouvements sont connus avec une précision sans défaut. Rien à voir avec le vent, dont les changements de direction et de force ne peuvent être anticipés que de quatre à cinq jours au mieux, avec une précision très approximative. Contrairement aux éoliennes, l’énergie que les hydroliennes sont capables de produire peut donc être parfaitement planifiée.

Un rideau d'hélices sous-marines de 21 km de large : l’équivalent de trois réacteurs nucléaires ! 

Au large de Brest et de Cherbourg, la vitesse des courants est souvent supérieure à 12 km/h. Selon Hervé Majastre, l’un des deux fondateurs d’Hydrohélix, les courants littoraux bretons et normands sont capables de fournir une puissance de 3 gigawatts (GW), soit grosso modo l’équivalent de trois réacteurs nucléaires. Des pointes à 6 GW seraient possibles pendant les périodes de vives-eaux. La consommation instantanée d’électricité française se situe aux alentours de 50 GW. D’après Majastre, les courants marins pourraient donc fournir entre 6 et 12 % de l’électricité nécessaire à la France. Il faudrait installer 4 500 hydroliennes au fond des mers pour parvenir à un tel niveau de production. Cela représente un rideau d’hélices de quelque 21 km, disséminé à moins de 6 km des côtes, entre les îles de Sein et Ouessant et face au cap de la Hague, dans le Cotentin (à quelques encablures de la célèbre usine de retraitements de déchets nucléaires...).

"Cela n’entravera pas la navigation", promet Hervé Majastre. Les hélices que Hydrohélix envisage de construire mesureraient 16 mètres de diamètre pour une structure de 20 mètres de haut au total. Elles seraient arrimées au fond de l’eau à une profondeur minimale de 25 mètres, largement en dessous du tirant d’eau des bateaux autorisés à naviguer à moins de 6 km de la terre. Les supertankers et autres cargos, eux, croisent plus au large. Quant aux chalutiers, ils ne sont pas autorisés à pêcher aussi près des côtes. Aucun risque pour les filets, donc. Les pales des hydroliennes tournent lentement (environ vingt rotations par minute) et ne risquent donc pas de débiter des tranches de colin. 

D’après Hervé Majastre, le coût de l’électricité des hydroliennes serait équivalent à celui des éoliennes (un euro le watt) et sensiblement inférieur à celui du nucléaire (à peu près 1,4 euro le watt, d’après les rares estimations disponibles). La productivité de la technologie hydrohélienne est supérieure à celle des éoliennes. La qualité de la production permet une exploitation plus aisée. L'impact visuel est sans commune mesure avec l'éolien, et l'acceptation sociale devrait en être largement facilitée.

Ces nombreux avantages semblent pour l’instant laisser EDF indifférent. La France est pourtant à l’origine des premiers pas de l’énergie maritime, avec la construction de l’usine marée motrice de la Rance, près de Saint-Malo, en 1966. Une seule filiale du producteur national d’électricité s’intéresse aujourd’hui aux courants marins, mais elle se trouve en Angleterre.

Le Royaume-Uni se jette à l’eau grâce à l'argent d'EDF !

London Electricity, fournisseur d’électricité de la capitale britannique racheté par EDF en 1998, a investi l’an dernier pas loin  de cinq millions d’euros dans Marine Current Turbines (MCT). MCT a mis en route début août une petite turbine de 300 kW. Une éolienne à double hélice de 2 fois 500 kW prendra bientôt le relais. MCT espère pouvoir connecter son dispositif au réseau de distribution électrique anglais entre novembre 2004 et mai 2005.

Le Royaume-Uni s’intéresse de près à l’énergie des courants marins. Des initiatives similaires à celle de MCT sont en passe de voir le jour en Écosse et au Pays de Galles, financées par des consortiums associant les industriels et l’Etat. Les côtes de Grande-Bretagne profitent un peu partout de très fortes marées. Et la perspective du déclin annoncé des champs pétrolifères de la mer du Nord aiguillonne les autorités britanniques, qui investissent tous azimuts dans la recherche et le développement des énergies renouvelables.

Ailleurs, les sociétés Blue Energy au Canada, Hammerfest Stroem en Norvège et Enemar en Italie commercialisent déjà des systèmes de production électrique par les courants. Il s’agit pour l’instant de modestes installations "pilotes" d’une seule hélice (300 kW pour Hammerfest Stroem et 20 kW pour Enemar, dans le détroit de Messine). De nombreux projets d’usines électriques actionnées par les vagues existent également, au Pays de Galles, en Floride et en Nouvelle-Zélande notamment. Il s’agit de "serpents de mer" articulés d’une centaine de mètre de long : l’ondulation de la houle actionne des vérins qui produisent l’électricité.

En France, une seule PME, Iccap, installée à Brest, s’intéresse depuis 1998 à cette autre forme d’énergie propre et renouvelable qu’offre la mer. Avec un succès encore plus confidentiel que Hydrohélix.

Hervé Majastre suit avec une certaine amertume le succès naissant que connaît partout, sauf en France, l’énergie maritime. "Notre puissant lobby nucléaire continue à considérer avec condescendance l’hypothèse d’une prochaine crise de pénurie des énergies non renouvelables, alors que la production électrique française dépend à 75 % de l’extraction d’uranium", regrette-t-il.

EDF dispose aujourd’hui d’une puissance de 0,19 GW d’énergie éolienne et de 0,016 MW d’énergie solaire : à peine 0,5 % de la production nécessaire (environ 50 GW). Selon une directive européenne de septembre 2001, la France est censée faire passer de 15 à 21 % la proportion de son électricité produite à partir d’énergie renouvelable. Pour l’instant, l’essentiel de cette énergie est issu du réseau déjà très dense des barrages hydroélectriques, pratiquement parvenu à saturation. Après un quart de siècle d’oubli de l’énergie maritime depuis la construction de l’usine de la Rance, il serait peut-être temps de se pencher à nouveau sur une source d’énergie propre, qui semble bien plus avantageuse que l’éolien.

« Je suis un transfuge de la houille blanche à la houille bleue », se définit Hervé Majastre, un ingénieur de 40 ans. Précédemment spécialisé dans la construction de barrages, il est aujourd’hui engagé dans une aventure quasi-inédite en France, la production d’électricité à partir des courants marins. Le principe, en apparence élémentaire, consiste à exploiter l’énergie cinétique d’un fluide. Ce peut être celui du vent, par le truchement de pales d’éoliennes. Ou celui du courant, une idée mise en application avec succès à l’usine marémotrice de la Rance, dès 1960. Cette idée, adaptée non plus au courant d’un estuaire mais à celui des fonds marins, débouche sur le concept des hydroliennes, breveté en 1999 et mis au point par la société Hydrohélix Energies. Hervé Majastre et Jean-François Daviau, 50 ans, en sont les deux associés. « J’ai travaillé sur le développement de batteries au lithium pour les véhicules automobiles, raconte Hervé Majastre. Le problème vient du fait que, si on met un million de ces véhicules en circulation, il nous faudra 4 centrales nucléaires supplémentaires pour les alimenter en énergie. Une alternative consisterait à développer l’énergie éolienne, mais, compte tenu des résistances, son potentiel apparaît malheureusement homéopathique. D’où l’idée des hydroliennes ».

Inépuisable, presque gratuite et pourtant inexploitée en France.

Une hydrolienne est en fait une turbine sous-marine, arrimée au plateau continental par une vingtaine à quarantaine de mètres de fond. Hydrohélix dit avoir identifié trois sites appropriés au large des côtes françaises, sur lesquels les courants marins peuvent atteindre une vitesse de 12 à 18 kilomètres à l’heure. « La chaussée de Sein, dans le prolongement de Ouessant ; le Fromveur entre le Conquet et Ouessant ; la pointe de la Hague », énumère Hervé Majastre. Lequel évalue entre 3 et 6 gigawatts le potentiel énergétique de ces eaux. « Cela autorise une production de l’ordre de 5% de l’offre électrique française, l’équivalent de trois ou quatre centrales nucléaires. C’est un potentiel certes moins élevé que celui de l’éolien, mais très localisé ».

Hydrohelix Energies a identifié les sites favorables à l'implantation économique de sa technologie. Il en est dénombré plus de 200 sur le littoral atlantique français.
Sur le littoral breton, les trois principaux sites sont bien connus :
- La Chaussée de Sein (21 km de long) des courants jusqu'à 6 noeuds = une centrale de 1000 MW ;
- Le Fromveur (même installation) des courants jusqu'à 8 noeuds = une centrale de 2000 MW ;
- Le Raz Blanchard (même installation) des courants jusqu'à 10 noeud = une centrale de 3000 MW.
La puissance varie au cube de la vitesse, une même installation (en longueur) peut produire jusqu'à 3 fois plus pour une augmentation de la vitesse du courant de 50%. Le coût de l'investissement n'est pas identique, les installations doivent être dimensionnées en fonction de la force des courants maximums (mais le surcoût ne croit pas linéairement avec la puissance).


Carte qui montre la vitesse des courants dans la manche et qui indique les sites les plus favorables à l'implantation d'hydrolienne.

Afin de démontrer l'intérêt de ces trois sites majeurs, la figure suivante représente la production électrique en fonction du temps pour les 3 sites. Compte tenu de vitesse de propagation de l'onde de marée et de son orientation, le décalage dans temps est de 5 minutes entre la Chaussée de Sein et le Fromveur et de 3 heures entre la Chaussée de Sein et le Raz Blanchard. La variation de l'onde de marée est assimilée à une sinusoïdale, nous imposons une limite haute et une limite haute pour la production électrique.

La ressource maritime techniquement exploitable est estimée en France à une puissance cumulée de 30 GW (estimation de l'IFREMER datant des années 80) dont 6 GW en Bretagne et en Normandie (1 GW sur la Chaussée de Sein, 2 GW sur le Fromveur et 3 GW dans le Raz Blanchard). 

Ci-contre, le décalage dans le temps lié à la propagation de l'onde de marée le long des côtes et le foisonnement de la production, à partir de ces 3 sites, garantiront 3 GW en électricité de base, permettant une production annuelle de 25 TWh (soit environ 5% de la production électrique française actuelle).

Cette simulation a pour objectif de montrer que la ressource des marées est non seulement prévisible, mais qu'une fois développée le long des cotes bretonnes, elle permet de produire une énergie électrique de base d'une puissance de 3 GW, avec un minimum de perturbation quant à la gestion de la production et le dimensionnement des réseaux. Le potentiel éolien ne peut en aucun cas garantir cette production.

Respectueux de l’environnement, le dispositif nécessiterait un investissement de 6 milliards d’euros et permettrait de valoriser une source d’énergie tout à la fois inépuisable, gratuite et totalement inexploitée. « Un tel programme mené sur vingt cinq ans permettrait en outre de créer de 3000 à 5000 emplois », souligne Hervé Majastre. 

D'autres sites, moins importants, sont aussi rentables. Comme de nombreuses rivières marines, la rivière de l'Odet présente un potentiel estimé à 10 MW (8% de la puissance actuellement disponible sur Quimper).

Une première maquette (ici en photo), composée de 4 pales de 70 centimètres de diamètre, a été testée avec succès dans l’Odet, le fleuve côtier qui arrose Quimper, où Hydrohélix a établi son siège.

Il existe trois domaines d'application de l'hydrolienne pour produire de l'énergie électrique :
- Hauturières pour l'exploitation des courants de haute mer, dont les puissances sont supérieures à plusieurs dizaines de Méga Watts ;
- Côtières : utilisant les courants de marée, les puissances sont comprises entre un et plusieurs Méga Watt ;
- De rivière : la ressource est l'énergie des eaux de ruissellement, la puissance des centrales est au maximum de quelques centaines de kW.

La France à la remorque

Pourtant, le passage au stade industriel s’avère extrêmement difficile. « J’ai tout d’abord participé au concours de l’Anvar pour la création d’entreprise innovante, mais on m’a dit que le projet n’était pas innovant », s’étonne Hervé Majastre, avant d’entamer la litanie des obstacles affrontés depuis trois ans. « Nous avons contacté des entreprises spécialisées dans le secteur de l’énergie. ‘Ce n’est pas dans nos orientations stratégiques’, ont-elles répondu. Nous avons contacté des industriels, des entrepreneurs, la Banque de développement des PME… En vain ». Une proposition de partenariat adressée à EDF a débouché sur un refus de l’entreprise publique, pourtant engagée dans un projet similaire… en Grande-Bretagne, sous le nom de Marine Current Turbine (MCT). Le ministère britannique de l’industrie (DTI) semble lui aussi avoir perçu l’intérêt des hydroliennes et a investi dans trois projets hydro-héliens. L’Italie, la Norvège, le Canada et les Etats-Unis envisagent eux aussi de s’aventurer dans cette voie, quand ce n’est déjà fait.

« A titre de comparaison, le ministère de l’Industrie français estime que nous ne sommes pas attendus avant dix ou quinze ans », confie Hervé Majastre, amer. En définitive, l’unique soutien est venu de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), qui a versé à Hydrohélix une subvention de 115 000 euros. L’Etat français a fini par reconnaître l’intérêt de l’énergie hydrolienne et un appel à projet serait en cours de préparation… si l’administration parvient à débloquer un budget. « Cela fait cinq ans que je travaille sur ce projet, et je crois de moins en moins aux miracles financiers, se désespère Hervé Majastre. Nous sommes une PME innovante qui ne veut pas forcément jouer dans la cour des grands, simplement prendre sa place ». Pour peu que le nucléaire veuille bien lui en laisser un peu ?

Paragraphe tiré d'un mail que j'ai reçu fin 2004 et écrit par Walter Bouvais (mis en ligne le 5/11/2003) et que sur lequel j'ai ajouté quelques informations fournies par Hervé Majastre, que je remercie d'ailleurs en espérant que cette page l'aide à réaliser ses projets prometteurs.

Pour plus d'informations sur la société Hydrohélix Energies vous pouvez contacter Hervé Majastre par mail (enlever les lettres en majuscule pour éviter le SPAM) : hydrohelix-energiesXXX@XXXwanadoo.fr

ou par téléphone : 02 98 10 12 35  ou  06 83 30 49 23 ou fax 02 98 10 11 54
et par écrit : Hervé MAJASTRE - Jean-François DAVIAU  HYDROHELIX ENERGIES 140 bd de Creach Gwen 29561 Quimper cedex.

Aux dernières nouvelles 18 mars 2005 :

Bonjour Eric, 
J'ai vu effectivement que tu as fait un gros travail.
Je te donne quelques nouvelles : Hydrohelix Énergies est maintenant partenaire d'un consortium français pour réaliser le projet Marénergie dont l'objectif est de fabriquer et d'installer une première centrale de 1 MW sur une site breton. Pour nous aider à financer le projet (de l'ordre de 10 millions d'€uros) le partenariat a déposé une demande d'aide auprès de l'ADEME qui est un organisme à trois tutelles : Ministère de l'Industrie, Ministère de l'Environnement et Ministère de la Recherche.
Je suis optimiste car nous sommes le seul projet industriel français et il est nécessaire que notre pays est au moins une filière pour exploiter cette énergie. Les rapports avec EDF sont en train de se modifier. EDF est à terme une client potentiel. Nous avons compris que cette société ne s'impliquera pas directement dans ce développement technologique, aussi nous construirons notre projet dans une logique industrielle de fournisseur.
Encore félicitations pour le site.  Hervé Majastre

 


Liens utiles relatifs à l'énergie hydrolienne :

http://www.marineturbines.com  , l'entreprise anglaise dans laquelle EDF a investi ses billes.

http://www.floridahydro.com , le projet d'hydrolienne en Floride pour capter l'énergie du Gulf Stream, avant qu'il ne s'arrête :-)

 

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Dernière mise à jour : 29 janvier 2006
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