Pourquoi je vais NON à la constitution européenne le 29 mai prochain ?

        Avant d'expliquer pourquoi je vais voter NON, il me semble important d'expliquer le cheminement qui est le mien et le contexte dans lequel j'ai arrêté ma décision. Cela revient à vous expliquer ce qu'il me semble souhaitable pour notre avenir à tous au niveau de l'Europe. 

        Nous n'avons pas hiérarchisé ces souhaits de la même manière, et c'est évidemment de cette hiérarchie que découle le choix de voter oui ou non à ce référendum. Comme vous avez pu le lire sur la page d'accueil, je suis de plus en plus inquiet pour notre avenir à tous. Les changements climatiques et la grande crise du pétrole qui se profilent à l'horizon sont mes plus grandes préoccupations. 

        Les scientifiques commencent à être unanimes sur l'urgence de la situation. Nous avons moins de 10 ans, soit avant 2015, pour que l'humanité divise par deux ses émissions de gaz à effet de serre. Si nous ne le faisons pas, le dérèglement du climat s'emballera et deviendra irréversible avec à la clé (dans deux ou quatre siècles) une possible extinction de la vie terrestre. On nous dit déjà que nous sommes en train d'assister à une extinction massive causée par les activités de l'homme. Le Gulf Stream s'essouffle vraisemblablement de notre fait. Le réchauffement climatique est le problème le plus sérieux auquel l'humanité est confrontée, et comme nous sommes la dernière génération à pouvoir peut être inverser la vapeur, nous devons agir dans l'urgence et dans une certaine radicalité.

        A plus court terme le problème de l'épuisement des ressources pétrolières et gazières est tout aussi sérieux pour notre civilisation. Là aussi, nous avons moins de 10 ans pour diminuer notre dépendance à l'égard de ces énergies fossiles. Quelques économistes envisagent que le baril de pétrole pourrait valoir 380 dollars dès 2015. Imaginer l'impact que pourrait avoir un tel prix sur nos activités économiques. Cela serait la fin de l'aviation civile et du tourisme lointain, la fin de l'industrie automobile, la flambée des denrées alimentaires, des ouvriers incapables de travailler, les retraites non assurées, 60% des gens au chômage dans le tertiaire... une catastrophe qui nous pend au nez dans moins de dix ans et personne ou presque dans les milieux politico-médiatiques nous met sérieusement en garde.

        Et plus récemment, j'ai découvert l'imminence d'un krach de l'immobilier. L'éclatement de la bulle immobilière nous menace d'une récession grave qui rendra d'autant plus difficile la prise de mesures d'adaptation à ce monde nouveau où l'énergie sera plus chère.

        Quand on sait tout cela, il y a de quoi avoir de bonnes raisons pour placer la protection de l'environnement global au-dessus du libre échange, de la concurrence libre et non faussée ou encore du maintien des acquis sociaux. Je ne me reconnais dans les préoccupations d'aucun courant politique que j'ai pu entendre ces jours-ci. J'ai bien conscience d'exprimer ici un avis tout à fait marginal et j'espère que vous m'aiderez à le transmettre autour de vous.

        Qu'est-ce que j'attends de l'Europe pour résoudre ces problèmes ? Je souhaite que l'Europe devienne exemplaire dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. Cela implique que l'Europe prenne d'elle même, avant les américains, le chemin de la décroissance volontaire. La décroissance n'est pas un vain mot, cela implique pour le secteur de l'automobile que Mercedes ou Renault arrêtent leur ligne de montage des voitures de plus de 400 kg et dont la consommation de carburant dépasse les deux litres aux 100 km. La décroissance implique de gros efforts dans l'aménagement du territoire pour que les gens aient ce qui est nécessaire à leur survie dans un rayon de 15 km, cela implique un repeuplement des campagnes et un retour d'une grande partie de la population au contact de la terre. La décroissance implique des efforts importants pour se passer de l'aviation civile et transférer ces flux sur les trains et les bateaux. La décroissance implique la fin de la mondialisation avec la mise en place de système de régulation pour la limiter. La décroissance revient à installer un système de douane aux frontières pour taxer les produits provenant des pays qui ne respectent pas l'environnement et nos efforts de réduction d'émissions.  La décroissance doit en outre être équitable, c'est-à-dire que ceux qui ont un haut niveau de vie aujourd'hui doivent réduire davantage leur train de vie par rapport aux plus modestes. La décroissance est finalement notre seule chance de sauver ce qui peut l'être et de retrouver un lien avec la nature.   

        La question qui me guide tout au long de la lecture de la constitution est "En quoi la constitution peut-elle nous aider à faire face à ces fléaux ?"

        Jusqu'à ce que je réalise qu'il fallait s'orienter vers la décroissance, j'avais naturellement soutenu la droite car je croyais davantage à la liberté d'entreprise pour créer son propre emploi et je pensais que la gauche avec sa politique de redistribution (et donc de prélèvement) était un frein au développement économique. Aujourd'hui, je pense que les gens qui votent à droite sont des libéraux, c'est-à-dire des gens qui ne font pas confiance à la majorité pour régler leur propre problème dans le cadre d'une économie de marché. Globalement, ce sont des gens certainement dynamiques, qui se prennent en main et n'attendent pas grand chose des autres. Ils souhaitent davantage de liberté et de toute évidence, cette constitution est un véritable cadeau puisqu'elle permet de ratifier tous les traités précédents à tendance très libérale et qui ont pour la plupart d'entre eux été décidés sans grands débats nationaux.

        Le problème du libéralisme que j'identifie aujourd'hui, c'est qu'à force de pouvoir s'enrichir avec son travail ou sa prise d'initiatives et de risques, on en vient à ignorer les inégalités sociales (qui font monter l'insécurité) et surtout on en vient à ignorer totalement les problèmes d'environnement. Je pense aujourd'hui que si on doit pouvoir gagner davantage d'argent parce qu'on travaille ou parce qu'on prend des risques, on ne peut plus continuer à consommer aussi librement qu'aujourd'hui. Pour réguler, il y a deux solutions qui doivent être complémentaires, et qui ne sont absolument pas prévues par cette constitution : tout d'abord, on définit un plafond annuel de ressources maximum qui serait proportionnel au salaire minimum (d'un facteur 5), et enfin on taxe (en fait on tient compte des externalités négatives dans les prix des biens et des services) très lourdement les objets de consommation les plus polluants (le carburants des avions, les voitures de plus de 400 kg...). Sachant ce que je désire, je ne peux plus être aujourd'hui pour une droite ultra-libérale qui continuera de mépriser à ce point la planète qui nous abritent tous. Nicolas Sarkozy qui pendant un temps m'avait séduit est aujourd'hui pour moi quasiment l'ennemi public numéro un.

        Aujourd'hui, je me suis rapproché de l'extrême gauche car c'est aujourd'hui la seule manière pour moi d'exprimer ma révolte sur les questions environnementales. Même si je suis loin de partager toutes les thèses d'extrême gauche (notamment leur revendication éternelle pour augmenter le pouvoir d'achat, alors qu'il faudra bien évidemment le réduire (en acceptant de payer le juste prix environnemental des choses, les fameuses externalités négatives) pour éviter les ennuis), je m'associe à leur révolte contre le capitalisme et le gaspillage qu'il engendre. Comme eux, je suis largement écoeuré par les salaires des grands patrons qui peuvent se permettre toutes les folies et qui anéantissent mes efforts pour limiter mes émissions. Pour que je sois satisfait, il faudrait que je puisse voter pour un parti radical écologiste. Je ne voterai plus pour les verts car ils se sont trop éloignés de l'écologie et la base des verts est davantage sensibilisée sur la diabolisation du nucléaire que sur le réchauffement climatique. Les écologistes devraient se regroupés sous un parti d'influence qui ferait évoluer lentement mais sûrement les mentalités par l'exemplarité. En participant au pouvoir ces deux dernières décennies et en montrant qu'ils étaient incapables d'influencer les choix des autres partis de gauche, les verts se sont largement discrédités à mes yeux. Lorsque les verts ont défendu le oui, je me suis doublement méfié. 

        Je vais donc voter NON, un non qui se rapproche de l'extrême gauche ou plutôt de l'extrême vert (qui n'existe malheureusement pas). C'est un NON de révolte car nous n'avons plus le temps d'attendre. C'est au cours des 10 prochaines années que nous aurons la possibilité de limiter l'ampleur du réchauffement climatique. Au-delà il sera trop tard.

        Je vous arrête tout de suite si vous me dites que l'Europe est ce qui tire vers le haut la France sur les questions d'environnement. On peut avoir l'impression que l'Europe fait beaucoup de choses pour l'environnement, mais si on regarde dans le détail, c'est tout simplement de la poudre aux yeux. Les contraintes actuelles qu'imposent Bruxelles aux constructeurs automobiles sont des contraintes de pollution locale et aucunement des contraintes de pollution globale. Pour moi, le problème des voitures est tout simplement leur gabarit. Quand est-ce que l'Europe interdira la vente des voitures de plus de 400 kg ? Vous avez bien lu ! Les voitures ne seront écologiquement acceptables que lorsqu'elles consommeront 1 litre d'essence aux 100 km ! ce qui permettra à leurs occupants de parcourir moins de 5000 km par an pour rendre visite à la famille ou aux amis. L'Europe libérale est bien incapable d'une telle mesure et les seules mesures que l'Europe impose sont des mesures de bonne conscience ! Le filtre à particule pour continuer de rouler avec sa grosse voiture diesel, le pot catalytique pour sa voiture essence... L'essentiel comme nous allons le voir dans cette constitution, c'est qu'il ne faut pas gêner la croissance. Je suis désolé de vous imposer une telle radicalité mais il faut regarder la situation de notre planète. C'est dramatique de continuer dans ce "laisser faire, laisser croire". Et l'Europe actuelle ou future ne s'attaque pas aux vrais problèmes de l'environnement. Adopter ce traité n'ira pas dans le bon sens et le non ne changera rien aux contraintes actuelles qui pèsent sur les nouveaux pays entrants car si l'Europe se fige avec le non, elle ne reculera pas sur ces avancées. Donc, je me sens à l'aise avec le NON même si les contraintes "poudre aux yeux" de l'Europe nous impose effectivement quelques efforts, sans commune mesure avec les efforts qui nous attendent.

        Je ne veux plus d'une Europe édulcorée et déconnectée de la réalité physique du monde. L'Europe ne peut plus se construire sur une "croissance économique équilibrée" (Article I-3). Rien que ce terme "croissance" écrit aussi tôt dans ce texte m'incite à voter contre. Dans une société vivant dans le culte de la croissance quantitative, il faut bien reconnaître que le premier ennemi de l'écologie à l'heure actuelle, c'est cette croissance, dès lors qu'elle entraîne à parité une croissance des flux d'énergie et de matière. La lutte contre cette croissance est maintenant ancrée en moi et ce serait du masochisme que d'accepter de voter pour un texte qui proclame haut et fort la mise en oeuvre une croissance économique équilibrée. 

        Il y aurait bien des raisons de voter oui pour ce traité, comme le souligne la réponse de Normand de Jean-Marc Jancovici (http://www.manicore.com). On peut se dire effectivement qu'un vote négatif à la constitution n'aboutira pas à une nouvelle constitution plus favorable ou que la constitution présente une avancée intéressante pour l'environnement avec la création d'un représentant unique pour la diplomatie et les négociations internationales. Mais il faut bien voir que ce représentant sera cohérent avec la majorité libérale qu'il y a actuellement en Europe, ce qui signifie que l'Europe qu'on espère être le contre pouvoir des Américains pourrait bien devenir son clone plus politiquement correct. Il y a un moment où il faut choisir entre essayer de bouger le système à partir des décideurs actuels (et donc accepter certains compromis, comme le font les Verts) ou s'opposer au système en essayant de l'influencer de l'extérieur par une attitude beaucoup plus radicale et exemplaire. C'est la voie que je suis en train de prendre et c'est pourquoi je voterai non à ce traité et de la même manière pour les prochaines élections il est fort possible que je m'abstienne (cela fait longtemps que je dis qu'il faudrait comptabiliser le vote blanc) ou que je vote pour un parti minoritaire d'extrême gauche. Mon rêve : voter pour un candidat écologiste exemplaire, comme pourrait l'être Nicolas Hulot. Il est possible qu'en votant blanc, j'inscrive sur mon bulletin ce nom emblématique pour moi : Nicolas Hulot. Il me sera de toute façon difficile de voter à nouveau pour les partis classiques de gouvernement. L'heure n'est plus aux compromis, elle est à une certaine forme de radicalité. J'espère que vous serez nombreux à vous retrouver dans ce combat. Et j'espère qu'au delà de ce référendum, qui quelque soit son résultat ne changera pas grand chose vis-à-vis du climat, vous me rejoindrez derrière cette idée : faire émerger en 2007 la majorité des consciences derrière un parti exemplaire dont le chef de file serait Nicolas Hulot.

Passons maintenant à l'étude de la constitution.

Tout d'abord, quelle est la définition d'une constitution ? 
        Une constitution est un texte fondamental qui définit l'organisation et le fonctionnement des institutions politiques d'un état. Une constitution définit donc avec quels outils (un parlement, un gouvernement, un chef de l'état, un roi...) le pays pourrait décider les politiques à mettre en oeuvre pour faire face aux problèmes auxquels il peut être confronté. La constitution fixe les grands traits du fonctionnement des institutions, elle précise rarement par exemple le nombre d'élus que compte le parlement. Il s'agit donc d'un texte général.

L'exemple de la constitution française de 1958

La constitution de 1958 comprend :
Un préambule par lequel le peuple français proclame solennellement son attachement aux droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale.
Des titres qui définissent :
- la nature même de l'état : la France est une République, indivisible, laïque, démocratique et sociale,
- les institutions : le président de la République, le gouvernement, le Parlement, le Conseil constitutionnel, la Haute Cour de justice, le Conseil économique et social,
- le fonctionnement des institutions : attributions du président de la République, du Premier ministre, du Parlement, rapports entre parlement et gouvernement...  

Et la constitution européenne ?
        Force est de constater qu'il s'agit d'un pavé tout à fait imbuvable et dont on peut être sûr que plus de 60% des gens qui voteront pour ou contre ce texte ne l'auront même pas lu dans son intégralité. On peut alors déjà se poser la question de la légitimité d'un référendum pour ratifier ou non ce texte. 
        Beaucoup de gens iront voter suite à des commentaires de gens dont on est même pas certain qu'ils auront eux-mêmes lu la constitution. A ce rythme là, le référendum s'apparente à une véritable farce.  

La constitution européenne comprend (le nombre de page correspond au texte qui nous a été envoyé) :
- Partie I : définition et objectifs de l'Union (10 pages)
- Partie II : la charte des droits fondamentaux de l'Union (4 pages)
- Partie III : les politiques et le fonctionnement de l'Union (53 pages)
- Partie IV : dispositions générales et finales (97 pages)

        On voit déjà que la partie constitutionnelle proprement dite est très courte et qu'il y a une partie qu'il est curieux de trouver dans une constitution, il s'agit des politiques de l'Union. A quoi cela correspond-il ? En fait il s'agit avec ce référendum de plébisciter les avancées européennes réalisées depuis Maastricht (1992) et pour lesquelles nous n'avons pas eu la possibilité de se prononcer. 

Rappel sur la construction récente de l'Europe :

1992 : traité de Maastricht signé par douze pays
Ce traité a donné le feu vert à deux objectifs prioritaires :
- La création de la citoyenneté européenne.
- L'établissement d'une union monétaire européenne dotée d'une monnaie unique. (L'euro arrivera dans notre vie quotidienne en janvier 2002)

octobre 1997 : traité d'Amsterdam
Complétant des chapitres variés des traités antérieurs, ce traité constitue une nouvelle avancée dans la construction européenne. En voici les principaux points (sur lesquels nous n'avons pas pu nous prononcer) :
- Coordination des politiques de priorité à l'emploi et confirmation de l'attachement aux droits sociaux (Vous vous souvenez, la fracture sociale de Chirac...)
- Lutte pour l'égalité au travail et contre l'exclusion
- Reconnaissance de l'importance du rôle des services publics.
- Protection de la santé (lutte contre la drogue) et de l'environnement (la pollution ne connaît pas de frontière) (Un peu léger comme allusion à la nature, de qui se moque-t-on ?) 
- Libre circulation sur tout le territoire de l'UE (espace de Schengen). (Donc, toujours plus de camions et toujours plus de concentration des industries que l'on délocalisera plus tard ...)
- Définition progressive d'une politique étrangère et de sécurité commune.
- L'UE fonctionnant parfois difficilement à 15, refonte des institutions avant tout élargissement. (On n'est pas en train de faire l'inverse ?)

mars 1999 : Sommet de Berlin (décisions des 15)
- la stabilisation du coût de la PAC (environ 50% du budget européen)
- la réforme des aides aux régions les plus pauvres de l'UE
- la modification de la répartition du financement de l'UE par les pays membres.

mars 2000 : Sommet de Lisbonne (objectifs 2000-2010)
- une nouvelle politique économique plus dynamique dont la croissance tournerait autour de 3% l'an, condition indispensable pour parvenir au plein emploi,   (Du délire, du délire !!)
- une économie basée sur la connaissance. Chaque citoyen doit être doté des compétences nécessaires pour vivre et travaille dans la nouvelle société de l'information.

décembre 2000 : Sommet de Nice
Préparation de l'élargissement de l'Union européenne prévue à partir de 2002. L'Europe passe à 25 pays.

        A travers ce petit rappel on voit que l'Europe se construit essentiellement sur l'idée de la croissance pour assurer le plein emploi. Dans un monde sans limite, sous-entendu avec des réserves énergétiques illimitées et une capacité d'absorption par la nature de nos déchets illimitée, cela pourrait être crédible. Mais notre monde se limite à notre planète, nous ne pourrons pas continuer éternellement à croître, nous avons déjà largement dépassé les limites de l'écologiquement acceptable. Il nous faut donc envisager sérieusement la décroissance.

Pourquoi la croissance est-elle autant mise en avant dans la politique mondiale et européenne ?
        La réponse a cette question tient en peu de choses : les 20% de gens qui jouissent des 80% des richesses mondiales refusent se diminuer leur train de vie pour partager cette richesse avec les autres. La seule fuite en avant possible, c'est de faire croire qu'on peut augmenter la richesse mondiale, ainsi le nombre de gens qui jouissent d'un haut niveau de vie pourra augmenter, ce qui ne diminuera pas le niveau de vie actuel des gens les plus aisés et ce qui générera de l'espoir chez les pauvres. 
        La notion de décroissance n'est pas politiquement correcte car les riches savent qu'ils vont devoir se serrer la ceinture et les pauvres perdent l'espoir de jouir des avantages des riches. Pourtant, au risque de me répéter, la décroissance est la seule notion qui soit naturellement correcte car notre monde a des limites. La richesse que nous pouvons partager n'est pas infinie. La notion de croissance est donc totalement archaïque, or les bâtisseurs de l'Europe ne jure que par cette notion. Comment peut-on alors ratifier un traité qui nous condamne ? 

Voici maintenant quelques articles que j'ai relevé et en-dessous desquels j'ai placé quelques commentaires.

PARTIE I

TITRE I: DÉFINITION ET OBJECTIFS DE L'UNION

Article 3: Les objectifs de l'Union
1. L'Union a pour but de promouvoir la paix, ses valeurs et le bien-être de ses peuples.
2. L'Union offre à ses citoyennes et à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, et un marché unique où la concurrence est libre et non faussée.
3. L'Union oeuvre pour le développement durable de l'Europe fondé sur une croissance économique équilibrée, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé de protection et d'amélioration de la qualité de l'environnement. Elle promeut le progrès scientifique et technique.
Elle combat l'exclusion sociale et les discriminations, et promeut la justice et la protection sociales, l'égalité entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits des enfants.
Elle promeut la cohésion économique, sociale et territoriale, et la solidarité entre les États membres.
L'Union respecte la richesse de sa diversité culturelle et linguistique, et veille à la sauvegarde et au développement du patrimoine culturel européen.

4. Dans ses relations avec le reste du monde, l'Union affirme et promeut ses valeurs et ses intérêts. Elle contribue à la paix, à la sécurité, au développement durable de la planète, à la solidarité et au respect mutuel entre les peuples, au commerce libre et équitable, à l'élimination de la pauvreté et à la protection des droits de l'Homme, en particulier ceux des enfants, ainsi qu'au strict respect et au développement du droit international, notamment au respect des principes de la charte des Nations unies.
5. Ces objectifs sont poursuivis par des moyens appropriés, en fonction des compétences conférées à l'Union dans la Constitution.

Cet article 3 est à l'image de toute la constitution : il y a une concurrence entre des grands principes contradictoires. Dans cette constitution, on trouvera tout et son contraire, ce qui rend ce texte particulièrement creux sur le fond.
Comment peut-on affirmer dans une même phrase que le développement durable est fondé sur une croissance économique équilibrée ? Le développement pour être durable doit prendre en compte les limites de notre monde et la durabilité est tout à fait contradictoire avec la notion de croissance. Cette phrase est un compromis pour rassurer les partisans du libéralisme économique et amadouer l'opinion public de plus en plus sensibilisé à la notion d'environnement. Cette phrase est tout simplement un vrai scandale, une tentative grotesque d'édulcorer la construction d'une Europe de la prédation.
Ensuite, comment peut-on associer la notion de commerce libre et équitable ? Le libre échange, on voit ce que cela donne : une dépendance accrue vis-à-vis des transports routiers (car les plus souples), une concentration accrue des industries (la production de biens se spécialise géographiquement) et des délocalisations massives vers les pays offrant les moindres contraintes. La notion de commerce équitable est tout autre, il s'agit de permettre la survie des petits producteurs et cette survie passe par la mise en place de contrôles et de nombreux systèmes de régulation qui nuisent obligatoirement à la notion de commerce libre (avec une concurrence non faussée). Il s'agit donc encore d'une phrase qui ne veut rien dire. 
S'il n'y avait que cet article, on pourrait se dire oui, mais tout le texte est comme cela. Il faut vraiment le refuser. 

TITRE IV: LES INSTITUTIONS DE L'UNION

Article 21: Le Président du Conseil européen
1. Le Président du Conseil européen est élu par le Conseil européen à la majorité qualifiée pour une durée de deux ans et demi, renouvelable une fois. En cas d'empêchement ou de faute grave, le Conseil européen peut mettre fin à son mandat selon la même procédure.
2. Le Président du Conseil européen:
- préside et anime les travaux du Conseil européen,
- en assure la préparation et la continuité en coopération avec le Président de la Commission, et sur la base des travaux du Conseil des affaires générales,
- oeuvre pour faciliter la cohésion et le consensus au sein du Conseil européen,
- présente au Parlement européen un rapport à la suite de chacune de ses réunions.
Le Président du Conseil européen assure à son niveau et dans cette qualité, la représentation extérieure de l'Union pour les matières relevant de la politique étrangère et de sécurité commune, sans préjudice des compétences du ministre des Affaires étrangères de l'Union.
3. Le Président du Conseil européen ne peut exercer de mandat national.

Article 27: Le ministre des Affaires étrangères de l'Union
1. Le Conseil européen, statuant à la majorité qualifiée, avec l'accord du Président de la Commission, nomme le ministre des Affaires étrangères de l'Union. Celui-ci conduit la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union. Le Conseil européen peut mettre fin à son mandat selon la même procédure.
2. Le ministre des Affaires étrangères de l'Union contribue par ses propositions à l'élaboration de la politique étrangère commune et l'exécute en tant que mandataire du Conseil des ministres. Il agit de même pour la politique de sécurité et de défense commune.
3. Le ministre des Affaires étrangères de l'Union est l'un des vice-présidents de la Commission européenne. Il y est chargé des relations extérieures et de la coordination des autres aspects de l'action extérieure de l'Union. Dans l'exercice de ces responsabilités au sein de la Commission, et pour ces seules responsabilités, le ministre des Affaires étrangères de l'Union
est soumis aux procédures qui régissent le fonctionnement de la Commission.

Il s'agit là d'avancées intéressantes qui auraient pu me faire pencher en faveur du Oui, mais je vois qu'autour de moi les gens n'ont pas conscience de leur vulnérabilité. Ces représentants de l'Europe ne représenteront qu'une majorité de citoyens fatalistes et je n'ai aucune espérance dans l'action d'un tel représentant en faveur de l'environnement.

TITRE VI: LA VIE DÉMOCRATIQUE DE L'UNION

Article 45: Principe de la démocratie représentative
1. Le fonctionnement de l'Union est fondé sur le principe de la démocratie représentative.
2. Les citoyennes et les citoyens sont directement représentés au niveau de l'Union au Parlement européen. Les États membres sont représentés au Conseil européen et au Conseil des ministres par leurs gouvernements, qui sont eux-mêmes responsables devant les parlements nationaux, élus par leurs citoyens.
3. Toute citoyenne ou tout citoyen a le droit de participer à la vie démocratique de l'Union. Les décisions sont prises aussi ouvertement et aussi près des citoyens que possible.
4. Les partis politiques de niveau européen contribuent à la formation de la conscience politique européenne et à l'expression de la volonté des citoyennes et des citoyens de l'Union.

Article 46: Principe de la démocratie participative
1. Les institutions de l'Union donnent, par les voies appropriées, aux citoyennes et citoyens et aux associations représentatives la possibilité de faire connaître et d'échanger publiquement leurs opinions dans tous les domaines d'action de l'Union.
2. Les institutions de l'Union entretiennent un dialogue ouvert, transparent et régulier avec les associations représentatives et la société civile.
3. En vue d'assurer la cohérence et la transparence des actions de l'Union, la Commission procède à de larges consultations des parties concernées.
4. La Commission peut, sur initiative d'au moins un million de citoyens de l'Union issus d'un nombre significatif d'États membres, être invitée à soumettre une proposition appropriée sur des questions pour lesquelles ces citoyens considèrent qu'un acte juridique de l'Union est nécessaire aux fins de l'application de la Constitution. La loi européenne arrête les dispositions relatives aux procédures et conditions spécifiques requises pour la présentation d'une telle initiative citoyenne.

Là encore on veut nous faire croire qu'il y a des avancées importantes dans la démocratie avec notamment le fait que des citoyens peuvent pétitionner. A quoi peut aboutir une pétition ? Et bien, c'est écrit : il s'agit d'une proposition dont la commission européenne peut se faire le relais et qui sera donc débattue auprès du parlement. Et croyez-vous que le chiffre de 1 million de citoyens soit sérieux ? Cela représente bien moins que 1% de la population européenne. Une telle pétition ne pourrait être destinée qu'à la corbeille. C'est seulement à partir de 100 millions de citoyens qu'une proposition pourrait être prise au sérieux par la commission. Je ne comprends pas cette volonté délibérée de brouiller les pistes et de nous faire croire que les citoyens auront davantage de pouvoir avec ce traité.

PARTIE II LA CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE L'UNION

TITRE IV: SOLIDARITÉ

Article II-37: Protection de l'environnement
Un niveau élevé de protection de l'environnement et l'amélioration de sa qualité doivent être intégrés dans les politiques de l'Union et assurés conformément au principe du développement durable.

Article II-38: Protection des consommateurs
Un niveau élevé de protection des consommateurs est assuré dans les politiques de l'Union.

Bravo pour ces articles ! Dommage que les politiques de l'Union ne vont pas dans ce sens. Ce texte dit tout et son contraire.

PARTIE III LES POLITIQUES ET LE FONCTIONNEMENT DE L'UNION

TITRE I    CLAUSES D'APPLICATION GÉNÉRALE

Article III-4
Les exigences de la protection de l'environnement doivent être intégrées dans la définition et la mise en oeuvre des politiques et actions de l'Union visées par la présente partie, en particulier afin de promouvoir le développement durable.

Article III-5
Les exigences de la protection des consommateurs sont prises en considération dans la définition et la mise en oeuvre des autres politiques et actions de l'Union.

Un rappel des articles précédents, bravo !

SECTION 3  LIBRE CIRCULATION DES MARCHANDISES
Sous-section 1 Union douanière

Article III-36
1. L'Union comprend une union douanière qui s'étend à l'ensemble des échanges de marchandises et qui comporte l'interdiction, entre les États membres, des droits de douane à l'importation et à l'exportation et de toutes taxes d'effet équivalent, ainsi que l'adoption d'un tarif douanier commun dans leurs relations avec les pays tiers.
2. L'article III-38 et la sous-section 3 de la présente section s'appliquent aux produits qui sont originaires des États membres, ainsi qu'aux produits en provenance de pays tiers qui se trouvent en libre pratique dans les États membres.

Article III-37
Sont considérés comme étant en libre pratique dans un État membre les produits en provenance de pays tiers pour lesquels les formalités d'importation ont été accomplies et les droits de douane et taxes d'effet équivalent exigibles ont été perçus dans cet État membre, et qui n'ont pas bénéficié d'une ristourne totale ou partielle de ces droits et taxes.

Article III-38
Les droits de douane à l'importation et à l'exportation ou taxes d'effet équivalent sont interdits entre les États membres. Cette interdiction s'applique également aux droits de douane à caractère fiscal.

Article III-40
Dans l'exercice des missions qui lui sont confiées au titre de la présente sous-section, la Commission s'inspire:
a) de la nécessité de promouvoir les échanges commerciaux entre les États membres et les pays tiers,
b) de l'évolution des conditions de concurrence à l'intérieur de l'Union, dans la mesure où cette évolution aura pour effet d'accroître la force compétitive des entreprises,
c) des nécessités d'approvisionnement de l'Union en matières premières et demi-produits, tout en veillant à ne pas fausser entre les États membres les conditions de concurrence sur les produits finis,
d) de la nécessité d'éviter des troubles sérieux dans la vie économique des États membres et d'assurer un développement rationnel de la production et une expansion de la consommation dans l'Union.

Sous-section 3 Interdiction de restrictions quantitatives

Article III-42
Les restrictions quantitatives tant à l'importation qu'à l'exportation ainsi que toutes mesures d'effet équivalent, sont interdites entre les États membres.

Dans cette partie, cela se gâte sérieusement pour l'environnement. S'il y a une chose dont je suis certain, c'est qu'il faudra un jour que le consommateur final paye le prix des dégâts environnementaux directement dans ses achats quotidiens. Cela suppose la mise en place d'un système de taxe sur l'énergie, sur le contenu en ressources naturelles et sur les émissions de gaz à effet de serre, pour réguler un marché extrêmement libre et totalement irresponsable vis-à-vis des dégâts environnementaux. Cette régulation devra s'appliquer dès le passage transfrontalier des produits ou denrées destinés à la consommation. 
La constitution dit qu'aucune taxe douanière ne pourra être mise en place au sein de l'Union et en plus aucune restriction quantitative sera possible. Nous sommes donc dans un système de libre échange ultra-sauvage dans lequel aucun état, en avance sur les autres, pourra réguler ce qui rentre et ce qui sort de son pays. On verra donc encore des camions de tomates hollandaises croiser dans le massif central des camions de tomates espagnoles. En ratifiant se traité, on interdit aux européens la possibilité d'être exemplaire au sein de leur pays pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre en freinant les échanges et en faisant payer le vrai prix des choses à leur consommateur. Nous sommes donc en présence d'une logique ultra-libérale à l'américaine. Et moi, je le dis tout net , je n'en veux pas ! 

Sous-section 2  Les aides accordées par les États membres

Article III-56
1. Sauf dérogations prévues par la Constitution, sont incompatibles avec le marché intérieur, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États membres ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.
2. Sont compatibles avec le marché intérieur:
a) les aides à caractère social octroyées aux consommateurs individuels, à condition qu'elles soient accordées sans discrimination liée à l'origine des produits,
b) les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d'autres événements extraordinaires,
c) les aides octroyées à l'économie de certaines régions de la République fédérale d'Allemagne affectées par la division de l'Allemagne, dans la mesure où elles sont nécessaires pour compenser les désavantages économiques causés par cette division.

3. Peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur:
a) les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi,
b) les aides destinées à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt européen commun ou à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre,
c) les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun,
d) les aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges et de la concurrence dans l'Union dans une mesure contraire à l'intérêt commun,
e) les autres catégories d'aides déterminées par des règlements ou des décisions européens adoptés par le Conseil des ministres sur proposition de la Commission.

Aucune aide pour les vélos efficaces, les énergies renouvelables, le transport ferroviaire... De qui se moque-t-on lorsque des écologistes disent oui à ce texte ? Masochiste ?

SECTION 3
COHÉSION ÉCONOMIQUE, SOCIALE ET TERRITORIALE

Article III-116
Afin de promouvoir un développement harmonieux de l'ensemble de l'Union, celle-ci développe et poursuit son action tendant au renforcement de sa cohésion économique, sociale et territoriale. En particulier, l'Union vise à réduire l'écart entre les niveaux de développement des diverses régions et le retard des régions ou îles les moins favorisées, y compris les zones rurales.

Article III-118
Le Fonds européen de développement régional est destiné à contribuer à la correction des principaux déséquilibres régionaux dans l'Union par une participation au développement et à l'ajustement structurel des régions en retard de développement et à la reconversion des régions industrielles en déclin.

Là, il s'agit bien d'augmenter le niveau de développement des pays les moins avancés. Il ne s'agit aucunement de réduire le niveau de vie des pays "riches" sur celui des pays moins développés. L'Europe va donc aider les pays entrants pour qu'ils augmentent leur empreinte écologique. L'Europe deviendra pire que les États-Unis dans 10 à 20 ans. C'est bien cela que vous voulez en votant oui ?!

Article III-119
Sans préjudice de l'article III-120, la loi européenne définit les missions, les objectifs prioritaires et l'organisation des fonds à finalité structurelle ce qui peut comporter le regroupement des fonds, les règles générales applicables aux fonds, ainsi que les dispositions nécessaires pour assurer leur efficacité et la coordination des fonds entre eux et avec les autres instruments financiers existants.
Un Fonds de cohésion, créé par la loi européenne, contribue financièrement à la réalisation de projets dans le domaine de l'environnement et dans celui des réseaux transeuropéens en matière d'infrastructure des transports.
Dans tous les cas, la loi européenne est adoptée après consultation du Comité des régions et du Comité économique et social. Le Conseil des ministres statue à l'unanimité jusqu'au 1er janvier 2007.

L'Europe va donc financer les réseaux de transport transeuropéens et à priori il devrait s'agir d'autoroutes et d'aéroports plus que de rails et de pistes cyclables. Donc, on aura toujours plus de camions sur nos routes, toujours plus d'avions dans le ciel. C'est cela l'avenir de l'Europe avec cette constitution : un vaste réseau de routes où des camions vont assurer le transport de marchandises fabriqués à l'Est et vendu à l'Ouest dans une stricte concurrence libre et non faussée, sans aucune possibilité de régulation au niveau national. Je dis non ! 

SECTION 4 AGRICULTURE ET PÊCHE

Article III-123
1. La politique agricole commune a pour but:
a) d'accroître la productivité de l'agriculture en développant le progrès technique, en assurant le développement rationnel de la production agricole ainsi qu'un emploi optimum des facteurs de production, notamment de la main-d'oeuvre,
b) d'assurer ainsi un niveau de vie équitable à la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui travaillent dans l'agriculture,
c) de stabiliser les marchés,
d) de garantir la sécurité des approvisionnements,
e) d'assurer des prix raisonnables dans les livraisons aux consommateurs.
2. Dans l'élaboration de la politique agricole commune et des méthodes spéciales qu'elle peut impliquer, il sera tenu compte:
a) du caractère particulier de l'activité agricole, découlant de la structure sociale de l'agriculture et des disparités structurelles et naturelles entre les diverses régions agricoles,

b) de la nécessité d'opérer graduellement les ajustements opportuns,
c) du fait que, dans les États membres, l'agriculture constitue un secteur intimement lié à
l'ensemble de l'économie.

Le début de cet article est tout simplement accablant pour cette constitution. Je crois que c'est la première chose que j'ai lu dans cette constitution qui m'a fait autant réagir. Relisons : La PAC aura pour but d'accroître la productivité de l'agriculture en développant le progrès technique. Qu'est-ce qu'on entend par progrès technique ? Les OGM bien sur ! Si vous dites oui à ce traité, c'est que vous acceptez de manger des produits OGM bourrés de pesticides, c'est aussi que vous acceptez l'agriculture industrielle qui vide nos campagnes et qui émet en France le quart de nos émissions de gaz à effet de serre. Pour moi, c'est impossible de voter pour un article pareil. L'avenir de l'agriculture, c'est davantage d'agriculteurs et une moindre productivité pour préserver en priorité notre environnement. J'espère que vous pèserez cet article, il vaut vraiment un non résolu.  

SECTION 5 ENVIRONNEMENT

Article III-129
1. La politique de l'Union dans le domaine de l'environnement contribue à la poursuite des objectifs suivants:
a) la préservation, la protection et l'amélioration de la qualité de l'environnement,
b) la protection de la santé des personnes,
c) l'utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles,
d) la promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou planétaires de l'environnement.
2. La politique de l'Union dans le domaine de l'environnement vise un niveau de protection élevé, en tenant compte de la diversité des situations dans les différentes régions de l'Union. Elle est fondée sur les principes de précaution et d'action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement et sur le principe du pollueur-payeur.
Dans ce contexte, les mesures d'harmonisation répondant aux exigences en matière de protection de l'environnement comportent, dans les cas appropriés, une clause de sauvegarde autorisant les États membres à prendre, pour des motifs environnementaux non économiques, des dispositions provisoires soumises à une procédure de contrôle par l'Union.
3. Dans l'élaboration de sa politique dans le domaine de l'environnement, l'Union tient compte:
a) des données scientifiques et techniques disponibles,

b) des conditions de l'environnement dans les diverses régions de l'Union,
c) des avantages et des charges qui peuvent résulter de l'action ou de l'absence d'action,
d) du développement économique et social de l'Union dans son ensemble et du développement équilibré de ses régions.
4. Dans le cadre de leurs compétences respectives, l'Union et les États membres coopèrent avec les pays tiers et les organisations internationales compétentes. Les modalités de la coopération de l'Union peuvent faire l'objet d'accords entre celle-ci et les tierces parties concernées, qui sont négociés et conclus conformément à l'article III-272.
L'alinéa précédent ne préjuge pas la compétence des États membres pour négocier dans les instances internationales et conclure des accords internationaux.

Article III-130
1. La loi ou la loi-cadre européenne établit les actions à entreprendre pour réaliser les objectifs visés à l'article III-129. Elle est adoptée après consultation du Comité des régions et du Comité économique et social.
2. Par dérogation au paragraphe 1 et sans préjudice de l'article III-65, le Conseil des ministres adopte à l'unanimité des lois ou des lois-cadres européennes établissant:
a) des mesures essentiellement de nature fiscale;

b) les mesures affectant:
i) l'aménagement du territoire;
ii) la gestion quantitative des ressources hydrauliques ou touchant directement ou indirectement la disponibilité desdites ressources;
iii) l'affectation des sols, à l'exception de la gestion des déchets;
c) les mesures affectant sensiblement le choix d'un État membre entre différentes sources d'énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique.
Le Conseil des ministres peut adopter, à l'unanimité, une décision européenne pour rendre la procédure législative ordinaire applicable aux questions visées au premier alinéa du présent paragraphe.
Dans tous les cas, le Conseil des ministres statue après consultation du Parlement européen, du Comité des régions et du Comité économique et social.

3. La loi européenne établit des programmes d'action à caractère général qui fixent les objectifs prioritaires à atteindre. Elle est adoptée après consultation du Comité des régions et du Comité économique et social.
Les mesures nécessaires à la mise en oeuvre de ces programmes sont adoptées conformément aux conditions prévues au paragraphe 1 ou au paragraphe 2, selon les cas.
4. Sans préjudice de certaines mesures adoptées par l'Union, les États membres assurent le financement et l'exécution de la politique en matière d'environnement.
5. Sans préjudice du principe du pollueur-payeur, lorsqu'une mesure fondée sur le paragraphe 1 implique des coûts jugés disproportionnés pour les pouvoirs publics d'un État membre, cette mesure prévoit sous une forme appropriée:
a) des dérogations temporaires et/ou
b) un soutien financier du Fonds de cohésion.

Article III-131
Les dispositions de protection adoptées en vertu de l'article III-130 ne font pas obstacle au maintien et à l'établissement, par chaque État membre, de dispositions de protection renforcées. Ces dispositions doivent être compatibles avec la Constitution. Elles sont notifiées à la Commission.

Ces articles sont à priori excellents, mais que font-ils aux côtés d'articles vénérant la croissance, le libre échange ou le progrès technique agricole ? C'est là que je prends la mesure que l'on trouve tout et son contraire. Comment peut-on se prononcer pour texte aussi contradictoire ? 

SECTION 7  TRANSPORTS

Article III-137
Toute mesure dans le domaine des prix et conditions de transport, adoptée dans le cadre de la Constitution, doit tenir compte de la situation économique des transporteurs.

Article III-140
Les taxes ou redevances qui, indépendamment des prix de transport, sont perçues par un transporteur au passage des frontières ne doivent pas dépasser un niveau raisonnable, compte tenu des frais réels effectivement entraînés par ce passage.
Les États membres s'efforcent de réduire ces frais.
La Commission peut adresser aux États membres des recommandations en vue de l'application du présent article.

Voici deux articles qui limitent au maximum les possibilités de régulation par des États et aussi l'Union dans le domaine des transports. Il n'est pas prévu que le coût des transports puisse augmenter artificiellement de manière à limiter le kilométrage des camions ou à tenir compte des externalités négatives.

SECTION 8 RÉSEAUX TRANSEUROPÉENS

Article III-144
1. En vue de contribuer à la réalisation des objectifs visés aux articles III-14 et III-116 et de permettre aux citoyens de l'Union, aux opérateurs économiques, ainsi qu'aux collectivités régionales et locales de bénéficier pleinement des avantages découlant de la mise en place d'un espace sans frontières intérieures, l'Union contribue à l'établissement et au développement de réseaux transeuropéens dans les secteurs des infrastructures du transport, des télécommunications et de l'énergie.
2. Dans le cadre d'un système de marchés ouverts et concurrentiels, l'action de l'Union vise à favoriser l'interconnexion et l'interopérabilité des réseaux nationaux ainsi que l'accès à ces réseaux.
Elle tient compte en particulier de la nécessité de relier les régions insulaires, enclavées et périphériques aux régions centrales de l'Union.

Article III-145
1. Afin de réaliser les objectifs visés à l'article III-144, l'Union:
a) établit un ensemble d'orientations couvrant les objectifs, les priorités ainsi que les grandes lignes des actions envisagées dans le domaine des réseaux transeuropéens; ces orientations identifient des projets d'intérêt commun;
b) met en oeuvre toute action qui peut s'avérer nécessaire pour assurer l'interopérabilité des réseaux, en particulier dans le domaine de l'harmonisation des normes techniques;
c) peut soutenir des projets d'intérêt commun soutenus par les États membres et définis dans le cadre des orientations visées au point a), en particulier sous forme d'études de faisabilité, de garanties d'emprunt ou de bonifications d'intérêts; l'Union peut également contribuer au financement, dans les États membres, de projets spécifiques en matière d'infrastructure des
transports par le biais du Fonds de cohésion. L'action de l'Union tient compte de la viabilité économique potentielle des projets.
2. La loi ou la loi-cadre européenne établit les orientations et les autres mesures visées au paragraphe 1. Elle est adoptée après consultation du Comité des régions et du Comité économique et social.
Les orientations et projets d'intérêt commun qui concernent le territoire d'un État membre requièrent
l'accord de l'État membre concerné.
3. Les États membres coordonnent entre eux, en liaison avec la Commission, les politiques menées au niveau national qui peuvent avoir un impact significatif sur la réalisation des objectifs visés à l'article III-144. La Commission peut prendre, en étroite collaboration avec les États membres, toute initiative utile pour promouvoir cette coordination.
4 L'Union peut coopérer avec les pays tiers pour promouvoir des projets d'intérêt commun et assurer l'interopérabilité des réseaux.

Deux articles pour vous convaincre que vous allez en voir des camions sur les routes...

SECTION 10  ÉNERGIE

Article III-157
1. Dans le cadre de la réalisation du marché intérieur et en tenant compte de l'exigence de préserver et améliorer l'environnement, la politique de l'Union dans le domaine de l'énergie vise à:
a) assurer le fonctionnement du marché de l'énergie,
b) assurer la sécurité de l'approvisionnement énergétique dans l'Union, et 
c) promouvoir l'efficacité énergétique et les économies d'énergie ainsi que le développement des énergies nouvelles et renouvelables.
2. La loi ou la loi-cadre européenne établit les mesures nécessaires pour atteindre les objectifs visés au paragraphe 1. Elle est adoptée après consultation du Comité des régions et du Comité économique et social.
Cette loi ou loi-cadre n'affecte pas le choix d'un État membre entre différentes sources d'énergie et la structure générale de son approvisionnement énergétique, sans préjudice de l'article III-130, paragraphe 2, point c).

Clap Clap Clap... C'est beau tout cela, mais où sont les moyens d'action ? Est-ce qu'on a une majorité au parlement pour établir une telle loi-cadre ? Hélas non. Et pourquoi devrait-il y avoir un marché de l'énergie ? Ne peut-on pas considérer que la fourniture d'énergie est du ressort de la collectivité et donc de l'Etat ? Je préfère savoir les centrales nucléaires gérées par la collectivité dans le cadre démocratique plutôt que par le secteur privé. Charge à la collectivité de décider si elle veut faire des économies d'énergie pour des motifs environnementaux. Le secteur privé en serait incapable. J'imagine mal un gérant de centrale faire de la publicité pour qu'on consomme moins d'électricité. Nul doute par ailleurs qu'un marché de l'électricité aboutirait dans un premier temps à la construction de nombreuses centrales thermiques (charbon et gaz). On serait loin de développer massivement les énergies renouvelables. L'énergie est une question beaucoup trop complexe pour la résumer comme cela est fait dans la constitution.   

CHAPITRE III  LA POLITIQUE COMMERCIALE COMMUNE

Article III-216
En établissant une union douanière entre les États membres, l'Union entend contribuer, conformément à l'intérêt commun, au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs, et à la réduction des barrières douanières et autres.

Vive le libre échange ! Les flux de transports ne sont pas sur le déclin avec un tel texte.

Récapitulons !

Je vais voter NON au projet européen de traité constitutionnel car :

Alors que je termine cette page, un doute me traverse l'esprit. Je viens d'entendre Nicolas Hulot ce matin (24 mai 2005) sur RMC entre 8h et 9h20. Jean Jacques Bourdin lui pose la question de l'Europe. Nicolas Hulot lui répond que la constitution est totalement imparfaite car même si elle annonce des intentions d'agir en faveur de l'environnement, elle s'interdit en même temps toutes régulations des flux de transports et cela sera très difficile de le modifier avec la nécessité de l'unanimité. Malgré cela, il semble qu'il va voter oui car l'Europe est ce qui tire la France vers le haut au niveau de l'environnement (je ne suis pas d'accord, lire plus haut) et qu'il serait regrettable de casser la construction européenne car c'est à ce seul niveau qu'on aura du poids pour faire face aux USA et aux pays émergents. Un doute me traverse donc l'esprit car l'homme que je soutiens probablement le plus a adopté un choix qui n'est pas le mien. Même si je ne change pas d'avis, ce doute m'incite à prendre le maximum de recul par rapport à ce traité. Pour moi, il n'est pas question de casser l'Europe, je veux juste une autre direction plus claire et plus favorable à l'environnement.

Je ne cherche donc pas à vous inciter à voter non, je vous indique juste mon cheminement et vous souhaite une bonne réflexion pour arrêter votre décision ce 29 mai

Eric Souffleux, 26 ans, décroissant marginal qui votera non au traité constitutionnel européen le 29 mai 2005.

24 mai 2005

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Dernière mise à jour : 11 juin 2006
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