SURVEILLANCE VÉTÉRINAIRE DES CONCOURS D'ATTELAGE   

20 mars 1994   (dernière mise à jour : 9 avril 2006)

  C'est le Prince Philipp d'ÉDIMBOURG, alors Président de la Fédération Équestre Internationale, qui au sein d'un comité, institua un règlement pour le Concours International d'Attelage, afin d'uniformiser des pratiques variées adoptées surtout en Hongrie et en Allemagne. Il prit exemple sur le Concours Complet pour définir un règlement de Concours d'Attelage disputé sur trois jours. Il fut adopté pour la première fois en 1969 lors du Concours International d'Attelage organisé par la Suisse. De ce fait, la surveillance vétérinaire est calquée sur celle exercée au cours du Concours Complet.
  Elle consiste à faire respecter les règlements sanitaires, à contrôler l'effort des chevaux, à assurer un rôle de secourisme en cas d'incident.

                                                    ASPECT RÉGLEMENTAIRE

  La première journée du concours est consacrée à la présentation de l'attelage puis à une reprise de dressage sur carrière. La veille ou le matin, le vétérinaire doit vérifier l'identité des chevaux et poneys en comparant la description imagée de leurs livrets signalétiques, avec l'animal présent devant lui. C'est à ce moment que les marques et particularités de la robe de l'animal prennent toute leur importance ( balzane, en-tête, épis ). Ne peuvent concourir que les chevaux ayant des papiers.

  Pour tous les concours, les chevaux et poneys doivent avoir plus de 4 ans ( sur la mâchoire inférieure : les pinces et mitoyennes définitives sont poussées, les coins sont encore des dents de lait), les chevaux de trait doivent avoir plus de 3 ans ( à 3 ans seules les pinces définitives sont poussées). Pour les championnats les chevaux doivent avoir plus de 5 ans (la bouche est faite, il ne reste plus d'incisive de lait), les chevaux de trait doivent avoir plus de 4 ans.
  Les animaux de plus de 1,48 m sont placés dans la catégorie chevaux, les poneys mesurent donc moins de 1,48 m.
  Le carnet de vaccination prouvera que le cheval est bien vacciné contre la grippe équine et la rage (réglementation variable suivant les départements) pour participer aux concours officiels.
  Le cheval tenu en bride est alors présenté devant le vétérinaire qui apprécie son état d'entretien et de santé. Il se méfiera des plaies de harnachement et des boiteries en faisant trotter le cheval. Il inspectera la ferrure qui s'use surtout en pince lors d'efforts de traction. En effet, pour accroître sa force, le cheval porte son poids en avant en se déséquilibrant, ses antérieurs sont sous lui et ses postérieurs sont en arrière. Les sabots ne peuvent plus être à plat sur le sol, le contact ne peut se faire qu'en pince.
  Il éliminera tout cheval qui lui semblera incapable de pouvoir supporter le concours sans dommage.

Ne peuvent concourir que les chevaux ayant des papiers et qui sont porteurs d’une puce d’identification électronique.

                                                    ASPECT MÉDICO-SPORTIF

  La deuxième journée du concours est consacré au parcours de "marathon". Suivant la classe du concours, il comporte de 2 à 5 sections:

section distance max  allure Vitesse max
A 10 km libre 15 km/h
B 1200 m pas 7 km/h
C 5 km trot 19 km/h
D 1200 m pas 7 km/h
E 10 km trot 15 km/h

        Les vitesses indiquées sont pour les chevaux, elles sont diminuées pour les poneys et les chevaux de trait.

        Les sections D et E sont obligatoires, et l'inspection vétérinaire a lieu avant le départ de la section E, pendant la phase de repos de 10 mn.
        La nature du terrain : boueux, sableux (fort tirage, fatigue importante), caillouteux (blessure des pieds), les conditions météorologiques: temps orageux (coup de chaleur), temps froid et humide (myosite), vont orienter les pathologies.

      Le vétérinaire appréciera la façon de marcher des chevaux finissant la section D au pas, et détectera d'éventuelle boiterie.

      A l'arrivée la Fréquence Cardiaque sera de 70 à 80 battements par minute, le cheval ayant déjà récupéré de la section C pendant laquelle la FC a pu dépasser les 150. Par comparaison, en épreuve d'endurance, la FC doit retomber au dessous de 64 battements par minute au bout de trente minutes sinon le cheval est éliminé. En attelage il n'y a pas de chiffre barrière, mais une FC de 70 peut-être considérée comme valeur seuil après les 10 minutes d'arrêt.
      Pour les attelages en paire, il faut se méfier des différences d'intensité de tirage entre les 2 chevaux. L'un peut être frais car fainéant, tandis que l'autre accuse de la fatigue car volontaire (intérêt des palonniers à balance). C'est au meneur d'égaliser le travail entre les deux chevaux en stimulant de la voix celui qui se repose, s'il ne veut pas se faire éliminer pour fatigue trop importante de celui qui tirait. La quantité de sueur émise n'est pas en relation directe avec la quantité de travail fourni. Elle dépend de caractères individuels physiologiques et comportementaux.

  La fréquence respiratoire ne doit pas dépasser la fréquence cardiaque pendant la récupération, c'est ce que l'on appelle le phénomène d'inversion. on observe ce phénomène lors du coup de chaleur, pendant lequel le cheval tente de se refroidir en forçant l'élimination de vapeur d'eau par la respiration.
  Il faut rechercher les signes de déshydratation : la peau reste humide et continue à évaporer de l'eau même au repos, la cornée de l'oeil prend un aspect dépoli, vitreux, le regard est fixe, les muqueuses restent congestionnées, la bouche reste sèche.

  Le spasme du diaphragme synchrone des battements cardiaques est bien audible au stéthoscope (bruit de hoquet couvrant le bruit cardiaque) et est éliminatoire s'il survient lors de pertes électrolytiques importantes.
  Le vétérinaire évaluera l'importance des frottements de la sellette et des portes brancards sur la peau du cheval.

  Il faut palper les tendons et être très vigilant vis à vis des tendinites subaigües, qui peuvent s'aggraver brutalement sous l'effet de la fatigue ou de sollicitation importante lors de montées abruptes de certains obstacles de la section E. Le cheval qui s'arc-boute pour gravir une pente, prend son appui sur les pinces grâce à la traction exercée par les tendons fléchisseurs. On évitera de mettre ses doigts sur le fer en voulant le manipuler, car si le parcours se termine par une route ou un chemin très caillouteux, il peut être très chaud.

ASPECT SECOURISME              

        Le vétérinaire interviendra n'importe où sur le parcours lors d'incidents majeurs pouvant affecter la vie du cheval, alors que les incidents mineurs attendront la fin de l'épreuve pour être solutionnés.
Pour répondre à ces incidents, le vétérinaire devra disposer de
- solutés en quantité significative : chlorure de sodium isotonique, Ringer soluté, Ringer lactate, chlorure de sodium à 7%, borogluconate de calcium
- anti inflammatoire non stéroïdien
- sédatif : xylazine, détomidine
- antibiotique : excenel, gentamicine
- pommade lotagen, pommade ophtalmique
- pansements, bandes plâtrées, attelles PVC
- sutures, agrafeuse
- vétédine savon
- reconstituant énergétique : biodyl
- matériel de déferrage
- furosémide

Le plus grave est le coup de chaleur.

   
     On l'observe au cours ou après un effort intense, dans une atmosphère chaude et humide comme un temps orageux. Lors du mouvement, 75% de l'énergie développée apparait sous forme de chaleur et doit être dissipée. Le temps chaud limite les pertes par conduction entre la peau et l'air, l'humidité de l'air gène l'évaporation de la sueur et la peau ne peut pas se refroidir.
        La température du cheval peut dépasser 42°C, sa respiration est accélérée pour augmenter l'élimination de vapeur d'eau (80 à 100 battements respiratoires par minute), sa fréquence cardiaque reste de 60 à 80 battements par minute (tachyarythmie), il s'affaiblit. Il est couvert de sueur puis sèche brutalement par arrêt de la production de sueur (choc hypothalamique). C'est le coup de chaleur. La température continue à monter, il a des convulsions et peut tomber dans le coma, les muqueuses très rouges deviennent violacées. Il peut mourir s'il n'est pas rapidement refroidi.

Il présente une alcalose respiratoire à cause de l'hyperventilation pulmonaire éliminant du gaz carbonique, donc des ions H+
                                        H+ + HCO3-  ==>  H2O + CO2
Il présente aussi une alcalose métabolique du fait de la déshydratation et la perte de Cl- par la sueur, ou une acidose métabolique du fait de l'accumulation d'acide lactique.
Les paramètres biochimiques augmentent pour : CK, H+, Protéine, AST
Diminuent pour : P, Cl, Ca, Mg

        Il faut mettre le cheval à l'ombre dans un endroit bien aéré (ventilateur d'appoint), puis asperger son corps avec de l'eau fraîche mais non glacée. En effet l'eau trop froide resserre les vaisseaux sanguins de la peau et limite donc les échanges de chaleur entre le sang et l'atmosphère. Par contre on peut placer des pains de glace sur les jugulaires (grosse veine du cou). Ils permettent de refroidir plus vite le sang circulant. Les artères carotides situées dessous enverront alors du sang plus frais vers le cerveau. Les sabots seront copieusement arrosés pour éviter les risques de fourbure.

        Le traitement médical visera à réhydrater et stimuler la circulation sanguine, l'utilisation de corticoïdes limite l'oedème cérébral, mais risque de provoquer une fourbure, aussi il faut préférer les AINS (anti inflammatoire non stéroïdien), perfusion de chlorure de sodium à 0,9%, de Ringer solution ou de Ringer-lactate s'il y a acidose, à raison de 30 à 60 ml/kg pendant 2 à 3 heures).

        Le cheval sera mis sous surveillance pendant trois jours, sans être déplacé. A cause de l'épuisement en glycogène et en électrolytes, le cheval peut présenter des coliques, une atteinte rénale ou hépatique, de la fourbure pendant cette période.

        La diminution de la circulation viscérale pour augmenter la circulation cutanée provoque de l'hypoxie au niveau de l'intestin, à l'origine de blessures de la muqueuse intestinale et d'hyperperméabilité de la paroi. Ceci permet le passage d'endotoxines vers la circulation sanguine, endotoxines qui vont stimuler des décharges de cytoquines et la production d'oxyde nitrique. Ce sont eux qui vont augmenter l'hyperthermie et l'hypotension. L'hyperthermie libère aussi des cytokines, des adhésines (micro thrombus), altère les mitochondries et le réticulum sarcoplasmique des fibres musculaires (22).

Le cheval guéri de son coup de chaleur sera remis progressivement au travail, mais aura du mal à fournir des efforts soutenus.

Prévention du coup de chaleur:

        Il faut toujours faire suivre au cheval un entraînement en adéquation avec le niveau de l'épreuve à disputer, l'habituer à boire des solutions salines après chaque exercice. Cependant, un cheval entraîné pourra développer ce coup de chaleur si l'exercice est prolongé et que l'atmosphère est particulièrement chaud et gène le refroidissement du cheval.
Il faut surveiller les signes de fatigue pendant l'épreuve. En effet, chez le cheval en activité intense, la fatigue se manifeste notamment quand la température artérielle carotidienne atteint 42°5 / 43°C, alors que le muscle est à 44° / 45°C. Pour éviter un klash organique à ces températures, on a pu vérifier sur des poneys travaillant dans une atmosphère sèche à 41°C, à 30% de la VO2 max puis à 65% de la VO2 max, que la circulation sanguine dans les quatre pattes était diminuée de 30% par rapport à un travail dans une atmosphère à 25°C. Ainsi cette réduction de circulation sanguine réduit le travail des muscles, donc la performance, mais réduit l'émission de chaleur, ce qui protège le poney.

        L'arrêt du cheval à l'ombre, en courant d'air, l'application d'eau froide sur le corps en particulier l'encolure et les jugulaires, permettent de le refroidir rapidement.

        Le cheval souffrant d'anhydrose (absence de sudation) sera très exposé au coup de chaleur en cas de travail intense ou de conditions atmosphériques trop chaudes

La déshydratation

        Elle survient suite à un effort soutenu, activant la sudation donc la perte en eau, pendant un temps long sans abreuvement. Avec une température extérieure de 30°C, le cheval perd 15 à 30 litres de sueur par heure suivant le tirage du parcours lorsqu'il est au trot. La sueur est un liquide complexe qui ne contient pas que de l'eau. Celle du cheval est riche en sels( sodium, potassium, chlorure), et dans une moindre quantité elle contient aussi du calcium et du magnésium.
Le calcium, le magnésium, le potassium interviennent dans la diffusion de l'influx nerveux et la contractilité musculaire, aussi la perte de ces minéraux va accélérer la fatigabilité du cheval. L'eau de la sueur provient du sang qui va donc se concentrer et diminuer en quantité, et ainsi certains muscles seront mal irrigués (mauvais approvisionnement en oxygène, moindre élimination des déchets), ce qui diminuera les performances du cheval. Cette perte d'eau va entraîner des modifications dans l'équilibre acido-basique du sang et des cellules musculaires.

        Le sang circulant dans le muscle en activité intense se charge des métabolites générés dans les cellules musculaires par cette activité. Ainsi il présente des concentrations en lactate, H+, K+, CO 2 bien plus élevées que le sang circulant dans la jugulaire.

Le Strong Ion Difference ( SID) permet d'apprécier l'alcalose ou l'acidose d'une solution.
     SID =    strong base cations  -            strong acid anions
            = (Na+ + K+ + Mg++) - ( Cl- + lactate- + Phospho Créatine--)
Ce sont ces ions forts (rattachés aux acides ou bases fortes) qui vont déterminer les concentrations en H+ et en HCO3- car ils affectent directement la dissociation de l'eau en H+ et OH-
Variations du SID :
- il diminue lorsque Cl- ou lactate- augmente. Dans ce cas il y a acidose car le bicarbonate diminue et H+ augmente pour former H+ Cl-
- il augmente lorsque Na+ ou K+ augmente. Dans ce cas il y a alcalose car OH- augmente pour former Na+ OH-

        Particularité du muscle du cheval : il a une forte capacité tampon, hors bicarbonate contre l'acidose, représentée par la créatine, la carnosine, l'histidine (acide aminé présent dans l'albumine, l'hémoglobine), l'ATP
        Ainsi si cette capacité tampon est de 43 mEq/kg de muscle sec humain, elle est de 58 mEq/kg de muscle sec de cheval, 93 mEq/kg de muscle sec de cheval entraîné (22)

        L'acidose conduit à la sensation de fatigue, diminue la sensibilité des protéines contractiles vis à vis du calcium.

        La sueur du cheval contient une protéine spécifique qui permet de l'étaler sur toute la surface de la peau et favorise son évaporation. C'est elle qui donne un aspect écumeux à la sueur dans les zones soumises à des frottements (fesses, coudes, harnais).

        L'émission de la sueur est sous la dépendance du système nerveux sympathique. C'est dans l'hypothalamus que sont gérées les informations venant des thermorécepteurs et les réponses apportées à ces données :
- augmentation de la circulation périphérique vers la peau, par ouverture de shunts artério-veineux , ce qui augmente les pertes de chaleur par convection et radiation si l'air est froid.
- Diminution de la circulation sanguine dans les viscères et le tissus adipeux.
Le besoin en oxygène augmente avec l'intensité de l'exercice, aussi le rythme respiratoire et la circulation sanguine pulmonaire augmentent, ce qui intensifie l'évaporation pulmonaire. Chaque litre d'eau perdu entraîne une déperdition de chaleur de 580 kcal.

        En réaction à la déshydratation, la circulation sanguine va diminuer dans les viscères et les reins, pour maintenir l'irrigation des muscles, du cerveau, du cœur et de la peau pour refroidir le corps. Cependant l'eau froide hypotonique, au contact des nerfs de la bouche et de la gorge, fait disparaître la sensation de soif au cheval déshydraté. Ainsi le cheval refuse de boire moins de une heure après une épreuve d'endurance. Ce comportement peut-être modifié en lui apprenant à boire de l'eau tiède contenant des électrolytes.

        Le cheval déshydraté présente un halètement persistant et sa fréquence cardiaque reste élevée au repos, ses muqueuses (oculaire, nasale) sont d'autant plus rouge foncé qu'il a perdu de sueur, ses yeux sont enfoncés dans les orbites. Pour apprécier l'intensité de la déshydratation, il faut pincer un pli de peau à hauteur de l'épaule, puis relâcher. La peau mettra d'autant plus de temps à retrouver sa position normale qu'elle est déshydratée.
Le travail du cheval d'attelage est un travail d'endurance donc provoquant de fortes sudations entraînant des pertes en Na+, K+, Cl- . Si Na+ et Cl- sont des ions extra cellulaire, K+ est intra cellulaire . Dans la sueur, liquide isotonique, les charges + de Na et K sont compensées par Cl- . De ce fait, la perte extra cellulaire de Cl- est 1,3 à 1,8 plus importante que celle de Na+. La chute de la concentration sanguine de Cl - est responsable d'alcalose.
SID = (Na+ + K+ ) - ( Cl- + lactate- )
Cheval avant exercice 38 mEq/l = (135 + 4) - (100 + 1)
Cheval après exercice 53 mEq/l = (135 + 4) - (85 + 1)

        Le traitement vise à combler le déficit en eau et sels minéraux par la bouche ou en perfusion intra-veineuse
- pour un cheval entraîné, la déshydratation est accompagnée d'alcalose, donc il vaut mieux le réhydrater avec du chlorure de sodium iso, ou Ringer solution
- pour un cheval non entraîné, ayant fait l'épreuve en anaérobie libérant de l'acide lactique, l'acidose est plus à craindre, donc il vaut mieux le réhydrater avec du Ringer lactate. L'utilisation du bicarbonate qui n'est pas le tampon naturel prédominant chez le cheval n'est pas recommandé. En effet, en milieu acide le bicarbonate se dissocie en :
HCO3- + H+ = H2O + CO2
Ceci va accroître la pression partielle sanguine en CO2, diminuant l'oxygénation des tissus et la transformation des lactates en pyruvates.

Composition des électrolytes injectables

  Na
mEq/l
K Cl Ca Mg
mEq/l
Acét
HCO3
Lacta pH mOsm/l
Ringer's solution 147 4 156 4 0 0 0 5.5 310
Lactated Ringer's 130 4 109 3 0 0 28 6.5 274
0,9% NaCl 154 0 154 0 0 0 0 5 308
Lodevil 51 3 41 0 1 72 0 7.3 230

   

Composition des liquides naturels

  Na
mEq/l
K Cl Ca Mg
mEq/l
       
Plasma 140 4 100 6 1.8        
Sueur 159 32 165 6 4.6        

Besoins journaliers en électrolytes mesurés en mg/kg de poids vif suivant le niveau de sudation

  Na
mEq/l
K Cl Ca Mg
mEq/l
       
Maintenance 20 50 30 40 18        
< 5 l de sueur 50 60 60 50 20        
10 à 15 l de sueur 100 90 150 60 25        
> 20 l de sueur 200 150 260 70 30        

        Le gros intestin du cheval peut contenir 8 à 18% de son poids en eau, c'est pourquoi il faut lui permettre de le remplir de fourrages qui auront un rôle d'éponge. .
La veille et le jour de l'épreuve, il faut distribuer des électrolytes dans l'eau de boisson pour faire face à ces pertes par sudation:
NaCl 20g , KCl 8g , CaCl2 1g , MgCl2 0,5g
Après l'effort, il faut lui donner une solution saline de chlorure de sodium à 0,9% à la température ambiante. Cela stimulera une prise de boisson spontanée au cours de la phase de récupération. L'addition de glucose dans cette solution n'améliore pas l'absorption intestinale comme chez l'homme.

La myosite d'effort et la myoglobinurie.

        Elle se rencontre sur le cheval insuffisamment entraîné, ou sur le cheval trop nourri, avec peu d'exercice dans les jours qui précèdent la compétition. Il s'agit d'une destruction de fibres musculaires surtout localisée dans les grandes masses musculaires (fessiers, dos), insuffisamment irriguées pour apporter l'oxygène et éliminer l'acide lactique, lorsque le cheval manque de souffle.

        Si l'endurance utilise le métabolisme aérobie, le cheval mal entraîné sera contraint d'utiliser aussi le métabolisme anaérobie. Celui-ci libérera des ions H+ venant de l'hydrolyse de l'ATP, produits par les lactates, mais tamponnés par la créatine, la carnosine, les phosphates, les protéines.
Ainsi au niveau de la fibre musculaire,
- l'exercice intense diminue la Phospho-Créa--, le K+, augmente le lactate- , ce qui diminue le SID et provoque une acidose musculaire
- la poursuite de l'exercice diminue encore plus le K+ qui passe dans le milieu extra cellulaire pour être éliminé dans la sueur, l'acidose augmente
- la récupération active en fin d'exercice consomme à nouveau de grandes quantités de phospho-Créa pour régénérer de l'ATP à partir de l'ADP. Cela augmente le SID et alcalinise le muscle.

        Cette acidose musculaire va léser des fibres, entraînant des déchirures musculaires. La créatine est un facteur de neutralisation de cette acidose. 65% de la créatine est phosphorylée et dans cet état elle tamponne les ions H+ produits lors de la glycolyse anaérobie, selon la réaction :
                         Phospho-Créa-- + MgADP- + H+  ==>  MgATP-- + H2O + Créatine

        Les accumulations de ADP et de H+ sont des facteurs de fatigue musculaire. La quantité de Phospho-Créa musculaire stockée est un élément déterminant le niveau de performance. Cependant, l'administration de créatine par voie orale chez le cheval n'augmente pas sa concentration musculaire comme chez l'homme ou le chien, sans doute par défaut d'absorption gastro-intestinale chez l'herbivore.

        On observe d'abord une raideur du dos à la palpation puis un blocage complet du mouvement si le parcours est poursuivi. A ce stade il ne faut pas forcer le cheval à marcher, il faut attendre que le sang restitue de l'énergie dans le muscle. Les fibres en contracture vont se détendre sans provoquer de nouvelles déchirures.
Le traitement consiste en une immobilisation avec tranquillisation, une perfusion de Ringer-lactate pour éliminer les toxiques apparus et apporter de l'énergie, des injections d'antioxydants et d'analeptique cardio-respiratoire.

Le syndrome du cheval épuisé:

        On l'obtient sur le cheval dont l'entraînement ne correspond pas à l'effort demandé. Cela se manifeste par une déshydratation modérée, des myosites localisées et un affaiblissement généralisé. Le cheval apparait déprimé, endormi, ne prête pas attention à ce qui l'entoure. Les fréquences cardiaque et pulmonaire restent élevées, souvent inversées, il ne récupère pas. Cela peut s'accompagner de coliques.
Il faut donc immobiliser le cheval, le refroidir s'il est en hyperthermie, lui donner à manger, à boire une solution saline. Il faut le réhydrater s'il n'a pas récupéré en 30 minutes :
-A la sonde naso-oesophagienne s'il ne présente pas de colique, il reçoit 5 à 8 litres de solution saline.
-En perfusion de solution neutralisant le déséquilibre acido-basique
en cas d'acidose lactique (effort trop important, métabolisme anaérobie) : Ringer lactate
en cas d'alcalose (perte de Cl- par la sueur, hyperventilation pulmonaire) : Ringer solution, chlorure de sodium à 0,9%

        L'acide lactique est oxydé dans le foie, et est utilisé directement par le myocarde. La vitesse de disparition du lactate est indépendante de la concentration initiale, et l'acidose a fortement diminué en 1 heure.

Il faut lui apporter de l'énergie (perfusion de glucose), stimuler le fonctionnement du foie et du rein.

Le Flutter diaphragmatique (Syndrome Diaphragmatic Flutter = SDF)

        Il se caractérise par la mise en évidence de mouvements synchrones des flancs avec chaque battement cardiaque. Il est associé à la déshydratation et au syndrome d'épuisement. Il se caractérise par une alcalose métabolique et une hypocalcémie.

        L'exercice prolongé en atmosphère chaude provoque la perte d'électrolytes dans la sueur, en particulier Cl- qui équilibre Na+ et K+ . Ceci a pour effet d'augmenter le SID
                                                SID = (Na+ + K+ ) - ( Cl- + lactate- )
et d'installer une alcalose métabolique. Celle-ci diminue la solubilité du calcium qui va rester lié à l'albumine, et la calcémie diminue. Le stress et la cortisone secrétée diminuent aussi la calcémie. L'hypocalcémie affecte le potentiel du nerf phrénique .

        On peut également rencontrer le SDF lors de colique, de tétanie de lactation, lors d'utilisation de furosémide pour cacher des produits dopants, lors d'utilisation abusive de bicarbonate de sodium pour neutraliser une éventuelle acidose lactique.
Le SDF signe des problèmes métaboliques et l'exercice doit être suspendu pour éviter le développement de désordres plus importants. En endurance, SDF est une raison suffisante pour éliminer un cheval de la compétition.

Traitement :
- aucun si le cheval boit et mange spontanément.
- Perfusion de 100 à 300 ml de borogluconate de calcium à 20%, avec surveillance cardiaque
- Réhydratation avec du Ringer's solution, du glucose à 5%

L'épistaxis

Il s'agit de l'apparition de sang aux deux narines du cheval après une épreuve. Ce sang provient d'hémorragie pulmonaire des lobes dorso caudaux où se font la plus grande partie des échanges gazeux.
Cet accident fait suite à des ruptures des parois d'échange gazeux entre l'alvéole et le capillaire sanguin lors d'une surpression.

Au repos :       Alvéole P = - 6 mm Hg
                    +++++++++ Paroi P transmurale = 23 + 6 = 29 mm Hg
                        Capillaire P = 23 mm Hg

En exercice   Alvéole P = - 31 mm Hg
                    +++++++++ Paroi transmurale = 57 + 31 = 88 mm Hg
                    Capillaire P = 57 mm Hg

En exercice avec hémiplégie laryngée    Alvéole P = - 57 mmHg
                                                          +++++++++ Paroi transmurale = 134 mm Hg
                                                            Capillaire P = 77 mm Hg

Le traitement vise à diminuer la pression capillaire à l'aide de diurétique (furosémide) et à diminuer la pression alvéolaire lors de l'inspiration en levant tout obstacle à l'air (antiinflammatoire, clembutérol qui ont peu d'efficacité).

Les traumatismes :

Ils sont de multiples origines pendant la compétition : plaie de harnachement, atteinte du bas des membres sur des chemins pierreux ou lors de passage de gué rocheux, ruade dans le pare-crotte, prise de trait, prise de longe, chute avec la voiture, fracture…

- Erosion cutanée :
Application de pommade lotagen.

- Atteintes oculaires :
Elles sont très rare car l'œil est protégé par une pièce de la bride : l'œillère. Il est normalement à l'abri des coups de fouet, des atteintes de buisson

- Plaie superficielle :
Tonte périphérique, lavage abondant avec du sérum physio, antibiothérapie locale, suture avec du fil ou agrafes.

- Plaie profonde :
Tonte périphérique, lavage abondant avec du sérum physio. Si une articulation est touchée, il faut raser et désinfecter à l'opposé de la lésion pour injecter du sérum physio qui sortira par la plaie en l'irriguant . Déposer des antibiotiques, poser un pansement humide puis référer pour des soins complets et sutures.

- Fracture :
" Il y a urgence à immobiliser un membre fracturé, mais il n'y a pas urgence à le référer vers un centre spécialisé " (23).
Cheval debout : pour ramener le cheval du lieu de l'accident à son box, il faut lui administrer un peu de sédatif xylazine ou détomidine. Puis 4 personnes sont nécessaires pour le conduire au box ou dans un van. Une personne à la tête, une à la queue, deux au passage des sangles pour le soutenir avec une courroie.
Avec la fourche hydraulique d'un tracteur, on peut le soulever après lui avoir mis chaque membre dans une chambre à air de camion.
Cheval couché : il faut lui administrer une sédation profonde et le glisser sur une bâche pour le tirer jusqu'au box.

* nature de la fracture :
La fracture ouverte est considérée contaminée si elle est traitée dans les 3 heures qui suivent l'accident, elle est considérée infectée au delà des 3 heures. Une fracture suite au coup de pied d'un autre cheval est une plaie contuse infectée même s'il n'y a pas de plaie visible.
Les fractures comminutives sur tout os des membres sont d'un pronostic vital très réservé. Pour les antérieurs, les fractures diaphysaires du radius ou de l'humérus ne sont pas réparables sur un cheval de plus de 250 kg.
Pour les postérieurs, les fractures diaphysaires du tibia ou du fémur ne sont pas réparables sur un cheval de plus de 150 kg.

* Immobilisation du membre :
Il faut raser ou tondre autour de la fracture, faire une désinfection chirurgicale avec 3 savonnages au Vétédine savon. Il faut déferrer le pied sans tirer sur le fer. Le plâtre est mis sur une attelle en PVC de 10 cm de diamètre, coupée en deux.
Il faut traiter l'état de choc hypovolémique éventuel avec du sérum salé hypertonique à 7%, il faut contrôler la douleur avec des alpha 2 agonistes (xylazine, détomidine), il faut contrôler l'infection avec de l'Excenel et de la Gentamycine.

Le cheval peur-être référé 24 à 48h plus tard.

                                                                                * * *

        A la fin de l'épreuve, le vétérinaire peut être appelé pour des incidents mineurs, surtout des plaies. Il y a les plaies de harnachement au niveau de la sellette pour l'attelage en simple sur une voiture à deux roues, les plaies de frottement lorsque du sable s'infiltre dans la sous-ventrière après un passage à gué, ou au poitrail sous la bricole. Il faut contrôler les postérieurs qui peuvent avoir touché le palonnier lors de virage en montée abrupte. Ces plaies cicatrisent vite maintenant, avec l'aide de nombreuses pommades "antiseptiques et cicatrisantes" mises sur le marché.

        La dernière inspection a lieu le troisième jour avant l'épreuve de maniabilité pour s'assurer que les chevaux ont bien récupéré et ne présentent pas de courbatures ou de boiterie.

        Le rôle du vétérinaire ne se terminera pas à la distribution des prix.

        Le rôle du vétérinaire se terminera avec l'embarquement de tous les chevaux, car le dételage, le dégarnissage et l'embarquement dans les camions et vans, sont sources de nombreux incidents.

Dr Guy Souffleux

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